Terre de l'homme

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Mois d'avril 2021


Un émouvant adieu ouvert par la Cantate 147 de Bach.

PAYS de BELVÈS

 

 

Les Pintos, famille on ne peut plus populaire, enracinés en Périgord depuis la grande migration espagnole, sont venus, en passeurs de mémoire, depuis El Barraco, leur village de la province d'Ávila dans la communauté autonome de Castille-et-León.

 

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Photo © Édith Pintos-Malassagne

 

 

Jean-François Pintos naquit à Belvès, il y a 87 ans. Sa famille ne quitta jamais ce plateau belvésois où les générations successives se sont attelées à l'exploitation agricole du mitage du Petit Castang et Limoge* qui, aujourd'hui, est entre les mains de Didier, le fils de Jean-François. Tout le monde appelait affectueusement le défunt, Jeannot.

 

* L'écart belvésois de Limoge ne prend pas de s terminal,

 

Les références des Pintos étaient tout naturellement le passage mémorial de la République d'Espagne que les anciens tentèrent, hélas sans succès, avec la belle devise "no pasaran", de sauvegarder face aux hordes fascistes des monarchistes. Les Pintos, dans cet espace rural du sillon de la Nauze, c'était aussi, tout naturellement, l'esprit de la Résistance.

Jean eut la malchance d'être appelé pour ses servitudes militaires de l'autre côté de la Méditerranée, lors du dramatique épisode que les autorités ne voulaient point nommer la Guerre d'Algérie.

Parler des Pintos, dans ces reliefs du Pays de Belvès, c'est inévitablement revenir sur la vie musicale des adeptes de l'accordéon et du musette que Roger Pintos, l'oncle de Jeannot, fit vivre dans tout le Sud Ouest. Toutes les animations festives d'antan vibraient avec ce mode entraînant qui filait de village en village.

 

C'est vendredi 22 avril que la population belvésoise a rendu le dernier hommage à Jean. C'est aux notes de la Cantate 147 de Bach, judicieusement choisie pour son allégorie, elle porte tout son sens de "Que ma joie demeure", que s'ouvrit la cérémonie d'adieu.

 

https://www.youtube.com/watch?v=GWtoeYznx8E

 

Cet adieu a réuni, autour du cercle familial de son épouse, de ses enfants Didier et Marie-Jo, et de ses petits-enfants, une nombreuse assistance recueillie.

 

Pierre-Bernard Fabre


27/04/2022
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De belles gens. Suite n° 20. Saga de Françoise Maraval

 

DE BELLES GENS

 

Épisode 21

 

Marcel

 

Résumé de l'épisode précédent

 

Les deux amis, Clément Chartroule et Jean Maraval trouvent le temps, un après-midi, de parler de la guerre et de ses répercussions dans le village. La chute de l’empire des Romanov attise leur curiosité et leurs inquiétudes.

 

 

En ce début mai 1917, Emma vient de recevoir une lettre de l’hôpital de Limoges : son frère Marcel y a été transporté par convoi  sanitaire venant de Provins. Il a demandé d’en informer sa famille  car il ne peut pas écrire.

 

 

Gare de Limoges-Bénédictins (Limoges, 1929) | Structurae

 

La gare de Limoges-Bénédictins. Image © Structurae, opérateur Jacques Mossot

Chef-d’œuvre éclectique d'architecture régionaliste et symbole de la ville, inauguré en 1929, l'esthétique de celui-ci emprunte autant à un Art nouveau tardif, qu'à l'Art déco et au néo-classicisme. À à ce titre, il a fait l’objet d’une inscription au titre des monuments historiques depuis le 15 janvier 1975.

 

Limoges - LIMOGES. gare benedictins - Carte postale ancienne et vue d'Hier  et Aujourd'hui - Geneanet

 

                                                         

La jeune femme descend du train en gare de Limoges. Elle vient d’avoir trente ans et la couleur du deuil, qu’elle arbore depuis le décès de son beau-frère, André, en avril 1915, lui confère une grande dignité. Ses cheveux auburn ont pris une teinte un peu plus foncée et son allure générale affirme qu’elle est devenue femme. Elle soigne son apparence et la toilette qu’elle porte, témoigne de son habileté de couturière. En deux mots, elle est élégante.                                                                                                                                                    

                                                                                                                                                        

Arrivée à l’hôpital, elle s’informe à l’accueil. Pour parvenir au bureau, il a fallu qu’elle attende son tour car le hall est encombré de gens qui, comme elle, viennent voir un proche. Il faut laisser passer les brancardiers qui se croisent en se saluant. Marcel est au deuxième étage dans la grande salle commune. Là-haut, une femme de salle lui dit qu’il est au dernier lit sur la rangée de droite.

 

Tout de suite, il l’a reconnue et la regarde avancer. Emma n’en croit pas ses yeux, qu’a-t-on fait de son Marcel ? Il faut absolument qu’elle fasse bonne figure, il faut qu’elle lui sourit. Ce n’est plus le frère qu’elle avait l’habitude de voir, si beau, si droit. Il a perdu presque tous ses cheveux, il n’a plus de sourcils, lui qui les avait si épais, sa mouche retombe côté droit. Ses yeux félins sont devenus vitreux, exorbités et tristes. Il pleure doucement ; en la regardant, il semble dire «  je suis fini... ils m’ont eu ».

 

Pour donner le change, il demande des nouvelles de tout le monde. Il insiste : que devient le petit Jeantou ? Travaille-t-il bien à l’école ?                                                                                          

 Si Henri est d’accord, il faut vendre la forge. Marcel sait qu’il va avoir besoin de soins pour le restant de sa vie. Il ne veut pas être à la charge des siens. Il veut revenir à Saint-Cyprien si sa santé le permet.

Emma le rassure, il aura toujours sa place chez elle. Sa santé va s’améliorer ; le chemin sera sûrement long, mais oui, sa santé va s’améliorer ! Elle n’en croit pas un mot tant le spectacle est désolant.

Une infirmière leur propose de les installer sur la terrasse. Marcel a peur d’avoir froid, il grelotte. On l’enveloppe dans une couverture. Il veut parler d’Alice : il essaie mais des flots de larmes l’empêchent de s’exprimer. Cette chère Alice, il voudrait la serrer contre son cœur.

Sans en parler à Marcel, Emma se dit qu’elle ne peut pas quitter l’hôpital sans aller voir le médecin qui le suit. Elle a compris beaucoup de choses mais elle veut entendre le spécialiste. Elle prétexte quelques achats pour habiller le jeune Jeantou et prend congé. Elle va revenir bientôt. Marcel la raccompagne jusqu’à la porte de la salle commune. Il marche lentement, le dos courbé, son bras droit se balance dans le vide : il est mort. Il traîne aussi la jambe droite. Elle va revenir, elle va revenir…la séparation est douloureuse.

 

Dans le couloir, elle a identifié la porte des médecins mais il faut, avant, qu’elle prenne l’air et qu’elle reprenne ses esprits. Elle a besoin de vomir, elle ne trouve pas de toilettes et c’est dans la cour, derrière un arbre, qu’elle décharge toute sa bile.

De retour au deuxième étage, elle se présente devant la porte des médecins. La porte est ouverte, elle frappe. Le médecin n’a pas le temps de la recevoir. Elle insiste et, finalement, il cède. Marcel est en train de se paralyser le côté droit. Pourra-t-il rentrer dans sa famille ? Peut-être ! mais par petites approches. On peut envisager un essai de deux ou trois jours, dans un mois. Merci docteur ! Mille mercis. Elle sait tout ce qu’elle voulait savoir.

 

Dans le train du retour, elle pense à comment annoncer la mauvaise nouvelle à Alice et à Jean, son fils. Sa belle-sœur est sur le quai de la gare de Saint-Cyprien, comme prévu. Sur le long chemin qui conduit au village, Emma raconte tout de sa visite. Alice accepte la vérité avec courage. Quand Marcel reviendra au pays, c’est elle, Alice, qui s’occupera de lui. Oui, elle le soignera avec, bien sûr, l’aide du docteur Costes.

Avec le petit Jeantou, elle y met plus de rondeur, elle y va par étapes. Tonton Marcel est bien malade.

 

 

Sans en parler à Henri, Emma met tout de suite la forge en vente : elle sait qu’il ne s’y opposera pas, lui aussi aura besoin d’argent pour commencer une nouvelle vie quand la guerre sera terminée. Car, enfin, cette guerre va bien s’arrêter un jour ? Le prix est fixé avec le concours du notaire   qui

assurera la transaction et avec les remarques judicieuses de son grand-père, François Borde, et de son oncle Victor.

A  la surprise générale, un homme des Eyzies, Louis Rigal, se porte acquéreur. Emma regrette de ne pas avoir forcé le prix. Trop tard, la vente va se faire… Il a été convenu que le futur propriétaire reprendra les employés encore présents et ceux qui auront la chance de revenir du front en bonne santé. Les parts de Marcel et d’Henri seront réservées sur un compte de séquestre à l’étude du  village.

Maître Podevin a besoin de rencontrer Marcel au plus vite. Il faut que le blessé « signe », en sa présence, une décharge et une procuration en faveur de sa sœur. Pour cela, il décide de monter à Limoges en voiture et d’ emmener Emma avec lui. Pour Henri, il a préparé les mêmes papiers à envoyer en Allemagne, dès que l’on aura son adresse.

Depuis le départ de Marcel sur le front, les revenus de la forge mis de côté, seront, eux aussi, partagés, mais seulement entre Emma et Marcel. La  vente prochaine de la forge apaise Marcel ; il va pouvoir compter sur un bon capital pour venir au secours de son handicap.

                                                                                                                                                  

 Une autorisation de sortie de l’hôpital peut être envisagée au mois de juin.

 

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                                   Les blessés et le personnel de l’hôpital militaire de Limoges

                                                                                                                                                         

Arthur vient d’être transféré au 50ème RI. Pourquoi ? Il ne sait pas...On manque sans doute d’ hommes sur le front. Il y rencontre des Périgourdins, des Corréziens, des Charentais. Le 108ème RI de Bergerac n’est pas loin. Depuis le tout début de la guerre, il n’a pas eu le moindre entraînement. Avant août 14, il était réformé en raison de son asthme, il n’a pas fait de service militaire. Le 50ème RI stationne dans la Marne dans le secteur de Maisons-de-Champagne.

 

Finalement, il a droit à une série de manœuvres. Les tranchées sont boueuses et donc humides.

 

 

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La neige est tombée tout cet hiver et, en ces jours de mai 17, le vent est tellement fort qu’aucun ballon ne peut tenir l’air et qu’aucun avion ne peut voler. La bataille des monts de Champagne  s’est déroulée du 17 avril au 20 mai : c’est la 3ème bataille de Champagne. Les pertes atteignent sensiblement la moitié de l’effectif. Le 30 avril, le 50ème RI a été relevé tout entier et le 8 mai, il est installé dans la région de Tahure.

Les attaques de l’artillerie allemande se multiplient et nous n’avons rien pour riposter. Le 50ème RI sera relevé le 18 juin, pour une période de 3 semaines de repos à Chaumont-sur-Aire, repos pendant lequel le drapeau du régiment reçoit la croix de guerre des mains du général Gouraud, commandant la Vème armée. Pendant toute la période, Arthur se débat avec une crise d’asthme qui ne le quitte plus. Heureusement, il n’a aucune blessure.

 

Emma est moralement détruite. Elle ne veut pas le montrer mais ses soucis se portent sur le foie ; elle a une crise de foie permanente, pourtant elle s’intéresse toujours aux siens. A la foire, elle a trouvé des chemises en flanelle confortables et bien chaudes pour habiller Marcel, Henri et Arthur,  quand ils reviendront.

La première sortie de Marcel est programmée  et Emma va le chercher en train. Marraine Angélique les attend en gare de Saint-Cyprien, avec sa calèche, en compagnie du petit Jeantou que l’on a préparé aux retrouvailles avec son oncle. Marcel est heureux d’apercevoir son clocher. Il passera cette fin de première journée chez sa sœur, route du Bugue. Il ne faut pas qu’il se fatigue, il ne faut pas trop de visites. Le neveu a révisé ses récitations pour épater l’oncle qui rit de bon cœur.

                                                                                                                                                        

                                                                                                                                        

Emma a laissé sa chambre au soldat blessé, il va y passer une nuit confortable. Il faut qu’il se repose : cette première sortie a dû être éprouvante.

 

Tout allait très bien, Marcel était couché depuis plus d’une heure, quand Emma a entendu, venant de sa chambre, d’abord des petites plaintes puis de vraies lamentations. Marcel a l’air d’être en face de visions apocalyptiques et, maintenant, il pousse des cris d’une telle intensité que le voisinage est alerté. Marcel se bat contre des fantômes, il entend les bruits de la guerre : les obus sifflent dans sa tête.

Le voisin d’en face, Louis Janot, frappe à la porte, Jojo Castagner le rejoint, les Tabanou, les Faure, les Fournier sont aussi dehors. Pendant que Louis emmène le petit Jeantou chez ses grands-parents, rue de la mairie, Jojo va réveiller le docteur Costes. Marcel est en plein délire, poursuivi par des visions de guerre. Le médecin hésite : il faut le calmer mais il va devoir se heurter aux réticences du pharmacien qui ne veut pas délivrer la piqûre nécessaire sans une ordonnance de l’hôpital de Limoges. Finalement, il cède.

De retour, le docteur soulage le malheureux soldat qui entre très vite dans un profond sommeil. Alice est maintenant avec Emma et avec le médecin. Celui-ci décide qu’à la prochaine sortie de Marcel, c’est Alice qui administrera la piqûre, si besoin est. Il faut se recoucher et récupérer. Louis Janot s’offre pour ramener Marcel en voiture à l’hôpital de Limoges, le lendemain matin.

 

A l’heure du départ, Alice est là, elle parle dehors avec Janot, son patron, qui vient de sortir sa voiture. Marcel ne se souvient pas de ce qui s’est passé la nuit dernière. Il est désolé pour les autres et pour lui. Emma lui explique qu’il reviendra mais avec une ordonnance. Cette première sortie était nécessaire pour que les prochaines soient réussies. A travers les rideaux de la fenêtre de la cuisine, il aperçoit Alice, grande et forte, alors que lui est devenu petit et misérable.

Dès que Marcel a ouvert la porte d’entrée, son regard  cherche celui d’Alice et ce qu’il espère, se produit. Alice vole vers lui et l’enveloppe de ses grands bras. Ils restent soudés l’un à l’autre, un long moment. Elle lui glisse dans le creux de l’oreille :

« Ne t’inquiète pas ! Je serai là ».

Alors Marcel trouve la force de se redresser et de sa main gauche, il ramène le visage d’Alice vers le sien et le couvre de baisers. Les témoins sont nombreux, le spectacle les rend muets mais l’expression de leur visage traduit une intense émotion. Notre ancien soldat s’installe dans la voiture,

le sourire aux lèvres. Il va revenir et Alice, grâce à son amour, va lui communiquer toute sa force.

 

 

Françoise Maraval

 

 

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26/04/2022
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De belles gens. Suite n° 19. Saga de Françoise Maraval

 

 

DE BELLES GENS

 

                Épisode 19                     

 

 

1917. Henri prisonnier

 

                         

                         

 

 

Pendant ce temps, la guerre continue. Pourtant, le 30 janvier, le nouvel empereur d’Autriche-Hongrie, Charles 1er, petit-neveu de l’empereur François-Joseph 1er, tente un rapprochement avec la France en vue de l’ouverture de négociations pour une paix séparée. Le 13 février, par l’intermédiaire du comte Erdödy, Charles 1er annonce au prince Sixte de Bourbon-Parme qu’il accepte que l’Alsace-Lorraine soit restituée à la France, la Belgique restaurée dans son intégrité territoriale et que Constantinople soit donnée à la Russie mais il refuse toute reconnaissance de la Serbie.

 

 

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Charles 1er de Habsbourg-Lorraine (1887-1922),

dernier empereur d’Autriche et roi de Hongrie

 

                                                                                                                                                                                                                            

Le 1er février, l’Allemagne décrète la guerre sous-marine sans restriction. Les sous-marins allemands torpillent le paquebot britannique « le California », le 7 février et le 8, le paquebot français « Athos ». Désormais, de nombreux bateaux seront coulés.

 

Le 17 février, sur le front de l’ouest, les forces britanniques passent à l’offensive sur les rives de l’Ancre dans la Somme. Le 24, l’armée allemande bat en retraite et évacue sans combat ses positions fortifiées sur l’Ancre.

                                                                                                                                                        

En Russie, de février à mars, les grèves se multiplient. Le 16 mars, le tsar Nicolas II abdique au profit de son frère le grand-duc Michel mais celui-ci renonce au trône le 17, devant l’opposition des dirigeants du mouvement libéral et du gouvernement provisoire.

 

En France, le gouvernement d’Aristide Briand démissionne le 17 mars. Alex Ribot forme le nouveau ministère et la chambre lui accorde sa confiance, le 21.

Il faut noter l’arrivée de restrictions. Le 11 mars, le rationnement du sucre est annoncé : il est distribué contre des coupons.

 

Le 3 avril, l’empereur d’Autriche-Hongrie, Charles Ier, rencontre Guillaume II à Hombourg en Alsace et lui propose la Pologne, en échange de la restitution à la France de l’Alsace-Lorraine. La proposition est rejetée.

Le 13, Charles Ier tente, une nouvelle fois, de convaincre Guillaume II de la gravité de la situation militaire. L’empereur d’Allemagne lui répond  que la guerre sous-marine sans restriction et l’effondrement du tsarisme ouvrent, au contraire, la voie vers la victoire. Pourtant, en Allemagne, 300 000 ouvriers se mettent en grève. Les autorités militaires réagissent, en réquisitionnant le personnel des entreprises en grève et en ordonnant l’arrestation des dirigeants syndicaux.

 

A Saint-Cyprien, Emma est très inquiète ; depuis plus d’un mois, elle n’a pas de nouvelles de ses frères, Henri et Marcel. Enfin, une lettre arrive de Provins (Seine-et-Marne), lettre dont elle ne connaît pas l’écriture. Elle concerne Marcel. Il est à l’hôpital mixte de Provins depuis le 27 février. Il souffre d’ impacts d’éclats d’obus éparpillés dans tout le corps et son avant-bras droit présente une plaie par balle, avec atteinte de l’artère radiale. Il sera évacué plus tard vers Limoges, l’hôpital de sa région d’origine. Le colis qu’Emma souhaite envoyer depuis quelques semaines, va  être revu et acheminé vers l’hôpital à Provins.

Une autre nouvelle arrive presque en même temps ; c’est une lettre d’Henri.

 

Les journaux parlent peu du sort de nos prisonniers.

 

Le chapitre II de la convention de la Haye signée en 1907, est entièrement consacré aux prisonniers de guerre. Il stipule qu’ils doivent être traités avec humanité. Tout ce qui leur appartient, excepté les armes, les chevaux et les papiers militaires, reste leur propriété. Les vingt articles composant le chapitre II de la convention réglementent divers aspects de la vie en captivité comme le logement, le travail, la religion, l’alimentation, l’habillage ou encore le courrier.

Quarante-quatre pays sont signataires de la convention. Les stipulations de la Haye entrent en application dans l’Empire allemand et en France, le 26 janvier 1910 mais elles sont inadaptées face à l’ampleur de la Première Guerre mondiale. En octobre 1918, le nombre de prisonniers retenus en Allemagne s’élève à 2 415 043, tous pays confondus.

 

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                                                                                                                                                                                                       Dülmen le 5 avril 1917

                                                           ma chère sœur,

 

J’ai tardé à vous donner de mes nouvelles. Je te rassure tout de suite, je vais bien. Mon épaule s’est consolidée, le résultat n’est pas beau à voir mais je peux me servir de mon bras. Je n’ai pas une grande ampleur de mouvements : le résultat aurait pu être pire. J’ai fait mon deuil de l’œil gauche qui n’est pas complètement mort puisque je vois des ombres. Si je suis toujours en vie à la fin de la guerre, je le ferai examiner à Paris.

Mon matricule de prisonnier est « P 46662 ». Je suis actuellement dans un centre de triage à Dülmen près de la frontière avec les Pays-Bas. Je viens de passer une visite médicale, en fonction de laquelle je serai redirigé vers un autre camp de prisonniers. Dans ma lettre prochaine, je te donnerai ma nouvelle adresse. Ici, nous sommes tous à nous poser les mêmes questions.

                                                                                                                                                        

Je mesure à quel point j’étais bien à l’hôpital d’Aix-la-Chapelle. Ici, l’hygiène laisse à désirer : nous dormons sur des paillasses douteuses et puantes avec deux couvertures également douteuses et la nourriture est une soupe de pommes de terre très clairsemées, servie trois fois par jour et accompagnée d’un café de glands torréfiés.

Une humidité malsaine nous enveloppe. J’entends tousser de tous côtés.  De notre baraquement en bois, j’aperçois au premier plan le cimetière des prisonniers sans cesse alimenté par de nouveaux décès. Le camp est entouré de plusieurs rangées de barbelés et après, c’est la lande marécageuse à perte de vue.

Emma, quand je te donnerai une adresse plus sûre, pourrais-tu m’envoyer mon livre de poésies du XIXème siècle, mes carnets à dessins ou du moins un, mes fusains et mes gommes. Tu les trouveras dans une petite malle stockée dans le grenier de la forge.

 

Il me tarde de pouvoir te lire. Je vous espère tous en bonne santé.

 

Ton frère qui t’aime et qui t’embrasse.  Henri Destal

                                                                                                                                                         

 Au cours du repas dominical, chacun exprime ses inquiétudes. Emma donne des nouvelles d’Arthur et de ses frères, Marcel et Henri. Arthur transporte toujours des blessés, tantôt en camion sanitaire, tantôt en ambulance, suivant l’importance des blessures. L’hôpital de Limoges est débordé et il manque de personnel, des chirurgiens aux "femmes de salle". Ce prochain samedi, elle ira à Limoges et elle emmènera Jeantou. Elle fera des achats en mercerie et chez les marchands de tissus pour habiller le fils qui ne cesse de grandir.

La lettre d’Henri est lue. Tout le monde comprend qu’il a eu de la chance, dans son malheur, de rester aussi longtemps à l’hôpital d’Aix-la-Chapelle. Les journaux disent que la vie dans les camps de prisonniers s’est améliorée, depuis que la Croix Rouge y a un droit de regard.

En ce qui concerne Marcel, il n’y a pas de nouvelles récentes. Arthur va surveiller pendant ses passages à Limoges et a demandé d’être prévenu dès l’arrivée de son beau-frère. Maintenant, il connaît beaucoup de monde à l’hôpital.

Alice éclate en sanglots et la compassion se manifeste autour de la table. Marraine Angélique est toujours la personne la plus à même de dispenser des phrases rassurantes.

Fonfon continue à alimenter ses « cahiers de guerre » avec ses découpes d’articles dans les différents journaux et ses propres réflexions. Le jeune homme va avoir 15 ans et il s’affirme de plus en plus, depuis qu’il est en apprentissage au garage Veyssière.

Le nouvel empereur d’Autriche-Hongrie l’intrigue avec ses tentatives de négociations, à droite et à gauche. Le patriarche rétorque que ce ne sont que des discussions de marchands de tapis.

            - De quel droit, certains veulent se répartir les pays d’Europe et d’Afrique. Au nom de la paix ? Foutaise.

 

En France, le 6 avril, le général Nivelle est parvenu, avec difficulté, à convaincre le haut état-major et le gouvernement de la nécessité d’abandonner le plan Joffre et de lancer une offensive générale sur le Chemin des Dames, entre les vallées de l’Aisne et de l’Ailette. Cette action devrait être précédée d’une attaque de fixation en Artois.

Ainsi, le 9 avril, les Britanniques lancent la 1ère offensive en Artois entre Arras et Lens, alors que le 16,  la Vème armée du général Mazel et la VIème armée du général Mangin lancent celle du Chemin des Dames.

Le 17 avril, c’est le début des premières mutineries dans l’armée française.

Au Chemin des Dames, devant la résistance des forces allemandes, l’attaque est suspendue. C’est l’échec du plan du général Nivelle malgré quelques avancées : Laffaux, le plateau de Craonne, et Berry-au-Lac.

 

Jean Maraval va chercher tous les jours, son journal « l’Humanité ». Il suit les informations de très près mais un pays l’intrigue, un de nos alliés dans la Triple Entente : la Russie.

 

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11/04/2022
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La tête dans les nuages.

 

Mélanie Pistolozzi

 

Photo  © Pierre Fabre

Qui est Mélanie Pistolozzi.

 

Mélanie, jeune professeur des écoles, en poste à l'École de Sagelat depuis un gros septennat, est saint-amandine de cœur. Depuis quelques années, son école accueille les élèves de cours moyen seconde année. 

Mélanie, dont les qualités pédagogiques sont unanimement reconnues, apporte à cette école, grâce à la motivation passionnée tant des enseignants que des intervenants, un merveilleux épanouissement. Mélanie démontre dans cette école rurale que dans ce site du savoir, on acquiert certes les bases scolaires élémentaires mais aussi que c'est un incontournable lieu d'éveil. Andrée Teilhaud qui, dans ces murs de l'avant-denier siècle, fut, ici, la pionnière d'un appréciable renouveau éducatif, ininterrompu depuis maintenant 65 ans, peut être légitimement fière de cette transmission éducative.

 

 

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Avoir la tête dans les nuages, c'est un peu mettre ses pensées dans la ouate. Jacques Caron

 

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Photo © Mélanie Pistolozzi

 

 

Les élèves de l'école de Sagelat ont observé, jeudi 20 mai,  un phénomène météorologique qu'ils n'avaient encore jamais vu. Après des recherches, ils ont trouvé que c'était un nuage iridescent ou irisé (diffraction de la lumière dans des cristaux de glace).

Terre de l'Homme les remercie ainsi que leur enseignante Mélanie Pistolozzi de nous faire partager ce phénomène étonnant et rare et pour leurs superbes photos.

 

 

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Magnifique

Photo © Mélanie Pistolozzi

 

 

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Superbe

Photo © Mélanie Pistolozzi

 

 

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On se plaît à s'émerveiller

Photo © Mélanie Pistolozzi

 

 

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Photo © Mélanie Pistolozzi

 

 

Une vraie leçon de s.v.t. in situ et sans oublier les masques.

Bravo à l'école de Sagelat.

N'hésitez pas à nous envoyer d'autres contributions pour Terre de l'Homme.

 

Contribution plurielle.

 

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Articles dont la publication est imminente.

L'ordre séquentiel peut être évolutif

 

 

Pensons, le 27 mai, à commémorer l'anniversaire de la fondation du Conseil national de la Résistance,  A.N.A.C.R.

Suite et fin de notre excursion lacustre, par Jacques Lannaud.

Petit coup d'œil patrimonial sur le grand livre de l'oubli. La radiale Magnac-sur-Touvre / Marmande traversait l'ouest du Périgord.

Et si on parlait de nos animaux de compagnie, par Suzette Merlhiot.

La devanture évolutive de Martine et de Jean-Christian est une petite œuvre d'art, par Bruno Marty.

 


23/05/2021
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La fontaine de la Fée

Huguette Labrousse

 

 

Depuis son premier article, le lectorat de "Terre de l'homme" se plaisait de croire qu'Huguette Simon-Labrousse n'allait pas en rester là. Cela aurait été dommage tant la qualité de sa plume nous a émerveillés. Il y a un mois, son billet sur les feuillardières de Saint Léon a conquis ses lecteurs et fut naturellent promu "article phare du mois".

Tout en saluant le retour d'Huguette, émettons ensemble l'ardent voeu qu'elle poursuive ses regards sur le monde imparfaitement connu de la Forêt barade.

Notre amie Huguette, aujourd'hui, se lance à corps perdu dans un domaine qui, semble-t-il, fascine celles et ceux qui la lisent. Sa source, dans les collines de Savignac-de-Miremont, va, certainement, amener là bas des découvreurs de ces joyaux aquifères qu'il faut absolument aimer, protéger et sauvegarder.

 

Pierre Fabre

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                                                   La fontaine de la fée.

Photo © Huguette Simon-Labrousse

 

 

Il était une fois un petit village du Périgord noir. Vous ne le connaissez sans doute pas. Il est pourtant situé près des hauts lieux touristiques, mais il est perdu au milieu des collines.

Il s’appelle Savignac-de-Miremont car, au Moyen-Age, il dépendait de cette châtellenie.

On peut y visiter une très belle église romane et l’abri préhistorique de La Ferrassie .

L’abbé Brugière nous indique qu’avant la Révolution, les habitants des villages voisins y venaient le 12 août  en pèlerinage pour se recueillir devant les reliques de Sainte-Claire d’Assise.

Pour ceux qui aiment l’aventure, je vais vous dévoiler un autre pèlerinage qui vous enchantera.

Vous stationnez  votre voiture dans le bourg, près de la mairie ( XXIème siècle) ou de l’église ( XIème siècle ), vous enfilez de bonnes chaussures de marche et vous suivez la route qui descend vers le vallon : elle longe le ruisseau de Savignac qui se jette dans le Manaurie au Moulin de Soufron. Arrivés au viaduc SNCF,  vous empruntez la petite route qui se faufile entre le moulin et le restaurant.

 

 

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                                                      Orchidée

Photo © Huguette Simon-Labrousse

 

 

 

Prenez une grande respiration : la côte est raide !

Au sommet, vous êtes à la Croix de Tiradouyre sur le coteau de Puyvendran nommé « la montagne de Vénus » par Paul Foenecker dans son livre « Sites mystérieux et légendes de nos provinces. »

 

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                                                              Orchidées

Photos © Huguette Simon-Labrousse

 

 

À droite, après une centaine de mètres, un sentier vous invite à entrer dans le bois.

En cheminant, vous admirerez toute la flore sauvage de nos coteaux calcaires, en particulier au  printemps,  les nombreuses variétés d’orchidées. En hiver, vous respirerez le parfum  de la truffe.  

 

 

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                                                             Le vieux lavoir

Photo © Huguette Simon-Labrousse

 

 

Enfin, à quelques pas d’un ancien lavoir, vous apercevrez à votre droite un rocher, enguirlandé de lierre, d’où jaillit une eau cristalline qui va rejoindre le Manaurie, affluent de la Vézère.

 

 

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Photo © Huguette Simon-Labrousse

 

 

Cette fontaine intarissable est  la Fontaine de la Fée.

 

On raconte dans le pays, depuis des générations, que la gardienne de la source est une fée fileuse d’une merveilleuse beauté. Les nuits de pleine lune, elle file, près de la fontaine, totalement nue, ses longs cheveux étincelant sous les rayons de l’astre.

Maintenant que vous connaissez le chemin, je suis sûre que certains d’entre vous brûlent de la voir mais il vous faut, hélas, attendre la prochaine pleine lune.

 

Nous y sommes allés mais nous ne l’avons pas rencontrée. Je vous souhaite d’avoir plus de  chance et de la découvrir.

 

 

Huguette Simon-Labrousse

 

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Publications imminentes :

 

   - C'étaient des copains, c'étaient des amis, ils avaient le même âge...  mais ils ne sont plus !

 

   - Jean-Matthieu Clôt a publié -il s'est auto-publié- son dernier ouvrage.

 

   - Les nuciculteurs croisent les doigts.


29/04/2021
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