Terre de l'homme

Terre de l'homme

Pour la dernière fois, je vous le dis : Rentrez en vous-mêmes, enchaînez vos sens, cherchez le bonheur dans votre coeur et non dans votre passion. Guerre et paix (Léon Tolstoi)

 

 

Capture d’écran 2022-05-02 à 19

 

                                                         La guerre par Marcel Gromaire (1925)

 

 

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                                                Invasion russe en Géorgie en 2008

 

 

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                                                           Annexion de la Crimée en 2014

 

 

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                                                   Début de la guerre du Donbass en 2014

 

 

 

Comparaison n'est pas raison, mais il est toutefois difficile de ne pas faire un parallèle, du moins sous certains aspects, entre deux épisodes historiques majeurs en Europe, produits à 80 ans d'intervalle. Le 1er est terminé : l'annexion des Sudètes par les Allemands, prémices de la guerre mondiale, le second en cours, la guerre en Ukraine avec des risques majeurs d'expansion.

Examinons les deux, successivement.

Le 1er octobre 1938, l'Allemagne s'empare des Sudètes sous le prétexte fallacieux que ces territoires du pourtour de la Bohême et de la Moravie, sont de langue et de culture allemandes. Hitler le fait dans le cadre des accords de Munich signés honteusement par l'Angleterre et la France, sous le prétexte d'éviter la guerre. En mars 1939, l'Allemagne, violant ces accords, envahit la Bohême et la Moravie puis la Pologne : la deuxième guerre mondiale va durer 5 ans.

Voilà où nous a amenés, comme pendant la guerre d'Espagne, notre non-intervention. Le 30 septembre 1938, Daladier, président du Conseil, de retour de Munich à l'aéroport du Bourget, accueilli par des dizaines de milliers de Français enthousiastes, dénonce cette  veulerie : "Ah les c......, s'ils savaient."

Cette volonté d'expansion germanique vient de loin. Elle remonte au 12ème siècle : elle a un nom : Drang nach Osten (La marche vers l'Est) qui s'appuie sur le concept géo-politique de Lebensraum (espace vital) qui renvoie à l'idée d'un territoire suffisant pour, dans un premier temps, assurer sa survie puis favoriser sa croissance et sa domination. A cet égard, la lecture de Mein Kampf (1924-1926) est édifiante. Dans ce livre, Hitler exprime sa volonté d'agrandir son pays vers l'intérieur de l'Europe : "Ainsi nous autres, nationaux- socialistes, nous biffons délibérément l'orientation politique d'avant-guerre...Nous arrêtons l'éternelle marche des Germains vers le Sud et l'Ouest. Nous inaugurerons la politique territoriale de l'avenir. Mais si nous parlons aujourd'hui de nouvelles terres en Europe, nous ne saurons penser d'abord qu'à la Russie et aux pays limitrophes qui en dépendent". En réalité, il se battra sur plusieurs fronts et courra à sa perte.

Grande est la tentation de faire le parallèle entre cette marche vers l'est des Allemands et la lente progression de la Russie vers l'Ouest, par étapes, discontinue et insidieuse. En 2008, elle apporte son aide militaire aux régions séparatistes d'Ossétie du Sud et d'Abkhazie dont elle reconnaît l'indépendance.

En 2014, c'est l'annexion de la Crimée.

En 2022, c'est la guerre en Ukraine sous prétexte de protéger les républiques autoproclamées du Donetsk et du Lougansk dans le Donbass. Comme pour les Sudètes, la culture, la langue sont des prétextes à la justification des interventions.

L'attaque de Kiev prouve que l'agression avait pour objectif d'aller au-delà du Donbass, la Russie ne supportant pas le rapprochement de l'Ukraine avec les démocraties du monde occidental.

En réalité, la Russie ne s'est jamais accommodée de la Pérestroïka initiée par Gorbatchev, qui a vu la République socialiste de Russie se réduire à la Fédération de Russie, passant ainsi de 288 millions à 140 millions d'habitants et de 22,4 millions de km2 à 17,1 km2.

Retrouver les frontières d'antan est l'objectif du Kremlin. De nombreux observateurs vont au-delà de cette explication. Ils évoquent le peu d'estime dans laquelle Poutine nous tient et qui voit en nous une Europe bourgeoise et décadente.

Le philosophe Cornélius Castoriadis dans son livre "Devant la guerre" (1981) avait déjà pressenti que la Russie avait tendance à devenir une société " où le corps social de l'armée est l'instance ultime de la domination, le seul à être efficace car incarnation organique et naturelle de l'idéologie et de l'imaginaire nationaliste grand-russien, impérial alors que l'idéologie du parti devient de plus en plus insignifiante."

Pour le moment, cette marche vers l'Ouest est sans commune mesure avec celle qui a mené les Allemands aux portes de Léningrad et de Moscou, mais les multiples atrocités, la politique de la terre brûlée, tout un peuple privé de médias libres et abreuvé de "fake news", doivent nous tenir en alerte.

Carl Von Clausewitz considéré comme la plus haute figure de la pensée militaire mondiale, dans son ouvrage "De la guerre" (1832), soutenait que la défense est une forme supérieure à celle de l'attaque car elle bénéficie de l'avantage du terrain et que le temps travaille à son avantage. L'offensive quand elle n'a pas réussi à abattre immédiatement l'adversaire, la vulnérabilité de l'attaquant  permet à la défense de se muer en contre-attaque.

 

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Il semble actuellement que nos amis ukrainiens en soient là.

Espérons qu'une négociation viendra mettre un terme à ces crimes de guerre et qu'en dépit des errements de ses gouvernants, le peuple russe conservera le crédit qu'il a acquis par sa bravoure et sa culture mais que le pouvoir de Poutine tient obstinément à l'écart de la réalité du conflit.

 

Pierre Merlhiot

 



03/05/2022
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