Terre de l'homme

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Sur le chemin de la mémoire

 

 

Cortège

 

 

 

Avant le début de la cérémonie du 27 mai.

 

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Le groupe de mots devoir de mémoire ne nécessite aucune explication. Il nous amène, au pied de notre mémorial nauzérois, 80 ans après la Capitulation sans condition du 3ème Reich. Ses mentors osaient le projeter pour mille ans. Ici, le 27 mai, nous commémorons, aussi, la naissance en 1943 du Comité national de la Libération.

Rappelons que notre lieu de mémoire, érigé en 2012, se voulait être un lieu d'assemblage des entités de notre limbe nauzérois. Il fut décidé et porté par les élus de notre bassin de vie, non pour privilégier une localité mais pour s'inscrire en témoignage d'une vie résistante qui, hélas, a connu plusieurs dates tragiques. En 1944, le 4 mars, le 24 juin et le 9 août furent des journées de cruels deuils douloureux. Elles réunirent dans l'au-delà, des partisans français, certainement, mais  aussi  deux Espagnols, un Italien, un Tchèque et un Polonais. Inspirons-nous du poète Louis Aragon. Il appela à l'unité dans la Résistance, par-delà les clivages politiques et religieux. Elle a été superbement imagée dans la Rose et le réséda. Ce  titre fait référence aux groupes opposés au sein de la Résistance. Dans l'esprit de son auteur, la rose, la rose rouge, symbolisait le communisme et le réséda, fleur blanche, personnifiait le royalisme et, par extension, le catholicisme. Le refrain du poème se résume par l'expression " Celui qui croyait au Ciel / Celui qui n'y croyait pas". Ce poème, prenant, fut mis à l'honneur, il y a une vingtaine d'années, au mémorial de Vaurez, par Marie Praderie représentant le maire de Monplaisant. Ce florilège de métaphores  rappelle combien nous savons être couplés quand l'adversité nous assaille tous.

 

 

Ce 27 mai, implicitement, les écoliers de Sagelat ont pris rang pour devenir passeurs de mémoire. Ces élèves ont eu la chance d'avoir pour enseignante, Mélanie, une pédagogue qui noue ses racines des deux côtés des Alpes. Pour elle, la terminologie de Résistance a un sens et c'est pour cela que son école, à plusieurs reprises, fut couronnée de succès dans le Concours départemental. Ses écoliers, avant de filer vers les hauteurs du collège Pierre Fanlac, où Marie-Claire Dardevet, Véronique Malaurie et Fabien Planchou les attendent, savent que leur modeste classe a accueilli, dans les heures noires d'après 1939, des petits Alsaciens, Lorrains, de jeunes Slaves, Italiens, ou Espagnols que les vicissitudes de l'histoire ont amené là, dans cette ruralité nauzéroise où les enfants bilingues, certainement, parlaient le français mais le mélangeaient, parfois, de pointes d'occitan.

 

Oui, en 1944, au bord de nos routes, s'échappaient les hordes nazies. Elles ont laissé plus au nord, leurs indélébiles et énormes traces, les plus monstrueuses, les 9 et 10 juin à Tulle et à Oradour. Ces  soldats de l'autre rive du Rhin ont tenu à endeuiller nos paisibles villages et c'est un peu pour cela qu'en 2012, il a paru nécessaire de transmettre les noms de nos valeureux partisans sur une roche du pays. Cette pierre vient du Scournat, écart de Grives. Le jour où, symboliquement, nous ouvrons le chemin de mémoire aux préadolescents, notons que ce n'est pas tout à fait un hasard si la recherche d'un gros caillou, en 2012, se porta sur Grives. La guerre a ôté la vie à deux instituteurs attachés à Grives, soit par leur naissance soit par leurs fonctions. Michel Giffault enseigna à Grives, avant de donner sa jeune vie à Tuilières en affrontant les intrus ; Abel Laviale, lui, fut abattu, le 7 juillet 1944, au pied de son école de Vézac, pour ne pas avoir livré de renseignements à l'occupant. La présence de Sébastien Fongauffier, maire de Grives, et de Lucien Larénie, maire-adjoint de Vézac, remplaçant notre ami Christian Roblès désolé de ne pouvoir être associé à ce pèlerinage mémoriel, scelle nos amitiés des deux rives de la Dordogne.

 

Deux mots pour terminer avec la résistance féminine. Tout le monde connaît le nom de Lucie Aubrac, de Marie-Claude Vaillant Couturier ou de Joséphine Baker. Monplaisant et Sagelat ont donné en 2016, le nom de cette dernière à la traversée fongauffiéraine en hommage à cette artiste qui porta en elle la Résistance. Localement, Marthe Conty-Gorce, Sylvie Baudet-Marty, Suzanne Coulom, Yvette Murat, Marie-Antoinette Fabre-Jacklin… et d'autres, en prenant bien des risques, furent nos dames de la Résistance.

 

 

 

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Jacques Prunière, cette année, fut le doyen des porte-drapeaux. C'est donc à lui que revint l'honneur et le privilège d'ouvrir le cortège avec Amélia, une jeune lycéenne.

 

 

Lycéenne porte drapeau

 

Amélia Alphonso-Dell, lycéenne à Sarlat, s'est fortement impliquée pour devenir porte-drapeau. Ainsi, elle honore la mémoire de Jean Bariaud, récemment décédé, qui a ouvert le cortège avec Anaïs Manouvrier, en 2023 et, l'an dernier, avec Lisa Baffoual.

 

 

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Avant la cérémonie, on bavarde.

 

 

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C'est, tout naturellement, Olivier Merlhiot qui prit la parole pour l'ensemble des élus. On pouvait remarquer la présence des maires de Sainte Foy, Larzac, Belvès, Grives, Cladech, Castels et celle de maires-adjointes de Monplaisant- et Siorac, représentant respectivement Jean-Bernard Lalue et Didier Roques, élus excusés, qui ont répétitivement soutenu ce pèlerinage mémoriel. Joël Eymet et Jean-Luc Ayraud, premiers maires-adjoints de Sagelat et de Castels, ont également pris place dans le cortège.

 

 

 

 

À droite de Christian Léothier et de Serge Orhand, on reconnaît Sébastien Fongauffier, maire de Grives, Olivier Merlhiot, et Lucien Larénie, maire-adjoint de Vézac. Il représenta Christian Roblès, franchement empêché, qui, cependant, tenait à ce que Vézac soit représenté pour l'hommage à Abel Laviale, instituteur de Vézac, fusillé devant son école, le 7 juillet 1944. L'hommage rappela l'héroïsme de deux instituteurs. Abel Laviale, natif de Grives et Michel Giffault qui donna sa vie à Tuilières lors de l'assaut manqué, le 9 août 1944. Il était en poste à Grives, également en 1944.  Devant les élèves du C.M. 2, cet hommage eut pour but de mettre en relief la marche résistante des enseignants. .

 

 

 

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La présence d'une jeune porte-drapeau a pour finalité d'associer la génération montante et, par la féminité, souligne le rôle majeur des femmes dans la Résistance. Si les noms de Lucie Aubrac, de Marie-Claude Vaillant-Couturier et de Joséphine Baker sont plus que, notoirement, connus, n'oublions pas nos figures locales Marthe Conty-Gorce, Sylvie Baudet-Marty, Suzanne Coulomb, Yvette Murat, Marie-Antoinette Fabre-Jaklin ... et tant d'autres.

 

 

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Mélanie Pistolozzi, directrice de l'École de Sagelat, mieux que tous les discours, en lisant la lettre de Guy Môquet, a ému toute l'assistance et, bien entendu, les écoliers qui seront les futurs passeurs de mémoire.

 

 

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Devant le mémorial

 

 

 

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Profil de la stèle

 

 

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Le maire de Belvès a dû chahuter ses rendez-vous  pour être là.

 

 

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Pour l'heure, ces enfants sont les virtuels passeurs de mémoire. Ce sont eux qui ont fait l'appel des partisans tombés en 1944.

 

 

Les familles

 

Les familles. Cette  année, Nathalie Jarrige, quatrième en partant de la gauche, petite-fille de Georges Fabre, tint, tant pour sa tante que pour sa maman décédées, à venir honorer la mémoire de son aïeul.

 

 

Lycéenne porte drapeau

 

La nouvelle porte-drapeau, Castelloise, est lycéenne au Pré de Cordy.

 

 

 

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Fort discrètes, mais bien présentes, nos amies élues Patricia Lafon-Gauthier, conseillère départementale et Maryse Durand, maire de Sainte Foy, au centre de l'image, concrétisaient, avec Jasmine Chevrier et Marie Praderie, la volonté féminine de l'accomplissement du devoir de mémoire.

 

 

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Benjamin Serignac, maréchal des logis-chef, fut le représentant de la communauté de brigades.

 

 

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Les personnes présentes ont remarqué, avec plaisir, la présence des élues, tout particulièrement celles qui ont dû ajuster leur activité pour venir. Ce fut le cas pour Patricia et pour Maryse qui devaient jouer avec la montre.

 

 

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Un président de communauté de communes qui, au cours de plusieurs décennies, a honoré de sa présence bien des cérémonies mémorielles.

 

 

 

Derrière la stèle, Serge Orhand, Marie Praderie, Lucien Larénie et Sébastien Fongauffier. Cette stèle honore tous les partisans.

 

 

Paul-Marie

 

 

Rarement cité, Paul-Marie Chaumel est le personnage qui, avec compétence et discrétion, fait que le son est parfaitement maîtrisé... Ce qui n'est pas simple dans un environnement extérieur.

 

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Belvès, depuis la guerre, honore ses partisans et par ses odonymes, grave des repères d' histoire : rue Flandres Dunkerque, avenue de la Résistance, avenue Giffault, rue Manchotte, mais, depuis 2012, ne fleurit plus ces lieux symboliques. La cérémonie du 27 mai, dans un lieu propice à la quiétude du recueillement, regroupe tous les hommages résistants. 

 

 

Revenons sur le chemin de la mémoire qui, de la Croix des Frères à Belvès, file vers Fongauffier en passant par l'avenue de la Résistance, Landrou, Vaurez et le Bas de la Côte, le pied de la colline Saint Jean.

 

 

 

En 1974, Lucien Dutard qui avait bouclé en 1973, une longue césure de 16 ans de vie parlementaire, est venu sous une pluie glaciale de mars, au recueillement des valeureux résistants de la M.O.I. Ce recueillement très frais fut sobre. Il y a une vingtaine d'années, à Vaurez, au pied cette même stèle honorant Juan Gimenez, Antonio Rabanada, et Giovanni Bagnéra, trois jeunes hommes, a capella, ont entonné, à la surprise générale, "Le chant des partisans". L'un des trois était Olivier Merlhiot. Il  devint maire de Sagelat, peu après.

 

Il y a un quart de siècle, au mémorial de Landrou, un fort jeune résistant domicilié sur la Côte d'Azur, il avait 14 ans lorsqu'il rejoignit le Groupe des CVR, est venu là se recueillir à la stèle dédiée à Roger Orhand et Paul Gilet. Il était naturellement fort ému. Il reste à retrouver son nom.

 

En juin 2005, à la surprise générale, au pied de la stèle rappelant la tragédie du 24 juin 1944 qui emporta Maurice Desplat, Eugène Drapick, Georges Fabre et François Wroblenski, Mathilde Friboulet, une préadolescente de 10 ans, chanta "Le jour le plus long". Ainsi, elle rendit hommage aux libérateurs du 6 juin 1944. René Coustelier, alias Soleil, franchement troublé, laissa échapper quelques larmes.

 

 

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L'heure des remerciements.

 

L'équipe municipale et le cercle informel des "Amis de la Résistance" remercient toutes celles et tous ceux qui ont voulu que la flamme ne vacille pas pour ce 27 mai. En espérant n'oublier personne, les remerciements vont aux porte-drapeaux fidèles à leur mission, aux élus de la ruralité venus des communes distinctes, à Benjamin Sérignac, maréchal des logis-chef de la gendarmerie, à Mélanie Pistolozzi pour son implication pédagogique et, naturellement, à ses élèves qui  ont été attentifs et respectueux du devoir de mémoire, à la presse, aux petites mains qui ont préparé le verre de l'amitié. 

 

Un chaleureux remerciement plus dirigé va à l'équipe municipale sioracoise. Didier Roques ne pouvait être là. Il a délégué Jasmine Chevrier. Cette élue s'applique à tout ce qui peut être de ses prérogatives, dont le devoir de mémoire. Siorac était donc représenté par Jasmine mais, aussi, par Paul-Marie, le technicien du son, et par Bernard Flaud, son porte-drapeau. 

 

 

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Contributions photographiques de Bernard Malhache et d'Alain Eymet

 

 


30/05/2025
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Musique en synergie

 
concert 7 juin
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concert invitation
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Samedi 7 juin à 20h, après le concert dans la salle d’honneur de la mairie de Belvès, un dîner en l’honneur et en présence de Viv McLean (pianiste) à l’hôtel restaurant, Le boudoir, rue Jacques Manchotte à Belvès, est ouvert à tous avec un
menu unique au prix de 25 € :
 
Menu du 7 juin, 20h00, ouvert à tous :
 
- melon, jambon de pays, pesto à la menthe
- Comme un tagine d'agneau, pruneaux et abricots, semoule
- panacotta, coulis de fraises et pistaches concassées
Réservations au 0762342424
 
 
Les femmes enceintes ne payent pas à tous nos concerts pour leur bien-être, ainsi que pour le bien-être de leur futur bébé.
 
Pour réserver au concert :
06 71 08 74 57 et 06 31 61 81 68
et 05 53 23 86 22
 
Ce sera le 12e et 13e concert produits et organisés par Arcades le Buisson, en partenariat avec la Halle musicale de Belvès pour Musique en synergie.

29/05/2025
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Monique fut la première Fidézienne pendant 37 ans

 

SAINTE  FOY-de-BELVÈS

 

Le Mondou dans la peine

Monique fut la première Fidézienne pendant 37 ans

 

 

 

Monique Vergnolle

 

Un champ du Mondou, au printemps, où les coquelicots rendent un hommage floral à Monique Péchavit-Vergnolle. Photo Christelle Vergnolle 

 

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Les Fidéziens, en apprenant la nouvelle de la disparition rapide, à Périgueux, de Monique Péchavit-Vergnolle, pour le moins, furent attristés de ce deuil brutal du 21 mai.

 

Monique vit le jour dans la demeure familiale du Mondou, le 14 janvier 1947 et ne quitta guère le havre des Péchavit hormis une échappée parisienne, juste après son mariage. La famille, au cours des derniers mois, a connu bien des heures douloureuses et vit le cercle de la fratrie, en deux ans, se réduire à cinq reprises.

 

Monique a relayé au Mondou, sa sœur aînée Renée. Pendant un demi-siècle, elle fut la gardienne de ce hameau familial. Les rameaux ont essaimé dans les villages voisins jusqu'au proche Quercy. Monique, travailleuse sans faille, fut ouverte à la vie fidézienne. En 1970, elle convola avec Bernard Vergnolle, un jeune Monplaisanais, pour ouvrir une vie commune de 55 ans.  En 2024, ce couple aurait pu fêter les noces de zibeline et, cette année, pour quelques semaines, il n'a pas atteint les noces d'orchidée.

 

Monique devint, en mars 1977, la première Fidézienne quand l'équipe de Bernard obtint les clés de la mairie de Sainte Foy, mairie qui, jamais, ne vacilla au cours de six mandatures parfaitement remplies par 37 ans de gestion communale.

 

Le Mondou, par deux fois, connut la joie avec l'arrivée de Yannick puis de Christelle. Les rameaux se sont enrichis avec la naissance de deux petites-filles et de deux petits-fils.

 

Le 26 mai, les routes conduisant à Sainte Foy virent des défilés d'amis venus rendre hommage à Monique et entourer les siens de toute leur compassion. Ce fut, donc, une cérémonie bien triste dans le petit cimetière communal. Pour marquer l'attachement de la  défunte à la nature qu'elle aimait, l'assistance la couvrit de fleurs de tilleul. La fleur de tilleul, depuis les lointaines heures de la culture celtique, s'apparente à un cœur. Elle symbolise  l'arbre, l'amour et la fidélité.

 

Pierre Fabre

 

 

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Demain, avec 3 jours de retard technique, "Terre de l'homme", grâce à Bernard Malhache et à Alain Eymet,  80 ans après la capitulation du Reich, reviendra sur le pèlerinage mémoriel du 27 mai. 


29/05/2025
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CHARLES-MAURICE TALLEYRAND-PÉRIGORD par Françoise Maraval (suite)

CHARLES-MAURICE TALLEYRAND-PÉRIGORD SOUS LA GRANDE RÉVOLUTION
 
 
La fête de la Fédération s’est déroulée au Champ-de-Mars. Charles-Maurice a été choisi pour y faire la messe. Elle était prévue à midi, elle commencera à quatre heures : il a fallu attendre que l’immense cortège des fédérés, parti de la Bastille, précédé de bataillons d’enfants et de vieillards, arrive au Champ.
L’estrade est bondée, des grenadiers font la haie au son des tambours, trois prêtres en aube blanche, l’écharpe tricolore à la ceinture, escortés d’une centaine d’enfants de chœur armés d’encensoirs encombrent un peu.
 
 
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La fête de la Fédération au Champ-de-Mars, le 14 juillet 1790
 
La messe est suivie du serment civique prêté par La Fayette et repris par les députés de l’Assemblée nationale, la municipalité de Paris, les fédérés et tous les spectateurs. Le roi et le dauphin prononcent le leur, ensuite. On chante le Te Deum.
 
Le lendemain, Charles-Maurice écrira à son amie Adélaïde de Flahaut. Les serments prêtés à l’occasion de cette »bouffonnerie du Champ-de-Mars « n’ont, à ses yeux, aucune valeur.
« Après tous ces serments que nous avons faits et rompus, après avoir tant de fois juré fidélité à la Constitution, à la loi et au roi, toutes choses qui n’existent que de nom, qu’est-ce qu’un nouveau serment signifie ? »
Les serments sont autant de fictions politiques dont on use par commodité , selon les circonstances.
Le 13 janvier 1791, présentant son élection prochaine, au conseil du département de la Seine, il donne sa démission de l’évêché d’Autun. L’obligation de résidence faite par la nouvelle Constitution ne lui permet pas de concilier ses anciennes fonctions épiscopales avec celles d’administrateur de la Seine. Il n’en informe pas le Saint-Siège.
Vu de Rome, et du point de vue canonique, Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord
demeure l’évêque d’Autun. Son clergé ne le pleure pas. Par contre, la municipalité d’Autun le voit partir avec regret ; car, à défaut d’avoir été un bon évêque, il n’a cessé de s’intéresser au bien-être de ses fidèles. Faute de soigner les âmes, il s’est occupé de leur pain quotidien.
Dans l’immédiat, les exigences de la constitution civile du clergé et le refus de la
plupart des évêques, de prêter serment, lui font reprendre du service, sans doute bien à contrecœur. L’opposition d’une très forte majorité du haut clergé à une constitution civile qui retire des mains du roi, la nomination des évêques désormais élus, et des mains du pape, l’investiture canonique remise aux seuls évêques ayant prêté serment, crée une situation inextricable dont les députés de l’Assemblée nationale aimeraient bien se sortir.
En acceptant de consacrer, à la demande des autorités concernées, les premiers évêques constitutionnels nouvellement élus, Charles-Maurice se range du côté du plus fort , du côté de l’opinion publique révolutionnaire ; mais, il prend des risques en même temps, non pas avec sa conscience, mais avec les partisans de l’ancien clergé qui peuvent lui faire un mauvais sort.
Le 23 février 1792, alors qu’il vient de consacrer en l’église de l’Oratoire Saint-Honoré, les nouveaux évêques du Finistère et de l’Aisne, il disparaît sans laisser de trace.
Pour la première fois, Charles-Maurice a peur !
En rentrant chez elle, son amie, Madame de Flahaut, trouve dans une enveloppe blanche, le testament de son évêque. Elle a cru qu’il était résolu de se suicider.
En avouant dans ses Mémoires, avoir consacré deux évêques, Charles-Maurice commet un mensonge par omission. Il ne dit pas qu’en un mois, alors qu’il n’est plus évêque, qu’il procéda à la confirmation canonique de quatorze autres évêques et d’un archevêque, Gobel, à Paris. En cela, il est « le père » de la nouvelle Église constitutionnelle et le seul à avoir pris ce risque. Tous les autres s’y sont refusés, à commencer par son oncle, l’archevêque de Reims.
Les foudres pontificales ne vont pas tarder à arriver. Dans un premier bref, dans lequel le pape traite la constitution civile du clergé d’un assemblage d’hérésie, qui date du 21 mars 1792 et arrivera à destination, le 26.
Après le 31 mars 1792, il ne consacrera plus de nouveaux évêques. Ce qui n’empêche pas le pape de le poursuivre de plus belle. Dans un second bref, daté du 13 avril, « Charles, évêque d’Autun », est accusé de « parjure »et de « sacrilège » et déclaré « suspens de tout exercice de l’ordre épiscopal ». S’il ne se rétracte pas, le pape lui promet encore l’anathème et, sanction suprême, l’excommunication.
Poursuivi par Rome, Charles-Maurice doit aussi se défendre à Paris contre ceux qui
l’accusent d’affairisme. Et oui ! La Révolution est une »affaire d’argent » ; ses revenus ecclésiastiques se sont évanouis. Faute d’indemnités, sa place de député à l‘Assemblée nationale ne lui rapporte rien, au moins officiellement, et ce ne sont pas les 4 000 livres de son siège au conseil de la Seine qui le font vivre.
C’est pourquoi Charles-Maurice cherche à faire des affaires ; mais, en plus, il a la passion du jeu. Discrète sous la monarchie, elle devient publique, comme tout le reste sous la Révolution. Les journaux prêtent à Charles-Maurice, des gains énormes et le plus souvent fantaisistes, jusqu’à 500 000 livres en une soirée.
On raconte que le soir de la Fête de la Fédération, il aurait fait sauter deux banques de jeu et il écrit :
« Je reviens... de chez Madame de Laval lui montrer l’or et les billets. J’en étais couvert ; mon chapeau, entre autres, en était plein.....Remarquez, c’était le 14 juillet ». Il était encore évêque et venait de célébrer la messe en public.
 
À l’Assemblée nationale, on se préoccupe de moralité. Bailly, le maire de Paris, s’indigne. Un certain abbé Mulot tonne à la tribune contre « les 3 000 maisons de jeu qui se sont ouvertes, successivement, dans la capitale. Le 21 juillet 1791, les députés votent contre ce fléau public, une belle loi qui ne servira à rien. Charles-Maurice n’est pas le seul coupable.
Mirabeau, Le Chapelier que l’on nomme « Chapelier-Biribi » à cause de son goût pour ce jeu, sont des habitués des tables parisiennes. On voit l’ancien évêque d’Autun au Club des échecs, au pavillon de Hanovre sur les boulevards, à la Chancellerie d’Orléans, tenue par le vicomte de Lambertye, rue d’Artois, aux cercles du Palais-Royal. On l’entraperçoit, surtout, dans la pénombre des salons de ses amis et amies où l’on joue furieusement, ceux d’Adélaïde de Flahaut, de la comtesse de Montesson, et de la vicomtesse de Laval. Là, Charles-Maurice joue surtout au whist, qu’il affectionne particulièrement. En 1791, Morris note dans son journal « Sa passion pour le jeu est devenue extrême ». Et puis, le whist est éminemment aristocratique. C’est le jeu de la cour.
Dans ce milieu, il y rencontre très souvent son ami de toujours : Mirabeau. Il y a bien longtemps, ils étaient voisins, rue de Bellefeuille et ils ont appris à s’apprécier. L’orateur de l’Assemblée nationale a, lui aussi, d’importants besoins d’argent : d’abord, il faut qu’il paye ses écrivains, ses faiseurs de discours, et qu’il les paye bien ; mais, aussi, Mirabeau aime faire bombance et, en grand seigneur, il invite, il invite et il invite. Il lui faut beaucoup de monde autour de lui. L’argent est pour lui la préoccupation de chaque instant.
Talleyrand-Périgord est fasciné par le parcours de son ami Mirabeau.
Débauché et libertin, Honoré Gabriel Riquetti, comte de Mirabeau, multiplie les frasques.
Il s’échappe de l’armée, ce qui lui vaut une première incarcération à l’île de Ré. Il va se battre en Corse puis épouse une riche héritière dont il ne tarde pas à se séparer ; son père le fait interner à Manosque, puis au château d’If et, enfin, à Pontarlier. Le régime de semi-liberté et la fréquentation des salons l’amènent à séduire une jeune femme mariée. Il s’enfuit avec elle à l’étranger.
Condamné par contumace à la peine de mort pour rapt et adultère, il doit rentrer. Son amante, qu’il appelle Sophie, est expédiée au couvent. Lui entre au fort de Vincennes, le 7 juin 1777. Là, pendant ses 42 mois de détention, il écrit les fameuses « Lettres à Sophie » ainsi qu’un « Essai sur les lettres de cachet et les prisons d’État ». Il a l’occasion, aussi, d’en venir aux mains avec un autre libertin graphomane, incarcéré comme lui, le Marquis de Sade.
À sa sortie, ruiné, il doit vivre de sa plume en publiant des libelles. Voyageant à l’étranger, il a l’occasion de rencontrer le roi de Prusse, Frédéric II le Grand. En 1786, pour se débarrasser de ce querelleur permanent, Talleyrand avait manœuvré auprès du roi pour l’envoyer à Berlin, en observateur secret. Mais, il n’a jamais pu y obtenir une charge officielle.
 
 
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Honoré Mirabeau par Joseph Boze
Château de Versailles
 
Rebelle permanent, Mirabeau rejeté par la noblesse, se fait élire député du tiers état de la sénéchaussée d’Aix-en-Provence, en 1789, quand le roi convoque les états généraux. Pour cela, il utilise un subterfuge : il ouvre un commerce de draps dans la belle ville d’Aix. Sa fougue et sa détermination, lors de la célèbre séance du jeu de Paume, assoient définitivement sa réputation d’orateur et de révolutionnaire.
Il fait voter le principe de l’inviolabilité des députés.
Mirabeau suit un dessein précis : introduire en France, une forme de démocratie conforme aux principes de Montesquieu tout en respectant, comme en Angleterre, les prérogatives de la monarchie.
Mirabeau meurt prématurément à l’âge de 42 ans. Amis, cohabitant à l’Assemblée
nationale, fréquentant les mêmes cercles de jeu, quelle ne fut pas la stupeur de Charles-Maurice quand Mirabeau, sur son lit de mort, le fait appeler. On a d’abord pensé à un empoisonnement mais l’autopsie révèle que les lésions constatées ne sont pas celles d’un empoisonnement. Cet homme d’une constitution athlétique était un grand nerveux. On aurait pu dire que « s’il avait les muscles d’un Hercule, il avait les nerfs d’une femme vaporeuse et délicate ».
Depuis longtemps, en proie à de très violentes douleurs, il souffrait de coliques néphrétiques et aurait eu une éclipse cérébrale, deux ans avant. Le lendemain d’excès génitaux, il fut pris de douleurs atroces qui, abdominales, devinrent rétrosternales. Ces douleurs de type étau étaient accompagnées d’angoisse, de dyspnée, de frissons, d’un pouls imprenable. Elles évoluaient par crises de quelques heures, la nuit et s’amendaient au cours de la journée. La mort intervint le jour 6 au bout de 5 crises.
L’autopsie faite dans les jardins, dès le lendemain de sa mort, montre l’existence d’un épanchement péricardique d’une odeur infecte, dont une partie s’était coagulée, formant une épaisse membrane qui tapissait tout le péricarde et s’étendait sur la naissance des gros vaisseaux.
L’immense popularité de Mirabeau explique la vive émotion soulevée par sa mort. S’illusionnant sur son honnêteté, l’Assemblée lui fit l’honneur d’être inhumé en l’église Sainte-Geneviève, transformée pour l’occasion, en Panthéon des gloires nationales.
Il en sera exclu l’année suivante, après la chute de la monarchie, quand l’ouverture d’une « armoire de fer » découverte lors du sac du palais des Tuileries, le 10 août 1792, aura révélé sa correspondance avec le roi et les preuves de sa duplicité.
 
 
Fichier:Le squelette de Mirabeau sortant de l'armoire de fer.jpg
 
Caricature de Mirabeau sortant de l’armoire de fer
 
 
Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord est inquiet pour son avenir...
 
 
Françoise Maraval
 
 
 
 

26/05/2025
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L'usage du monde

 

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SARLAT

 

 

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Le groupe - Cinéma et conférences - du "Collectif Transitions Périgord Noir"vous invite le mardi 27 MAI 2025 à 20h00 au cinéma Rex de Sarlatpour la projection du film "l'USAGE DU MONDE, voyage entre nature et culture",écrit et réalisé par Agnès FOUILLEUX

https://www.lesfilms.info/

Synopsis :

À travers l’histoire et la préhistoire, depuis les peintures rupestres de la grotte Chauvet jusqu’aux débris laissés dans l’espace par les satellites d’Elon Musk, le film nous invite à une réflexion sur les sociétés humaines et les traces qu’elles laissent de leur passagesur terre.Et si ce lien à la terre, à l’eau et aux autres espèces, était de même nature que celui qui nous relie aux autres ?Si seul un nouveau récit pouvait faire basculer l’histoire ? Réinventer notre rapport au vivant, à l’agriculture et à la démocratie pourrait être les premiers mots jetés là en préambule pour écrire cette nouvelle histoire.

 

Ce film sera présenté par Camille DUPUY, médiateur culturel du cinéma Rex de Sarlat 

NB : Exceptionnellement ce film sera projeté à 20H00, la séance étant suivie d'un échange avec KATIA KANAS, animatrice du café philo du BUGUE.

Entrée : 6€

 

Contribution Isabelle Petitfils


24/05/2025
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