Terre de l'homme

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C'était l'Hôtel et café du commerce.

MONPLAISANT-lez-FONGAUFFIER

 

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Le Barry

 

Le pâté de maisons.

 

 

L'inscription, tout juste lisible, "Hôtel et café du commerce. Gallon remise".

Image sauvegardée par les soins de Martine et Jean-Noël Lalue.

 

Dans la nuit, quand j'ai voulu valider "C'était l'Hôtel et café du commerce", je me suis rendu compte, avec une forte déception, que le billet que j'avais préparé avec des heures de recherche et d'écoute, par une fantaisie informatique, avait disparu. Ma déception fut grande. Je ne pouvais, en quelques heures, reconstituer cet assemblage. Je vais, cependant, tenter de revenir sur ce document détruit.

 

Les Barris à Périgueux et le Barry à Belvès ont le même sens mais une orthographie différente. Les barris, quartiers, ne prennent pas de majuscule.

Le pluriséculaire quartier fongauffiérain du Barry a pris une dimension nouvelle au XIXème siècle avec l'arrivée du chemin de fer. Aujourd'hui, volontairement, ce blog ne s'étendra pas aux maisons à colombages qui se détachaient de l'ensemble abbatial, ni à la filature qui a donné le la au village, pendant plus d'un siècle, et pas davantage à l'atelier de la chapelière qui a coiffé bien des personnes de ce creuset nauzérois. Ce billet sera concentré sur les maisons en bande qui, en leur temps, ont donné un signe de modernité à ce quartier, quand les routes n'étaient point bitumées. Pourquoi jeter un regard particulier à ces immeubles. Ils ont apporté au décor, lors de leur inscription, une note d'osmose familiale et laborieuse. On n'a jamais entendu dire qu'il y eut là, la moindre rivalité.

 

Qu'est-ce qu'un barry ? Certains, spontanément, relient cette terminologie à la favorite de Louis XV. Les barrys ou barries sont, dans la France du sud, des écarts attenants aux localités moyenâgeuses ou médiévales,  bien antérieurs aux frasques du monarque. Jeanne Bécu prit le titre de baronne du Barry par son mariage avec le comte Guillaume du Barry. Laissons là cette histoire tragique qui s'acheva sur l'échafaud avec une ultime sollicitation au bourreau.

 

Le billet de ce jour, je voulais le consacrer  au quartier du barry de Fongauffier. Il s'affirma au XIXème siècle, un peu avant que le chemin de fer épouse le sillon de la Nauze, pour aller de Paris à Tarbes, en passant par le Périgord et l'Agenais. Cette aventure ne fut pas sans ouvrir des polémiques. Les paysans disant que ces machines diaboliques allaient terroriser les ovins dans les pâtures et, même, allaient jusqu'à trouver un peu coquins, les coups de sifflets stridents qui étaient des hommages aux pastourelles.

 

Le pâté de maisons bordant la route départementale n° 11, qui deviendra la RN 710 de 1930 à 1972, aujourd'hui allée Joséphine Baker, s'affirmait avec sa rangée de demeures : celle du charron, celle du maréchal ferrant, tous deux aubergistes, tandis qu'au centre de celles-ci, la demeure du Dr Gallon, le vétérinaire du village, allait signer, au cours du XIXème siècle, une élégance qui garde son aspect de petite maison de maître.

Deux familles s'imposaient là. Les Laporte, avec la charronnerie associée à  l'auberge et les Gallon qui, eux, comptaient également une auberge couplée à l'atelier de maréchal-ferrant. Ce barry a connu une activité très intense lors des travaux d'implant du chemin de fer. Des tâcherons, ouvriers, terrassiers, maçons, artificiers et poseurs d'infrastructure avaient besoin d'un gîte pour le vivre et le couvert.

En 1863, le chantier terminé, il a duré 6 à 7 ans, il a fallu se  résoudre à vivre avec quelques lopins de terre et le commerce  cabaretier s'effondra. Le charron et le maréchal ferrant avaient pu acquérir quelques parcelles éparses sur les collines et la vie paysanne reprit son cours.

 

Notons deux profils plutôt hors du commun qui ont marqué le barry au XIXème siècle et XXème siècle. Le docteur Pierre-Paul Gallon, vétérinaire de son état, naquit au barry fongauffiérain, le 6 juillet 1861. Il y décéda le 25 janvier 1944. Il poursuivit ses études à Toulouse et son cursus fut élogieux. Pierre Gallon, naturellement, s'intéressa plus particulièrement aux chevaux. Il eut la chance d'être épargné par la Guerre de 14 mais il eut la terrible peine de voir son gendre, Clair Boidron, Fongauffiérain par sa famille maternelle, natif du Fouilloux, Charente-Maritime, enseigne de vaisseau de 1ère classe, second du sous-marin Ariane torpillé par deux fois. Il disparut en mer avec 20 autres marins, au large de Bizerte, le 19 juin 1917. Il avait 26 ans.

 

Patronyme Gallon.  Nom fréquent dans le Centre et surtout l'Ouest. Sans doute un nom de personne d'origine germanique, Wahlo (wahl = étranger). A noter cependant que la forme Galon, elle aussi fréquente, peut désigner celui qui fabrique des galons ou celui qui utilise l'ancienne mesure de capacité du même nom.

Le mariage à Saint Pardoux, le 18 mai 1847, de Marguerite Belinguier, son patronyme était identique au toponyme de son hameau, avec Pierre Gallon, maréchal ferrant et aubergiste au Barry de Fongauffier, a ouvert un bon siècle de petite histoire locale.

Patronyme Boidron : Nom surtout porté dans le Maine-et-Loire, présent aussi en Loire-Atlantique et en Gironde. C'est un diminutif de Boidier, lui-même variante de Bodier, Boudier, nom de personne d'origine germanique (Bodhari : bod = messager + hari = armée). Variante : Boisdron (49, 86, 79).

Source https://www.geneanet.org/

 

Marie-Louise, Marie Geneviève Gallon, épouse Boidron, la fille de Pierre Gallon, naquit à Limeuil, le  10 juillet 1890. Elle décéda à son domicile, à Fongauffier, le 11 avril 1971. Elle repose dans la sépulture familiale à Sagelat.

La famille Boidron, elle, vient de Haute-Saintonge. On trouve un Boidron qui fut chef de station à Château-l'Évêque, au P.O., au début du siècle précédent.

 

On notera que les prénoms sont souvent repris dans les familles... ce qui ne facilite pas les recherches.

 

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Le Dr Boidron fut, jusqu'à son décès, le passeur de mémoire des Gallon.

 

La famille Laporte, celle d'Albéric Laporte, eut l'immense joie de voir leur fille Odette devenir normalienne. Elle enseigna dans de toutes petites écoles rurales, dont Carvès, avant d'épouser un militaire limougeaud et de partir enseigner pendant une quinzaine d'années en Algérie. Elle revint dans l'Hexagone, enseigner dans des écoles urbaines.

 

Limiter la vie sociale de petit quartier aux personnages qui, par leur travail, ont été reconnus dans un cercle élitiste, serait grotesque, injuste et lacunaire. La vie était dans ce pâté de maisons, une vie laborieuse et les familles Laporte, Gallon et ensuite Boidron, certes, ont laissé bien des souvenirs mais d'autres familles les ont relayées. L'atelier de charronnerie s'est transformé en forge et, il n'y a pas si longtemps, jusqu'en 2008, Jean-Paul Ribière battait le fer. La demeure du Dr gallon, après avoir été l'habitat de sa fille, personne charmante et cultivée qui n'a pas été épargnée par la vie, est devenue un atelier cycliste, puis un atelier matelassier et enfin un logement privatif. L'ancienne maison du maréchal ferrant, aujourd'hui, n'entend plus les coups de marteau de l'atelier mais perçoit les coups de maillet de sa propriétaire énoiseuse.

 

Aujourd'hui, le barry ne compte plus de descendants des familles Laporte et Gallon mais ses actuels résidents entendent bien que leur pâté de maisons demeure vivant et bien vivant

 

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La rénovation de la façade a, bien entendu, emporté l'indication superbement gravée au charbon de bois "Hôtel et café du commerce suivie de Gallon remise". C'est une page de la petite histoire locale qui s'efface. 

 

Aujourd'hui, au Barry de Fongauffier, on n'entend plus les stridents coups de sifflet des 141 R qui prévenaient les agents de maintenance, de leurs passages dans les tranchées du Bloy. Les coups de klaxon des autorails diesel n'ont rien de cette puissance. 

 

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Ce billet a été rédigé grâce à la collaboration de Martine Lalue, pour la recherche photographique, Sylvia Fongauffier, secrétaire, Marie Praderie et Jean-Bernard Lalue, maire de Monplaisant, pour l'accès à l'état civil, de Lydie Garrigue, pour son regard de généalogiste, de précisions d'Alberte Maury et de son fils Denis, résidents du 44 allée Joséphine Baker.. 

Qu'ils en soient chaleureusement remerciés.

 

Malheureusement, la documentation détruite dans la nuit est bel et bien partie.

Les photos sont de Google et © de Pierre Fabre

 

Pierre Fabre



24/11/2022
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