L'amour est dans le pré
"Farmer wants wife".
Le fermier veut une femme, c'est le titre d'une émission anglaise dont la télévision française s'est inspirée.
Avouez que cete formulation manque de romantisme.
Au début la FNSEA trouva que l'émission donnait une mauvaise image du monde agricole. Le syndicat changea d'avis après le départ d'agriculteurs ridicules ayant des difficultés d'expression.
La mauvaise image est désormais gommée.
Je n'ai pas regardé cette émission pendant des années. Je partageais les griefs du journal "Libération" qui parlait de "bêtes de foire" qu'on exhibe à la manière des expositions internationales qui pendant des décennies ont mis en scène des indigènes de notre empire colonial. Je redoutais l'épreuve qu'allaient subir ces agriculteurs de nature pudique, peu habitués à étaler leurs sentiments surtout aux yeux de tous.
Pour faire court, je n'aime pas la téléréalité qui scénarise les rencontres au risque de faire perdre leur authenticité aux participants.
A mes yeux, les petites annonces, les agences matrimoniales, les clubs de rencontres, le spead dating dépréciaient un sentiment en le chargeant de calcul et de rationalité. J'avais sans doute trop lu Le grand Meaulne et La princesse de Clèves. Le coup de foudre lors d'une rencontre inopinée c'est l'exception.
J'ai cependant décidé il ya deux ans, de regarder cette émission qui dure depuis 15 ans et a une audience remarquable.
La plupart de mes griefs sont tombés.
La sincérité , l'engagement, le désir, l'amour, sont des thèmes souvent absents des réflexions sur l'agriculture.
Cette émission a pour ambition d'y remédier. Trop d'agriculteurs manquent de temps pour leurs loisirs, souffrent de solitude et voient leurs revenus baisser. La détresse est au bout du chemin. Il y a 30% de célibataires de plus que dans les autres professions mais Karine Lemarchand est là, mutine, espiègle pour mettre ses invités à l'aise, deviner leurs pensées, devancer leurs attentes et sourire quand la maladresse vient perturber le jeu de la séduction.
L'amour, comme le bonheur, est dans le pré.
Et qu'en est-il du mariage dont La Rochefoucauld disait : "Il y a de bons mariages, je n'en connais pas de délicieux" ?
L'homme de lettres avait la dent dure. Nous serons plus indulgents.
Imaginons la dernière séquence d'un film où l'agriculteur, sur son tracteur, verrait à l'autre bout du champ s'avancer vers lui une jeune femme tenant une fillette par la main et qui lui dirait : "Je vous trouve trés beau".
Pierre Merlhiot
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