Terre de l'homme

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De belles gens. Suite n° 22. Saga de Françoise Maraval

DE BELLES GENS

 

Épisode 22

 

Henri

 

Résumé de l’épisode précédent

 

 

 

Marcel se trouve à l’hôpital de Limoges, son état est préoccupant mais, de tous côtés, il va être aidé. La forge est vendue. Arthur a rejoint l’armée d’active dans la Marne. On attend des nouvelles d’Henri.

En Macédoine, Achille a contracté le paludisme. Il passera la fin de l’année en France, au cours d’une permission de convalescence.

 

 

Tout le quartier colporte la scène que certains ont vue en direct : Alice Maraval et Marcel Destal !!!

Maria, la mère d’Alice, sait toujours tout, et même quelques fois, avant que cela ne se produise. Il faut en informer Jean, son mari, avant qu’il ne l’apprenne par un autre canal.

 

            - Mais où va-t-on ? Se donner en spectacle à l’âge qu’ils ont ? Oublier le qu’en-dira-t-on… Comment veux-tu que je regarde les gens en face !!!

           

            - Jeantou, elle l’aime et elle est prête à tout pour lui. Nous n’avons pas vu Marcel mais je sais qu’il est très diminué : j’ai bien peur que cette fois, elle ne t’écoute pas. Attention mon ami, si tu te mets en travers de son chemin, cette fois elle ne t’écoutera pas, elle partira avec lui et tu perdras ta fille.

            - Mais on ne part pas avec un infirme !

 

            - Si, elle partira avec lui, ils resteront à Saint-Cyprien mais elle quittera la maison.

 

La tête de Jean Maraval bourdonne, il est incapable de réfléchir.

 

            - Jean, il faut sortir de ce mauvais pas par le haut ; nous accueillerons Marcel chez nous. Je vais en parler à Emma dès son retour de Limoges et à Alice, ce soir.

 

            - Tu as raison, nous ferons comme si nous étions d’accord.

 

            - Mais Jeantou, nous sommes d’accord, c’est la seule solution.

 

                                                                                                                                                       

En rentrant de l’hôpital, Emma est venue récupérer son fils chez les grands-parents. Maria a installé tout son monde autour de la table et a fait part à sa fille et à sa bru de leur décision du matin. Alice a sauté au cou de son père pour le remercier de tant de compréhension et de générosité...

                                                                                                                                                        

 La soupe de fèves du jardin est arrivée sur la table, on a parlé de la santé de Marcel. Jean Maraval n’a rien dit de la soirée ; il était épuisé.

 

De retour à la maison, Emma a trouvé, glissée sous la porte, une lettre d’Allemagne. Enfin, des nouvelles d’Henri. Elle a aussitôt décidé de ne pas l’ouvrir, ce soir. On verra demain ; aujourd’hui, elle a fait le maximum.

 

                                                                                                                      Munster le 1er mai 1917

 

 

                                                                       Ma chère Emma,

 

Me voilà arrivé à destination ! Je suis à Munster, camp de prisonniers situé dans la province de Westphalie. La ville est à quelques kilomètres de la frontière avec les Pays-Bas. Nous sommes  nombreux à être venus grossir les rangs des détenus dans un espace impressionnant. Il y a plusieurs nationalités et des hommes aux origines sociales diverses et variées.

 

Je suis dans un baraquement en bois, le block II, de cinquante mètres de long sur environ dix de large. Une forte odeur de goudron règne à l’intérieur car les murs extérieurs sont badigeonnés avec ce produit pour les imperméabiliser. Par baraquement, nous sommes 250 prisonniers. A l’intérieur, un couloir central dessert de chaque côté des couches faites de paille ou de sciure et ces couches sont empilées sur deux étages. De temps en temps, il y a une table avec des bancs et un poêle.

A l’extérieur, des baraques servent de logement aux gardes, à« la Kantine » où on peut acheter des petits objets et des compléments alimentaires. Il y a aussi des installations sanitaires et des locaux culturels : une bibliothèque, une salle de théâtre et des lieux cultuels.

 

Le camp est entouré de plusieurs rangées de fils de fer barbelés  de trois mètres de haut et au grillage très serré.

 

Depuis que je suis arrivé, je fais partie d’une équipe qui remplit des sacs de sciure : ces sacs  assemblés nous servent de paillasses. De longues promenades sont organisées dans une cour immense, entrecoupées de pauses où nous pouvons parler et tout cela sous la surveillance de gardes qui sont souvent des éclopés de la guerre mais qui sont munis de fusils.

 

Hier, pendant la pause, j’ai vu arriver vers moi un personnage étrange, un prisonnier qui, tout de suite, m’a fait penser à « l’abbé Faria » personnage du Comte  de Monte-Cristo.

 

            -  Depuis que tu es là, je t’observe. Tu sais pourquoi ? Non ? Regarde autour de toi… nous sommes tous décharnés et toi, mon ami, tu es gras comme un cochon ; mais qu'est-ce-que tu fais ici ? Tu es venu nous provoquer ? 

            - Oui je l’admets, j’ai eu beaucoup de chance. 

 

Et je lui ai raconté mon parcours avec modestie car j’ai compris qu’il fallait jouer la carte de la modestie.

 

                                                                                                                                                         

            - Comme toi, j’ ai été fait prisonnier à la bataille de Charleroi mais, blessé à un pied, j’ ai atterri dans un autre hôpital. Je n’ai plus de cheville et je marche comme je peux. Je suis maigre à faire peur. 

 

 Il me dit avoir trente-sept ans : il donne l’impression d’être plus vieux que grand-père François. Il est de la Coquille. Ici, on l’appelle « Jésus-Christ ». Il est ici depuis la fin 1914. Il raconte qu’au début, rien n’était prévu pour les recevoir, ni tente, ni baraquement. 24 000 prisonniers se sont retrouvés là.

            -   Pour nous mettre à l’abri, nous avons creusé des trous dans la terre, en nous recouvrant tant bien que mal de mottes de gazon et de branchages.

 Il n’y avait aucune installation de cuisine et la mortalité était impressionnante. J’ai eu la chance de passer à travers les épidémies de choléra et de typhus. Après la fabrication des paillasses, tu seras affecté dans un  des détachements de travail, les « kommandos », dans les travaux publics ou chez les agriculteurs. 

Voilà où je suis.

Emma, merci de m’envoyer mon livre de poésies du XIXème siècle, un carnet à dessin et mes fusains.

 

Donne-moi des nouvelles de Marcel et de vous tous. Je vous espère en bonne santé.

Ton frère qui t’aime et qui t’embrasse.

 

                                                                          Henri Destal

 

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Rüdiger Wölk — photo taken by Rüdiger Wölk

 

 

 

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                                               Munster : le point rouge

 

 

           

                                                                                                                                                       

Alice est venue voir sa belle-sœur. Désormais, rue de la mairie, elle aura la grande chambre pour elle et pour Marcel. Fonfon prendra la petite chambre. Elle a déjà demandé l’aide d’Auguste pour aider au transfert des meubles. Elle est allée chez Tabanou, le menuisier, et y a trouvé un grand lit pour le confort du malade et elle s’apprête à monter chez Lamaurelle pour y trouver, peut-être, un sommier et un matelas aux bonnes dimensions. Emma n’a pas contrarié Alice : sa belle-sœur est tellement déterminée que rien, ni personne ne pourrait l’en dissuader.

 

Au pied de Montmartre, Angèle Lamaurelle a emmené Alice dans la réserve et, protégés sous des bâches, elles y ont trouvé sommier et matelas. Que du beau et du confortable pour Marcel ! C’est une aubaine pour tout le monde. Alice a, bien sûr, remarqué qu’Angèle est enceinte, un quatrième enfant va arriver en septembre. Cette vente inattendue va mettre du beurre dans les épinards. Dans la grande cuisine, elles se mettent d’accord sur le prix ; et, là, Alice entend et voit le bébé d’Yvonne installé dans son parc. Son sang ne fait qu’un tour... elle veut un enfant de Marcel ! Un enfant de Marcel, ce serait merveilleux. Auguste et un jeune de l’hôtel de la Poste passeront prendre les éléments du lit pour les emmener chez le patriarche qui, lui, ne dit toujours rien ; il est complètement dépassé. Le grand ménage de printemps a été fait, tout est prêt pour accueillir Marcel. Au prochain départ d’Emma pour Limoges, Alice la suivra...

 

 

Françoise Maraval     

 

 

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Les prochains billets 

 

Demain. Samedi A.G de l'A.N.A.C.R du Val de Nauze avec effacement partiel de la coprésidente sortante

Après-demain. Le billet de Jacques Lannaud abordera le problème des chutes : peut-on prévenir, évaluer le risque ?

Samedi. Les rendez-vous du  8 mai placés sous l'inquiétude d'une paix plus que largement menacée.

 



04/05/2022
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