Terre de l'homme

Terre de l'homme

Un lieu unique, patrimonial, pédagogique, scientifique et touristique

 

 

Si vous pensez que pour se situer dans un niveau convenable et acceptable, [il n'y a pas si longtemps, on disait "être in"], il faut impérieusement, au moins, concourir d'une manière infinitésimale à l'hypothèque de nos maigres réserves d'oxygène, soit en étant allé voir les Chutes du Niagara, ou, comme Juan Carlos, avoir fait  un massacre d'éléphants au Botswana, ou être de retour d'une échappée au soleil des Seychelles, surtout, dès maintenant, occultez cet article, ringard à l'envi. Il ne saurait que vous donner l'impression amusée d'observer un champ de vision d'incultes demeurés campant dans une primitive Béotie.

Ce volet, pour celles et ceux qui osent penser que dans l'espace hexagonal, il y a des lieux d'exception que de  nombreuses personnes n'ont pas pris le temps d'approcher, vous emmènera au Pic du Midi de Bigorre. Alt 2 877 m.

 

Pierre-Bernard Fabre

 

 

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Pic du Midi

 

L'image de Pyrénées rando donne une idée de la merveille de notre barrière. 

 

 

https://www.youtube.com/watch?v=rHCbiOWDiY8

 

 

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De ces reliefs, s'épanchent les plus hautes sources de l'Adour.

Photo © Pierre Fabre

 

Nos Pyrénées, montagnes de 40 millions d'années, sont, comme chacun le sait, des reliefs jeunes… quoique ! Celles-ci s'inscrivent sur un socle largement érodé de l'Ère primaire d'il y a environ 500 millions d'années. Cette base, après une lente, longue et décisive érosion, a longtemps été recouverte par la mer.

Le choc de deux blocs, l'un du sud et l'autre du nord, il y a environ 40 millions d'années, a fait naître la chaîne que nous ne nous lassons pas d'admirer. Si les scientifiques mesurent avec précision la croissance de l'Everest et des Alpes, elle est variable et dépasse plusieurs millimètres par an, ils sont plus réservés pour nos Pyrénées. A priori, elles croissent, certes, mais dans des limites difficiles à estimer d'autant plus que deux paramètres capitaux viennent compliquer les mesures : la fonte des glaciers et le "réchauffement" de la planète.  Ces deux derniers critères ont de quoi, à court terme, nous inquiéter

 

 

Là nous sommes à 238 km de la Méditerranée, 209 km de Bordeaux, 150 km de Biarritz, 125 km de Toulouse, 84 km d'Auch, 57 km du Pic d'Aneto, 33 km de Tarbes. L'horizon permet de voir, quand les conditions sont idéales, un arc pyrénéen d'environ 300 km. Pierre, un ancien technicien du Pic, lui, n'a jamais pu voir ni Toulouse, ni Biarritz. Ce qui est totalement exclu, c'est de voir les reliefs du Roussillon, dont le Canigou, car les montagnes du Plantaurel et du Couserans occultent la perspective.  

Tombons sous le charme de la chaîne qui s'offre devant nous. Nous partons des reliefs béarnais, puis les cimes bigourdanes  s'imposent face à nous avec pour point d'orgue Aneto. La brèche de Roland nous rappelle que, jadis, on s'est accommodé de légendes pour supplanter l'histoire authentique. Le spectacle s'avère permanent, les ombres et la lumière se livrent, sous nos yeux, à une remise en cause permanente. L'été finissant laisse apercevoir quelques embryons de névés. Au loin, des cheptels d'ovins entretiennent les pâtures. De la terrasse, on découvre l'assiette de l'ancienne route à péage aujourd'hui accessible aux seuls opérateurs de maintenance et aux secours.

Observer de la terrasse, c'est bien, découvrir le thème avec des conférenciers de qualité, c'est encore mieux.

 

 

Jean-Philippe Dupouy

 

Jean-Philippe Dupouy ne décrit pas les Pyrénées... il les fait vivre.

 

Le premier intervenant a rappelé la genèse de la chaîne et son embasement qui est séparateur de notre voisine l'Espagne.

 

Attention, il y a 11 Pic du Midi dans les Pyrénées et celui de Bigorre, le plus connu, est légèrement moins haut,  7 m, que celui d'Ossau, 2 884 m. Le pic du Midi d'Ossau, lui, est un fragment d'un paléo-volcan du Cisuralien, formé d'une caldeira dont le diamètre original est estimé entre 6 et 7 km. Jean-Philippe précisa que les calculs géographiques furent d'une telle précision que le Vignemale que, pendant des siècles, "nous" avons cru nôtre, est un sommet partagé avec nos voisins du sud. Ce fut surtout un brillant exposé géographique, décrivant avec une précision pointilleuse la part des reliefs et des vallées, leurs particularités. Jean-Philippe tient à préciser que les toponymes des Pyrénées nous viennent de la communication des bergers. Difficile de disserter sur les toponymes et patronymes sans aborder l'onomastique. Le mot Balaïtous vient probablement de l'occitan vath (pron. bat), vallée et leitosa (pron. laïtous ...). Une autre interprétation proposée est la « vallée avalancheuse », de vath et lieitosa venant de lieit signifiant lit ou couloir d'avalanche. Le pic du Balaïtous, ou pic Moros, est un sommet des Pyrénées culminant à 3 144 m, le premier de la chaîne dépassant l'altitude de 3 000 m depuis la côte atlantique. Il est le plus haut sommet du massif du Balaïtous, massif granitique pyrénéen se situant à la frontière entre la France et l'Espagne. 

 

Jean-Philippe fut brillant, voire brillantissime, quand il se situa sur le niveau de la faune pyrénéenne. Sa dissertation ne manqua point d'humour.  Le rôle majeur des oiseaux avec leurs capacités à entretenir, par leur repérage, la prise d'animaux morts, mit en relief l'équilibre de la nature. Ils sont les éboueurs naturels de nos montagnes. Certaines populations de mammifères, en voie d'extinction, ont été sauvées in extrémis. Pour d'autres, il a fallu procéder à des transferts d'animaux venus de lointaines montagnes pour favoriser un repeuplement.  

 

On notera donc que s'il n'y avait pas d'humain sur la planète, nos montagnes seraient parfaitement propres et nettes.

 

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Guilhem Delous, lui, a ouvert le grand livre d'histoire, livre enrichi de bien intéressantes petites histoires.  
 

 

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Guilhem, le second intervenant, lui, se focalisa sur la partie historique du Pic. Son exposé historique fut, lui aussi, ponctué de saillies d'humour. Si l'on a sur cet éperon, un des sites les plus remarquables, c'est parce qu'il y a eu des hommes de sciences qui ont su capter de ce point unique, les phénomènes naturels. De là, on a pris des images qui ont servi pour des missions aussi extraordinaires que celle d'Apollo qui, en 1969, amena Armstrong à être le premier humain à fouler le sol lunaire.

 

N'oublions pas non plus le rôle majeur du Pic pour la télévision.  Il est le second pôle de transmission des images après la Tour Eiffel.

 

 

 

L'histoire du Pic, c'est bien sûr l'histoire de deux hommes d'exception.

 

Charles-Marie-Étienne Champion Dubois de Nansouty, dont je préfère ne point parler de sa carrière militaire et seulement relever qu'il fut un général qui ne voulut pas faire tirer sur les communards en 1870. Cette méritoire prise de position lui valut d'être mis en réserve et d'attendre une autre mission… celle de donner au Pic toute sa dimension.

 

Charles-Marie-Étienne Champion Dubois de Nansouty, né en 1815, mort en 1895, après sa retraite de général, se consacre a la création de l’observatoire du pic du Midi de Bigorre. Wikipédia.

 

Charles-Marie-Étienne Champion Dubois de Nansouty — Wikipédia

 

 

 

 

 

Pic du MIDI

Beaucoup moins marqué par son cursus antérieur et surtout beaucoup plus aisé dans le dialogue, Célestin-Xavier Vaussenat, d'une très humble condition, fils d'un ouvrier charron et d'une mère originaire d'une famille d'artisans de Vizille, est d'un caractère plus avenant que le général. Il se charge de trouver les fonds nécessaires à ce projet.

 

Le 19 août 1864, à l’Hôtel des Voyageurs au Cirque de Gavarnie, Vaussenat est parmi les fondateurs de la société Ramond ; société savante et de montagnards, où sont également Charles PackeÉmilien Frossard, le comte Henry Russell ; par la suite le docteur Costallat et le général Charles-Marie-Étienne Champion Dubois de Nansouty.

 

À partir de ce groupe de personnes, est lancé le projet d’études à partir du Pic du Midi de Bigorre.

 

Notre planète compte une kyrielle de lieux touristiques, une autre de lieux scientifiques, mais le Pic du Midi de Bigorre, lui, cumule les deux aspects et, en cela, il est unique.

 

 

Ponton du Pic

 

On ne peut pas quitter cette esplanade sans aller jusqu'au ponton pour une image souvenir. Le seul regret pour l'atteindre est la file d'attente... environ une heure.

 

 

 

Alfred Roland — Wikipédia Et quand on repart du Pic, fortement pénétrés de la magnificence de cette chaîne, on comprend encore plus pourquoi autant de compositeurs, de poètes et de musiciens, dont Alfred Roland fut le chantre, ont rendu hommage à nos Pyrénées.

 

 

 

Montagnes Pyrénées, vous êtes mes amours.

Les montagnards (La tyrolienne des Pyrénées)
Paroles et Musique: Alfred Roland 1896

 

https://www.youtube.com/watch?v=WK4ryXrBA2w

 

https://www.youtube.com/watch?v=VISTlYoQRL0

 

 

Sommes-nous pyrénéistes.

 

 

Henri Beraldi — Wikipédia

On n'est pas occitaniste en connaissant quelques bribes de la langue d'Oc. Il faut savoir s'exprimer dans ce bel idiome, l'écrire et le traduire.

Non, le pyrénéisme n'est pas simplement une sympathie pour la chaîne des Pyrénées. C'est Henri Béraldi  qui a défini la terminologie de ce mouvement tout à la fois sportif et littéraire. Il consiste à parcourir les Pyrénées puis à écrire une œuvre en rapport avec l'expérience ressentie. Selon l'inventeur de ce néologisme, l'idéal du pyrénéiste est de savoir à la fois ascensionner, écrire, et sentir. 

 

 

 

Grand bourgeois parisien mais d’origine méridionale, mondain, lettré, fréquentant les milieux artistiques, Henri Beraldi se rendait aux bains de Luchon à la belle saison et parcourait la montagne, à pied ou à cheval, comme tous les baigneurs de l’époque.
Ce n’est cependant que vers la cinquantaine, que les Pyrénées vont véritablement entrer dans sa vie à la faveur d’un article écrit en 1898 pour une revue de bibliophiles : « Excursion biblio-pyrénéenne du centenaire de la découverte des Pyrénées ».
Cet article aura des prolongements inattendus puisqu’il aboutira à cette œuvre magistrale, les « Cent ans aux Pyrénées » en sept volumes.

 

https://www.revue-pyrenees.com/spip.php?article439

 

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Mes enfants, Gilles, image supérieure, et Christophe, image inférieure, estimant à juste titre qu'un quelconque gadget inutile, pour la fête des pères, m'aurait semblé aussi incongru qu'une paire de skis de fond pour une promenade estivale et diurne en Bessède, ont  trouvé qu'une découverte du Pic du Midi de Bigorre, elle, aurait toutes les chances de me ravir.

 

Ils ont visé juste, très juste. Ma grosse déception fut de ne pas avoir pu trouver un jour idéal qui ait pu nous réunir ensemble sur ce lieu d'exception.

 

Merci à eux pour cette originale initiative partagée. Elle m'a beaucoup touché et, probablement, depuis leur naissance, elle fut leur plus beau et leur plus judicieux cadeau filial de ma vie. 

Christophe Fabre

 

 

En prenant, une fois encore, le risque d'agacer bon nombre de lecteurs, je pourrais si, tant à gauche qu'à droite, les doigts se lèvent en nombre suffisant, ouvrir un nouveau billet pour dire pourquoi, après 18 années dans la couronne pyrénéenne, je suis devenu un nostalgique de cette barrière naturelle.



25/08/2021
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