Terre de l'homme

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De belles gens. Suite n° 30. Saga de Françoise Maraval

 

DE BELLES GENS

 

 

Épisode 30

 

 

 

L’enfant de Marcel et d’Alice,

 

 

 

 

 

Résumé de l’épisode précédent :

 

Marcel a passé le mois d’août à Saint-Cyprien et a pu ainsi revoir son frère Henri  pour le 15 août. Ce dernier attend sa démobilisation alors qu’il est toujours en casernement au 50ème RI de Périgueux. Arthur, lui, est démobilisé depuis le mois d’avril.

Dans le haut de la ville, Yvonne enceinte attend la démobilisation de son mari pour la fin août. La maison Lamaurelle est remplie des rires et de la joie des enfants.

 

_____________________

 

Ce matin, Alice a la nausée, elle pense ne pas avoir digéré l’omelette aux cèpes de la veille. En effet, les cèpes se trouvent ; il a plu et il a fait suffisamment chaud pour que la moisissure se développe. Arthur est allé directement les cueillir car, depuis toujours, il connaît leurs endroits favoris. Maria et Emma vont pouvoir faire des conserves.

Alice a vomi plusieurs fois dans la journée et ne comprend pas ce qui lui arrive. Arrivée rue de la mairie, Maria lui ouvre les yeux :

 

- « tu dois être enceinte, ma fille. »

 

Alice n’ose pas y croire !!! cela serait merveilleux… un enfant de Marcel. Depuis le retour de son bien-aimé, elle espérait ce moment de tout son cœur car elle sait que c’était encore possible. Sagement, elle décide de ne pas répandre la nouvelle, tout de suite. Pas de fausse émotion pour Marcel. Elle attend quelques jours avant de consulter le docteur Costes qui confirme l’ arrivée d’un enfant pour la fin mai ou le début juin.

Le patriarche est secoué par la nouvelle. Il sait que la santé de Marcel ne va pas l’emmener bien loin.  « Alice est solide  et nous sommes là , la famille sera là ». A 65 ans, il se sent encore en forme et Maria, son épouse plus jeune que lui de 9 ans, sera d’une aide précieuse pour leur fille. Quant aux frères, Arthur et Fonfon, on pourra compter sur eux. Donc, pas de soucis…

 

                                                                                                                                                         

Alice a soigné sa toilette pour annoncer à Marcel qu’il va être papa. Il est troublé et reste sans voix pendant un bon moment. Lui aussi espérait, il savait qu’un enfant serait un merveilleux cadeau pour

Alice et, maintenant que c’est arrivé, il ne sait que dire. Alice annonce que l’enfant s’appellera Marcel si c’est un garçon et Marcelle si c’est une fille.

 

Marcel est convoqué à la commission de réforme de Périgueux pour le 2 octobre ; il est réformé n°1 et une pension permanente de 80 % lui est attribuée. Déjà bien informé par l’hôpital de Limoges, les médecins de la commission lui confirment qu’il s’achemine vers une paralysie totale. Il avait beau le savoir, il encaisse difficilement le coup. Il voudrait voir son enfant grandir ! Quelle injustice…

 

Arthur et Emma ont compris le rôle qu’ils auront à jouer à la naissance de l’enfant de Marcel. Cet enfant aura beau être pupille de le nation, il faudra l’entourer et faire de son mieux pour combler l’absence du père.

Arthur a fait quelques allers-retours en direction de Cahors. L’entreprise Lajuniras a dû restituer à l’armée, les camions envoyés par l’État pour l’effort de guerre. Les camions de l’armée sont regroupés dans cette ville du Lot, en attendant  une vente aux enchères prochaine. Arthur a pris le maximum de renseignements et se décide à révéler à Emma, un projet qui obsède son esprit depuis plusieurs mois.

 

« Les usines de chaux et de ciments de Saint-Cyprien tournent au ralenti depuis le début de la guerre, faute de bras ; la reprise est sur le point de s’amorcer, c’est le bon moment pour entrer en scène. Je pense à l’usine de chaux des Tuilières. Jusqu’à maintenant, les sacs de chaux sont acheminés par gabarres jusqu’au port du Buisson et ensuite par route, pour être déposés en gare de ce village. Il faut les manipuler deux fois. Je vais aller voir le propriétaire de l’usine, monsieur Louis Bouteil, et je lui exposerai mon projet. Les sacs seront acheminés par camion directement de l’usine à la gare de marchandises du Buisson. Une seule manipulation, donc une diminution des coûts de transport. Si le propriétaire de l’usine est séduit par la proposition, il faudra négocier …

Mais « il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir chassé. » Je n’ai pas rencontré Bouteil et je n’ai pas de camion. »

 

Emma trouve que le projet tient la route. Il faut, au plus vite, rencontrer le propriétaire de l’usine. Pour ce qui est du camion, Emma demande à Arthur quel est le prix d’un tel engin. La vente aux enchères devrait permettre d’en acheter un, en bon état, à un prix intéressant. Avec la vente de la forge et leurs économies, ils ont un bon petit capital. Emma en dévoile le montant à son mari qui, jusque-là, se désintéressait de la comptabilité du ménage.

Emma est fière de l’initiative de son mari, il a raison de vouloir tourner la page, il faut foncer vers le nouveau monde dont on a pris conscience pendant la grande guerre.

L’entrevue avec monsieur Bouteil est couronnée de succès : les deux signataires du prochain contrat

sont euphoriques. Arthur va pouvoir réaliser son rêve en faisant une bonne affaire et le propriétaire de l’usine s’imagine déjà avec moins de contraintes et il  a confiance en Maraval.

 

Arthur est prévenu du jour de la vente aux enchères. Louis Janot, un habitué de ce genre de transaction, lui propose de l’accompagner. Sur un immense terre-plein, les camions sont en stationnement, ils ont été révisés et sont en bon état de marche. Arthur vise haut : il veut un camion d’un  tonnage important : un Berliet. Il en a remarqué plusieurs. Il a son chéquier en poche. La vente est bruyante  et les acheteurs nombreux. Janot est là pour le conseiller et le rassurer. Ancien combattant, il a droit à une importante ristourne.

C’est fait : il a son camion, le camion dont il rêvait. Il a fallu attendre le lendemain pour repartir avec les papiers réglementaires et c’est, triomphant, qu’il est arrivé dans Saint-Cyprien.

 

                                                                                                                                                    

 Il a parcouru la rue Léon Gambetta avec prudence car encombrée de piétons et d’obstacles. Le bruit du camion a incité les commerçants et leurs clients à sortir pour voir ce qui se passe. L’étonnement pouvait se lire dans les yeux : on a reconnu Arthur Maraval et des questions se sont tout de suite posées.

Le véhicule est resté stationné place de la mairie, toute la nuit. Des badauds ont fait le tour du camion, plusieurs fois. Ils ont voulu voir la cabine du chauffeur, les roues ont été inspectées, on a posé beaucoup de questions. Le camion d’Arthur Maraval ! le premier camion de Saint-Cyprien.

 

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RD 703 St Cyprien

 

La R.D 703

                                                                                                                                                        

Le lendemain, Arthur a pris la direction des Tuilières et l’engin y a trouvé sa place dans la cour. Au bureau central, un contrat a été signé après 2 ou 3 mises au point. Le chauffeur peut commencer dès demain. L’usine fonctionne en « trois/huit » : Arthur se glisse dans le deuxième créneau (8 heures / 16 heures).

Pour la prise de service, il arrive à vélo au milieu des ouvriers car l’usine est à deux petits kilomètres du village.

 

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Quand il arrive, le matin, son camion est déjà chargé par l’équipe de nuit, il ne lui reste plus qu’à récupérer le bon de transport pour l’enregistrement des sacs, en gare du Buisson. Il est payé au nombre de trajets effectués et même s' il déborde de ses horaires, il n’est pas regardant.

Il prend son repas de midi soit à la cantine de l’usine, soit au buffet de la gare du Buisson.

 

La famille Maraval, dans son ensemble, est fière d’Arthur. Jeantou junior regrette, de plus en plus, ses imprudences. Il ne pourra jamais conduire…Emma regarde son mari avec tendresse et orgueil et Arthur y voit un encouragement. Les nuits deviennent très douces et il est dur de quitter le lit conjugal, le matin à 7 heures.

Emma a gardé la petite entreprise de roulier, héritage de ses grands-parents Borde. Le commis d’avant- guerre, Jean Cabannes, est apte à reprendre du service. Auguste, désormais accepté par les enfants de son amie Clodia, laisse volontiers la place au soldat juste démobilisé et trouvera bien de quoi s’occuper dans la ferme de sa bien-aimée.

 

 

                                                                                                                                                        

Dans le haut de la ville, Achille travaille avec son beau-frère, Henri Lamaurelle. La demande en sommiers et matelas connaît une belle envolée, ainsi il y a du travail pour deux. A la veillée, on fait du rempaillage de chaises : il n’y a pas de temps mort. Henri a repris l’étal de poissons de son épouse et devant le succès de la demande en poissons de mer, il amplifie.

                                                                                                                                                        

Achille surveille sa douce Yvonne, le bébé qu’elle attend ne saurait tarder ; et c’est le 20 décembre 1919 qu’Aimée a fait son apparition. L’enfant est plus chétive que sa grande sœur Yette, mais il fait l’admiration des parents et de la famille. Achille est tellement en adoration qu’il délaisse un peu Yette ou, du moins, elle se croit délaissée. Elle a changé de statut : elle est passée du statut de fille unique à celui de grande sœur. Il va falloir partager l’amour des parents et Yette n’est pas prête.

                                                                                                                                                        

Cependant, un élément de discorde va vite surgir entre Angèle et Achille Marchive : le baptême d’Aimée. Achille reste fidèle à ses engagements. Il fera baptiser ses enfants au temple et non à l’église. Il a toujours une dent contre le curé de Montpon qui a refusé de le marier parce qu’Yvonne était analphabète et, donc, n’avait aucune éducation religieuse et il a étendu ce rejet à l’Église toute entière. Que sa sœur et sa mère n’interfèrent pas dans sa vie privée !!! L’atmosphère devenue lourde va insensiblement se détendre, d’autant qu’en mars 1920, Angèle constate qu’elle est de nouveau enceinte.

 

Rue de la mairie, Alice, future maman, est en pleine forme. La maternité l’a embellie et ses rondeurs  apportent à sa silhouette,  beaucoup de douceur. Marcel vient  mais ne reste que de courtes périodes car sa prise en charge par l’hôpital est de plus en plus indispensable. Alice a travaillé jusqu’au terme de sa grossesse et c’est le premier juin 1920 que Marcelle  arrive. Jean Maraval ne peut pas s’empêcher de dire tout de suite :

 

« c’est une Maraval ! »

 

Arthur est allé chercher Marcel à Limoges. Le nouveau père, ému, est allé droit au berceau. Son visage a affiché une joie pleine de tristesse, le regret de ne pas pouvoir devenir le père qu’il aurait voulu  être : un père présent, un père protecteur, un père aimant. Aimant, certes il l’est. Son cœur déborde d’amour pour cette petite créature née de son amour avec sa chère Alice qu’il couvre de baisers. La mère a tout de suite endossé ses nouvelles fonctions comme si elle était programmée pour ça depuis toujours.

 

Mais les événements vont se précipiter.

 

 

 

Françoise Maraval

 

 

 

 

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08/07/2022
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