Terre de l'homme

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Le Raunel, ce petit drain de la Bessède, marqueur d'un mitage

 

 

Avertissement. Ne cherchez pas à rattacher ce petit regard sur Raunel et le Raunel à un quelconque rédacteur. Cela serait une erreur car cette introspection est l'assemblage de divers souvenirs de personnes qui ont vécu dans ce micro-bassin de vie ou qui l'ont aimé. Citons, néanmoins, parmi les apports, Jeanne Vielescot-Leygues, Jean-Paul Chaumel, et, aussi les restitutions orales de souvenirs de Berthe Teyssandier, de Paulette Magimel, de Jeanine Magimel-Weill, de J-Jacques, son fils  et de Josiane, sa belle-fille, et de son frère Jean-Paul Malassagne. Notons l'excellente page de La Montagne, précieusement assemblée et scannée par Jean Duc qui nous quitta le 3 mars 2018, conservée par Irène, son épouse. N'oublions pas, non plus, le rappel de traçabilité historique du majoral J-Claude Dugros profondément attaché à l'occitan, à ses legs et à la petite histoire de nos contrées.

Pensons, enfin, aux clins d'œil photographiques de Jean Bonnefon, Serge Righi, Bruno Marty, sans oublier, bien sûr, les audacieux témoignages de Frédéric Lherpinière. Cela constitue un tout.

 

 

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Ultime cascade

 

Monplaisant. Après le passage du pont de Bosredon le doux bruissement de l'ultime petite cascade naturelle du Raunel, image © TDN du 13-8-2015, concourt à l'apaisement d'un couloir sylvestre.

 

 

 

Clariane Witzes

 

Clarianne Witzes, photo ©, T.D.N.

S'il est une personnalité à ne pas oublier, c'est bien Clarianne Witzes, la charmante coordinatrice qui manage depuis plus de 12 ans, la filature fongauffiéraine du Moulin du Cros. Ce centre d'interprétation de la laine est désigné, pour le localiser, la Filature de Belvès.  Clarianne a proposé Route des Moulins pour nommer la R.D. 710 qui, dans son parcours multi-segmentaire, épouse le sillon de la Nauze.

Sa proposition "sacrifia" la Route de la Filature, l'odonyme pressenti, pour que l'ensemble des moulins nauzérois trouvent leur marque dans l'identification de cette voie.

Ce fut un bel acte de générosité venant de la part de l'âme vivante -et passeuse de la transmission artisanale- de cette industrie lainière. 

 

 

Raunel un toponyme et hydronyme assembleur

 

Le limbe nauzérois

 

Le Raunel s'étire sur 6,8 km, de sa source vielvicoise et de celle saint parducienne du Bournat, pour rejoindre la Nauze à La Tute. Il caresse les pieds de Saint Pardoux et de Monplaisant. Il fut une rivière meunière avec Le Moulinal et Bosredon.

 

 

Partons des sources du Raunel.

 

Ru, ruisseau ou rivière, peu importe. Le cours d'eau du Raunel sourd de la Bessède et, comme beaucoup de ruisseaux, il compte plusieurs sources. On peut dire qu'il est bicéphale. En regardant la carte, on devinerait deux jaillissements du socle vielvicois*. Ceux-ci, en dehors de crues spectaculaires décennales ou séculaires, ne sont pas clairement localisés. On peut dire qu'ils sont phréatiques. Beaucoup plus évident, l'écoulement du Bournat**, à 800 mètres de là, surgit dans la végétation sylvestre.

 

*Vielvic, ancienne commune qui disparut très peu de temps après la grande Révolution, désigne un vieux village. C'est le contraire de Neuvic qui est le nouveau village. Vielvic (en occitan vièlh vic, prononcé /bièlbi//) : la forme la plus ancienne date de 1199 : Veuvic (lettre d’Aliénor d’Aquitaine, archives de Cadouin, site guyenne.fr). Toponyme composé de vic issu du latin vicus et de l’adjectif occitan vièlh (vieux, ancien). Vic s’est maintenu en ancien occitan jusqu’au Haut Moyen Âge pour désigner un gros village : « dans la civilisation latine de la colonisation, le vicus a désigné le village gaulois, distingué du municipium, village de citoyens romains, et de la colonia, village de colons. » (Astor). 

 

** Bournat. Toponyme surtout porté dans l'Allier et le Puy-de-Dôme, c'est un dérivé de "borna", nom occitan d'origine celtique, voire pré-celtique, qui désigne une source, un ruisseau, mais qui peut aussi avoir le sens de cavité. Plusieurs hameaux d'Auvergne portent ce nom, nous l'appellerons le « bournat ».

https://www.geneanet.org/genealogie/bournat/BOURNAT

Le bournat, c'est aussi une ruche, pas une ruche classique mais un abri où les abeilles vivront à leur rythme, sans rien vous demander .

 

 

 

Nadine enjambe la cavité d'où sourd le Raunel.

 

Lointaine héritière mythologique de Damona et Acionna, les déesses gauloises des eaux, l'image serait follement sympathique…

https://institut-iliade.com/les-deesses-gauloises-des-eaux-damona-et-acionna/

Le culte des eaux en Gaule était vivace, ainsi qu'en atteste la toponymie de nombreux lieux, rivières ou villes thermales. Ces deux déesses, aux noms méconnus, laissent des traces toujours présentes. Le Raunel nous vient de loin, de très loin, dans l'histoire. Laissons aux érudits de l'onomastique avancer leurs thèses. Nadine, "nymphe du Bournat",  n'a ni l'intention, ni la prétention de soutenir une thèse à graver dans la marche.

 

Photo © T.D.N  / Terre de l'homme

 

Non, Nadine n'est pas Manon des Sources, encore moins une "druidesse gauloise". Nadine Veyrières, plus "bournatoise" qu'elle, on ne trouve pas, est  dans la passation mémorielle de Roger Veyrière, son père. Gardienne du Bournat, elle est une "protectrice" des sources du Raunel. Nadine, attachée aux racines de son terroir, est employée au Bercail, structure d'accueil sainte-foyenne. Elle affirme son attachement saint parducien, en poursuivant, dans les pas de son géniteur, l'entretien du cimetière de cette modeste commune rurale bessédoise. 

 

Un peu d'onomastique.

 

Les lieux. Partons de Raunel. Rien n'est certain pour Raunel, aujourd'hui devenu prénom plus que rarissime. Le toponyme est beaucoup plus ancien que l'hydronyme. Pour Fauvel, manifestement, c'est le patronyme qui est devenu toponyme. C'était le moulin de Fauvel. Fonmorte, lieudit, laisse supposer qu'il s'agit d'une fontaine qui s'est perdue et dont les anciens ne savent pas situer, avec précision, le lieu. Le hameau de la Renardie, a priori, lui, n'a rien à voir avec le renard qui n'a pas de lieudit particulier. La Renardie était plus logiquement le domaine d'un sieur Renard. À portée de voix de ce hameau, Aux Champs de Renardie était la demeure pluriséculaire des Duchampt. Deux hypothèses pour Lastounières. Le toponyme peut dériver des bouts des parcelles qui, localement, étaient désignées les "talberres", qui étaient les champs de manœuvres des laboureurs. Pour le lexicologue Jean Rigouste, plus probablement, ce toponyme viendrait de "tourniers", les artisans qui travaillaient avec un tour. Pech Bracou, assemblage du pech, colline et de Bracou qui a toutes les probabilités d'être un personnage hôte des lieux. La Tute, terme typiquement  occitan, on ne trouve pas de tute en pays d'oil, il s'agit d'un terrier ou abri de sangliers... voire d'ours. La tute pourrait, peut-être, désigner le creuset et venir de l'allemand Tüte (« sac »), mais cela paraît bien peu probable. Le belvédère de Maison-Haute n'a nullement besoin d'explication pour se justifier.

 

Les familles. 

Les Chaumel, nom de famille qui dérive de chaume, issu du latin calamus, signifie tige de blé, désigne un champ moissonné, ou surnom du propriétaire, ou nom de lieu-dit.

Les Andrieux, variante du prénom André dont l'origine est grecque. Ce prénom provient de Andreia, la force, le courage ; mais il renvoie au concept contenu dans le mot Andreas qui se traduit par homme au sens de viril, courageux, avec toutes les connotations de puissance créatrice que cela suppose .

Duchampt est un nom de famille, forme altérée de duchamp, désigne l'homme du champ, c'est-à-dire l'homme de la campagne venu au bourg, ou habitant la partie rurale.

Lagrèze, nom de famille rare, représente un nom topographique issu de l'ancien occitan grezo, désignant un endroit pierreux, nom caractéristique du domaine, aussi nom de hameaux en Lozère, Lot, etc.

Attention, presque tous les patronymes commençant par "la" viennent de l'article la qui précède le patronyme. Laborie a dû être une femme ou fille Borie tout comme Labrousse rassemble la et Brousse, etc.

Les Sarrut viennent du languedoc, variante de sarrus, nom de localité d'origine du Cantal, Aveyron.

Les Vilatte, forme altérée et un diminutif de villa, désignent le petit domaine, c'est aussi un nom de lieu en  Haute-Garonne et nom de hameau en  Allier, Creuse, Nièvre, Puy-de-Dôme .

Les Boussat, nom de famille qui représente un nom ethnique désignant l'originaire de Boussac, localité d'origine en Creuse, Aveyron, Lot.
Fauvel, nom de famille, en Normandie, Picardie, Midi, dérive de fauve, issu du germanique falwa, jaune foncé, sobriquet d'après la couleur de la chevelure.
Les Fargues, nom de famille fréquent dans le sud-ouest, forme méridionale de forge, a désigné le forgeron, aussi nom de nombreux lieux-dits et de hameaux.

 

Fiol Jean et Rose.jpg

 

Image touchante publiée dans "Terres de Nauze". Jeannot et Rose jouissant de l'intimité de leur "cantou". Rose était la nièce de Marceline-Fargues-Delcamp. Photo © Jean Bonnefon

 

Le cantou est une cheminée plus ou moins monumentale utilisée dans le sud-ouest de la France. Du Moyen Âge au xxe siècle, cette cheminée constitue l’élément central de la maison paysanne et le centre de la vie de la famille.

En occitan, les termes cantóu ou contóu désignent un coin, un recoin, un morceau, un lopin et par extension, « le coin du feu » (contóu del fioc) mais aussi le « cœur de la famille » et le « chez-soi ».

Dans la maison paysanne, le cantou est l’unique élément de chauffage et le principal élément d’éclairage. Il sert aussi à la préparation des repas, au fumage des aliments et même à la lessive. Ce coin du feu peut parfois avoir la taille d’une véritable petite pièce.

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Cantou

 

Photo Famille Fiol

 

La Famille Fiol passeuse de mémoire de Marceline Fargues-Delcamp. Jean, le chaleureux et fier Catalan de Raunel, donne le la avec son bâton de cueilleur de cèpes ; Rose, son épouse, est à sa gauche. Photo d'archives de la famille, photo © régénérée par Bruno Marty.

 

 

Les Delcamp, nom de famille, représente la variante méridionale de duchamp, désignant l'homme de la campagne .

Les Teyssandier désignaient les tisserands : nom de métier devenu patronyme.

Les Vergnolle portent un nom occitan qui désigne une plantation d'aulnes : nom de lieu-dit ou de domaine ayant engendré un patronyme.

Bergue, nom de famille issu du gaulois barica, désigne l'homme qui habite sur la berge.

Magimel est un nom de famille du sud-ouest. Ce nom topographique, c'est-à-dire le mas de gimel, nom de domaine, est devenu patronyme.

Malassagne, nom du Midi, représente aussi un nom topographique, mauvais, sagne, désignant une terre humide. Ce nom de lieu-dit ou de domaine est devenu patronyme .

Roque est une forme méridionale de roche, du latin rocca qui désignait un endroit rocheux, le château fort situé sur la roche, nom de domaine ou de hameau devenu patronyme.

Joffre nom de famille très répandu, représente la forme limousine de Geoffroy, transplantée en Catalogne au xe siècle, nom de personne d'origine germanique, composé de gaut, nom de divinité et frid qui signifie paix.

Si l'on réunit Roque et Joffre, on obtient le patronyme de sympathiques résidents de Lastounières et aussi celui d'un général qui fit parler de lui lors de la Guerre du Golfe. 

 

https://www.filae.com/nom-de-famille/Joffre.html

 

 

Écrevisse des torrents - Vikidia, l'encyclopédie des 8-13 ans

 

L'écrevisse de torrent. Image Wikidia

 

Jadis, il était un havre reproducteur d'écrevisses autochtones. Hélas, victimes des tarissements, elles ont disparu. Certains pêcheurs, en marge des règles, ont saisi de belles truites Fario, surprises dans la nasse du tunnel. Aujourd'hui, le Raunel, exutoire de la Bessède, est devenu un talweg bordant des prairies coiffées de bosquets.

Un superbe chemin rural empierré de 1 000 m relie les 1 250 mètres de la Rouquette à Bosredon. Ce décor se prêterait merveilleusement à une scène cinématographique.

 

Raunel n° 3

 

 

Le Raunel s'inscrit en marqueur de son couloir ; le pont de Raunel, lui, s'affirme en centre de gravité de ce mitage. 

 

03 - Lavoir de Monplaisant 01

 

Le lavoir au niveau du pont de Bosredon n'est plus guère utilisé de nos jours.

Photo © Bruno Marty

 

 

03 - Lavoir de Monplaisant 03

 

Le pont de Bosredon a été construit vers la fin de l'avant-dernier siècle. Pour sa préservation, il a été crépi. Il a, hélas, perdu son cachet vieille pierre.

Photo © Bruno Marty

 

Pont de Bosredon

 

Sous Monplaisant le pont de Bosredon, image © TDN, du 13-8-2015, réunit Fonmorte à La Renardie.

 

 

Citons quelques authentiques familles. Au siècle dernier, elles ont marqué la vie de ce hameau. Au premier chef, les Boussat ont eu la légitime fierté de voir le populaire Amédée, ceindre l'écharpe tricolore aux glands d'or. Il demeura maire de Siorac, pendant 5 mandatures de 1947 à 1977. Aviateur pendant la dernière guerre, il succéda aux tout premiers pionniers de l'aéroclub belvésois. Il manipulait l'humour avec une aisance hors du commun. Il ne laissait personne indifférent.

 

 

 

 

Amédée Boussat Amédée Boussat, lors de sa période de conscription. Il fut un des personnages fondateurs de l'Entente paysanne des années 30.  Cet élu débonnaire et consensuel se situait dans la mouvance radicale d'antan, mouvance qui se voulait républicaine mais ne rejetait pas, loin s'en faut, les antériorités bonapartistes qui, depuis la grande Révolution, ont cheminé jusqu'à nombre de nos concitoyens. 

 

 

Dans la partie monplaisanaise, on se souvient des Gouzot. Ils habitaient au bord de la route quand elle était bien plus calme qu'aujourd'hui. Une attachante Hélène Teyssandier, mère d'André et de Berthe, les remplaça.

 

Extraordinaire Berthe, dite Berthoue. Elle n'hésita pas, en été 2008, à  88 ans, à sauter en parachute dans le ciel corrézien. Elle défia ses amis qui l'avaient taxée de folle. Après une belle chute libre, à 1 500 mètres du sol, commencèrent 6 minutes exotiques de vol au-dessus des collines scrutant le bas Limousin, le haut Quercy et le nord du Périgord Noir.

Berthe décéda le 4 juin 2009.

 

 

Berthe Teyssandier

 

Pour Berthoue, cet intense moment de rencontre avec le ciel, avec le ciel et non le Ciel, fut, probablement, le jour le plus intense de sa vie.

 

 

Berthe Teyssandier

 

Magazine du dimanche La montagne du 5 octobre 2008. Photo © Frédéric Lherpinière

 

Berthe Teyssandier est décédée le 4 juin 2009, à 88 ans, à Périgueux.

 

 

Plus en retrait, Marceline -dite Marcelle- Fargues naquit à Siorac, à La Tute, le 3/12/1912. Elle a épousé Édouard Delcamp, le 26/6/1937 à Bordeaux. Elle décéda à Sarlat, le 24/10/1991.

Marceline, appelée aussi Marcelle, repose au cimetière de Siorac. Marceline a été employée de maison du Dr Lavelle, il fut maire de Siorac, avant d'aller à Bordeaux. Le Dr Numa Lavelle décéda en 1946. Édouard Delcamp décéda bien prématurément, après un accident de travail. C'est après ce drame que Marceline est revenue à Raunel où elle vivait humblement mais dignement de son cheptel ovin.

Marceline fut, pendant un demi-siècle, la dernière pastourelle de Raunel. Elle vécut plus que modestement dans son logis rustique où la bergerie occupait une place presque "sacramentelle". Elle inspirait par sa décence, le respect de tous. Dans la continuité familiale, Rose et Jean Fiol ont repris la maison de leur tante Marceline jusqu'à leur décès.

 

Garde barrière Raunel

 

 

 

Le P.N. 331 fut gardé pendant un gros quart de siècle, par Jeanne Monribot-Lagrèze, une veuve d'agent d'entretien de la voie. Élie Lagrèze, bien prématurément, décéda en 1954. L'automatisation de ce P.N., tout à fait dans le moderne contexte sécuritaire, lui fit perdre beaucoup de souvenirs qui remontaient à l'ère de la vapeur.

 

Au cœur du XIXème siècle, les concepteurs du chemin de fer n'ont pas hésité à jalonner les lignes de passages à niveau. À l'époque, pour se prémunir de la dangerosité,  on opta presque systématiquement pour des P.N. manuels, parfois insolites sur de banaux chemins de terre comme celui de Raunel. On hésitait beaucoup pour se limiter au seul implant des croix de Saint André "protecteur" des P.N. non gardés. Les P.N. gardés étaient aux mains de  gardes-barrières. En général, ces postes revenaient presque tous aux épouses d'agents de la voie.

 

 

De lointains souvenirs.

 

 

Élie Lagrèze   Élie Lagrèze vers 1935   André Lagrèze

 

À gauche, Élie Lagrèze, lors de ses servitudes militaires, et au tout début de sa découverte du mitage de Raunel. André Lagrèze, son fils aîné, natif de Fontenilles, fit ses premiers pas dans ce P.N. Fasciné par la vie ferroviaire, il se plaisait à raconter ses souvenirs de croisement, au niveau de Raunel, de lourds convois filant vers le Fumélois ou venant de ce pôle industriel. 

Photo © Archives familiales

 

De l'autre côté du chemin de fer, la famille Sarrut resta bien des années. Elle fut remplacée par les Vilatte venus du Coux. 

 

 

Raunel

 

Le tout petit hameau de Raunel, tout comme son cours d'eau, est nommé Raunel ; mais, que peut bien vouloir dire Raunel.

 

 

Le Raunel, c'est un ruisseau qui est localisé dans l'oeuvre de Gourges.

 

Le majoral Jean-Claude Dugros a relevé  ses traces.

Le Raunel (Saint-Pardoux-et-Vielvic) (IGN, hydronyme) Raunel (Le), ruisseau qui traverse les communes de Saint-Pardoux-de-Belvez et de Montplaisant, du S. au N.-E., et se jette dans la Nauze. Rivus de Roanel, 1460 (archives de la Gironde Belvez). Ronnel, Rouanel, 1791 (Acte not.). (G, ruisseaux, rivières)

« Petit Rhône », diminutif en –ellu de Rodanus (…) ces formes [Ronel, Ronnel, Rhônel, Rounel] présentent la perte de z peut-être favorisée par sa position intervocalique entre o fermé e une voyelle ouverte telle que le a. On expliquera plus difficilement la syncope systématique du a. Faut-il y voir l’influence de la forme française Rhône ? » (J. Astor, p. 864).

Pour André Delpeyratil fut instituteur à Monplaisant, au milieu du siècle dernier, c'est un clin d'oeil au Rhône. On peut cependant émettre un franc nenni car le hameau s'appelait Raunel, bien avant son affectation monplaisanaise.  La lexicographie des toponymes, loin d'être figée, sait évoluer. Raunel, lieudit, fut jadis orthographié Rosnel ou Ronel. 

Pour saisir la sémantique d'un toponyme, il faut, avant tout, maîtriser la langue du terroir, en l'occurrence l'occitan, pour en déceler les subtilités locales ; le français, langue nationale, prescrite par l'Ordonnance du 10/8/1539 de Villers-Cotterets, de François 1er, a dû, au moins, attendre l'après-guerre de 1914/18, pour être utilisé par la population plébéienne locale. Raunel nous viendrait ainsi du verbe occitan "rauhnar" admis, en traduction littérale, en équivalence de rogner. Les paysans du pays disaient en parlant de leur rivière "rauhna", conjugaison du verbe, au présent de l'indicatif, à la troisième personne du singulier. Le Raunel, certes, comme tout cours d'eau, ronge son assiette et concourt à l'érosion naturelle mais il faut bien plus percevoir dans ce "rauhna", une notion de doux bruissement, presque une faible plainte des ondes fuyant vers l'inconnu.

 

Poissons - Truite fario

 

La truite Fario. Image Wikipédia

 

André Delpeyrat, instituteur à Monplaisant, dans l'Entre-deux-guerres, fin et brillant pédagogue s'il en était, voulait, par licence poétique, sans doute, donner au Raunel une dimension géographique, bien disproportionnée, en le qualifiant de petit Rhône.

 

 

Ramblai de Raunel 02

 

Le tunnel de Raunel, ouvrage plus que largement séculaire, permet au chemin rural de relier Fonmorte à la route départementale. Le Raunel a trouvé sa place dans ce passage. Au-dessus du chemin rural, le chemin de fer qui, historiquement, était désigné ligne de Paris à Tarbes, ne sert plus que pour les T.E.R. de Limoges à Agen. 

Photo © Bruno Marty

 

 

Raunel n) 2

 

Le chemin latéral au Raunel a été nommé Chemin de la fontaine. Celle-ci a bien dû exister mais, depuis des lustres, elle s'est perdue... d'où Fonmorte. Le mamelon de Pech Bracou, gardien de ces reliefs collinaires, regarde le Raunel, la Nauze, les derniers hectomètres du ruisseau la Vallée et, naturellement, la Dordogne. Sur cette émergence, deux cyprès indiqueraient un probable implant huguenot.

 

 

Pont du Raunel

 

Magnifique, le pont voûté qui chevauche l'humble Raunel.

Photo © T.D.N

 

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En septembre 2019, la source de Raunel, au bord de la R.D. 710, comme cette année, était à sec.

Photo © Bruno Marty

 

 

Route des moulins

 

La Route des moulins va de bief en bief.

 

 

Pont  des champs du raunel

 

Le Pont des champs du Raunel respecte la forme des ouvrages de cette ère où l'on savait donner de l'élégance aux ouvrages les plus modestes.

Photo © T.D.N

 

 

 

Départ du chemin Roland Andrieux,

 

Point de départ du chemin Roland Andrieux. 

Photo Serge Righi

 

 

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Yannick Carcelès, maire-adjoint de Siorac, n'était pas encore promu au rang d'échevin quand il découvrit la plaque de Roland Andrieux, piqueur de la voie, mort en captivité. Celle-ci a fait l'objet d'une ignoble soustraction. Didier Roques, maire de Siorac, s'en offusqua et, spontanément, promit son remplacement.

Photo Serge Righi

 

 

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10h558 mai 2019. La cérémonie va commencer dans quelques minutes. Le T.E.R. 65835, parfaitement à l'heure, donne le la, pour la découverte du chemin Roland Andrieux.

 Photo Serge Righi

 

 

Raunel sioracois

 

La métairie sioracoise de Raunel a vu passer bien de modestes métayers.

 

Et les voisins. Nos lieudits s'inscrivent dans nos matrices passeuses de mémoire. Parler de Raunel et du Raunel, sans dire mot des voisins de ce bassin de vie, serait bâtir un enclos étroit d'où on ne sort pas. Situons l'espace naturel du voisinage  de Raunel. Il part des hauteurs de Lastournières, descend vers la Tute-basse, suit la Nauze jusqu'au Moulin de Fauvel, remonte vers Fonmorte et revient vers La Renardie. 

Nos ancêtres voisinaient, que ce soit pour les travaux collectifs agricoles et, plus loin dans l'histoire, pour les journées de prestations. Ils se retrouvaient aussi pour les moments de resserrement lors des deuils. Ils partageaient les moments de liesse lors des mariages. 

 

 

Roland Andrieux et Gustave Magimel

 

Photo © Archives familiales

 

Raunel s'est grandement attristé quand Roland Andrieux et Gustave Magimel, captifs de l'autre côté du Rhin, ont perdu leur jeune vie loin de leur sillon nauzérois. 

 

 

 

La source collinaire de Pech Bracou a fait l'objet de l'attention soutenue, sa vie durant, de Berthoue.

Photo © Bruno Marty

 

Rappelons, sans être exhaustif, quelques autres noms de cette terre de confluence raunelo-nauzéroise qui ne sont pas prêts d'être oubliés. Citons pour les reliefs sioracois, les Roquejoffre et les Gorce de Lastrounière. Au tout début de ce siècle, Berthe Teyssandier, nonagénaire de Pech Bracou, osa se lancer en parachute. Berthe, affectueusement appelée Berthoue, fut une audacieuse personnalité, d'une trempe féminine d'exception, à l'époque où il fallait savoir secouer les conventions pour affirmer son originalité indépendante.

 

Dans le creuset de la Nauze, à La Tute, Henri Escarmand, qui fut le conducteur du train minier de Merle à Siorac, demeure inoubliable pour sa renommée "d'ostéopathe".

 

 

Côté monplaisanais, l'audacieux meunier, devenu sabotier à Raunel, Louis Bergues, décéda prématurément. Il fut maire de Monplaisant, de 1920 à 1931. Lors de la Guerre de 14, Louis Bergue, de 1915 à 1919, alors conseiller municipal, prit le relais de Guillaume Lesvigne, maire envoyé au front. L'adjoint était décédé.  Louis Bergue décéda au cours de sa seconde mandature de maire de plein exercice.

Photo © Archives familiales

Louis Bergue, maire de Monplaisant

 

L'activité du moulin Bergues, en changeant de fonctionnalité, perdura longtemps encore avec Gustave Magimel jusqu'à la dernière guerre, ensuite avec André Malassagne. Il passa de moulin, à saboterie puis à scierie. Sa roue à aube fut la dernière touche patrimoniale qui, par sa prouesse technique, suscitait l'admiration des observateurs.

 

ESP

 

 

Carves, le linteau du moulin d'Écoute-s'Il-Pleut, à la fin de l'avant-dernier siècle, 1887, il était la demeure meunière des Bergue qui, à  la charnière des siècles, ont évolué vers Raunel.

De part et d'autre de la date - 1887  - peint sur la pierre on découvre le nom de Bergue.

Image © Josiane Weill

 

 

Photo © Archives familiales

 

 

Ils étaient les meuniers d'Écoute-s'Il-Pleut. Dans ce goulet saint-germano-carvéso-sagelacois, l'eau est "capricieuse", désolante par ses fureurs, intensément attendue lors des périodes sèches, elle se fait désirer pour un meunier qui a besoin de travailler avec elle. La Vallée et le Neufond, même en cumulant leurs forces vives, n'ont pas la puissance et encore moins la pérennité de la Nauze. Les Bergue ont donc quitté Écoute-s'Il-Pleut pour rejoindre Raunel. À Raunel, Louis Bergue a modifié la fonctionnalité du moulin. Il est devenu saboterie puis scierie. La meunerie, elle, resta sur la rive droite avec le moulin désigné "L'affaire de Marcou". 

 

 

Mariage Magimel-Bergue

 

Soulignons la forte personnalité de Denise Bergue qui, dès 14 ans, fut chef d'entreprise dans ce site bicéphale monplaisano-sioracois.

Photo © Archives familiales  

 

 

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Hélène Doublein et son époux Élie Chaumel

Photo © Archives J-Paul Chaumel

 

Comment ne pas citer Élie Chaumel, un populaire et pragmatique paysan de Fonmorte. Il fut le précurseur d'une certaine modernité rurale. Ancien maréchal-ferrant, cet exploitant agricole se tourna vers la mécanisation et introduisit le premier tracteur. Il sut, dans les périodes estivales, notamment lors de la sècheresse séculaire de 1949, maîtriser les derniers épanchements du Raunel et conçut  une judicieuse retenue des précieuses ondes. Élie Chaumel, pendant plusieurs mandatures, fut l'élu compétent et ouvert qui compta au conseil municipal monplaisanais.

Les Chaumel dont l'embasement à Lastournière et à Fonmorte remonte, au moins à 1709, ont largement essaimé un peu partout. Par la pérennité de leur enracinement, ils signent le lignage le plus affirmé de ce mitage nauzérois.

 

Grâce à notre ami Jean-Paul Chaumel, remontons aux générations  antérieures.

 

Chaumel-Paul_Guitard-Marie

 

Paul Chaumel et Marie Guitard

Photo © Archives familiales. J-Paul Chaumel

 

 

Chaumel-Elie_Marie-Buffard

 

Élie Chaumel et Marie Buffard

Photo © Archives familiales. J-Paul Chaumel

 

 

N'oublions pas le moulin de Fauvel, à portée de voix de Raunel. Il abandonna sa fonctionnalité au siècle dernier. Il était le moulin des Souchal.

 

20 - Confluent la Nauze - Le Raunel

 

La belle image fusionnelle de la confluence Raunel-Nauze. À gauche, "l'humble vassal" fait allégance à la Nauze, "sa souveraine", à droite. 

Photo © Bruno Marty

 

 

 

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Cette modeste immersion dans les derniers hectomètres du Raunel a pu ou pourra, peut-être, vous donner envie de parler de votre mitage, là où vous trouvez vos racines ou de bons souvenirs, d'enfance, de jeunesse, de famille. N'hésitez pas à transmettre votre passation de mémoire à Catherine. Après une lecture attentive, elle se fera un plaisir de la publier. Ce mémoire peut porter sur un hameau, un tout petit village, voire un atelier obsolète, une carrière abandonnée, un lieu insolite où les souvenirs méritent de ne point vaciller dans l'oubli. Raunel, cours d'eau et mitage, certainement, aurait mérité un billet beaucoup plus consistant. Dans d'autres supports, un observateur scientifique d'un excellent niveau a su faire vivre la faune et la flore de ce corridor. Il paraît possible, voire probable, qu'il y ait, au sein du lectorat, quelque anonyme qui éprouve le besoin de tancer ce billet. C'est le droit de tout un chacun ; néanmoins, a contrario, rien n'empêche, pour soutenir les amis de Raunel et du Raunel, de cliquer sur l'icône positive en usant de  la main levée, en bas et à droite de cette page.

 

Certaines images peuvent appeler des remarques. La fenêtre commentaire est là pour vous permettre de vous épancher. N'hésitez pas à faire partager votre attachement à ce petit bassin de vie.

 

Contact catherinemerlhiot@gmail.com

 



12/12/2023
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