Miscellanées ou passer du coq à l'âne
Le thème de l'eau est récurrent dans Terre de l'homme comme il le fut dans Terres de Nauze. Il est si souvent évoqué qu'on pourait nous faire le procés de surenchère. Il n'en est rien. L'eau mérite cette attention. Si j'étais malicieux je rapporterais les propos du Président Mac Mahon qui en 1875, visitant les villages submergés par la Garonne en crue et lassé par le discours interminable du préfêt, s'écria " Que d'eau ! Que d'eau ! ". Ce à quoi le préfet répondit " Et encore vous ne voyez que le dessus".
Mac Mahon était coutumier du fait : visitant l'école polytechnique, il s'adresse ainsi à un élève " C'est vous le nègre ? C'est bien continuez ". Il est vrai que cet élève était guadeloupéen et que le mot nègre désigne en argot le major de promotion.
De Gaulle, qui pourtant maîtrisait remarquablement ses discours, au cours d'une visite en province, dans un élan d'enthousiasme s'écria " Je salue Fécamp, port de pêche et qui entend le rester".
Je cite ces anecdotes à dessein car il n' y a pas meilleur remède que l'humour; même involontaire pour atténuer notre anxiété qui est exacerbée par la crise sanitaire, les attentats et le comportement de nos amis anglo-saxons.
On ne parle plus du Brexit mais, en silence le Royaume-Uni s'apprête à nous quitter. Déjà en 1756 l'académicien Jean-François Marmontel se lamentait :
Anglais vous fûtes grands dans vos malheurs passés
De notre estime enfin, vous êtes vous lassés ?
Ce pays, berceau de l'humour, je m'y suis rendu pour la première fois en 1950.
Je bénéficiais d'une bourse pour améliorer mon anglais, avec le boom démographique, notre pays allait avoir besoin de professeurs. C'est ainsi que je me retrouvais dans un pays qui commençait à se remettre de la dernière guerre : guerre encore présente dans les esprits et dans les ruines de certains quartiers. A mon arrivée sur le quai de la gare Victoria, je fus agressé verbalement par des cheminots qui reprochaient aux français d'avoir retardé l'évacuation de Dunkerque.
Londres : le Blitz
Arrivée des allemands à Dunkerque après l'évacuation des soldats alliés (338 226 hommes)
Grâce à l'Armée du Salut je trouvais refuge dans un abri anti-aérien. Peu de temps après, j'occupais un emploi d'ouvrier agricole dans le Yorkshire. Je ramassais des pommes de terre pendant 2 mois hébergé dans un ancien camp de prisonniers de guerre italien. Nous mettions à profit le dimanche pour nous détendre au bal du village : bal singulier à nos yeux de Français car il commençait et se terminait par le 'God save the queen", danseurs et danseuses au garde à vous. En dehors de ces deux instants de solennité, nous tirions profit d'une coutume inconnue en France : les "Excuse me dance", danses au cours desquelles, après un délai raisonnable, nous pouvions, en toute impunité et sécurité, enlever une cavalière à son cavalier.
Dans ce pays mes surprises n'en restèrent pas là. Je fus convié par deux vétérants, l'un, ancien pilote de bombardier me raconta, qu'à court de bombes, il jetait des canettes de bière, une lame de rasoir dans le goulot : leur sifflement était censé effrayer l'ennemi. Le 2ème, chimiste, avait reçu une bourse d'un grand laboratoire pour s'assurer qu'une tombe, déterrée par une bombe était bien celle de la princesse qui devait épouser l'un des deux princes Edouard ou Richard appelés à monter sur le trône. Tout deux furent assassinés dans la tour de Londres en 1483. Et pour faire bonne mesure, au moment du dessert, il posa sur la table un bocal contenant les cheveux de la princesse.
Les anciens combattants adorent raconter des histoires. Je ne suis pas sûr de vouloir y échapper mais à cette époque, je venais d'avoir 18 ans (toute ressemblance avec la chanson de Dalida ne peut être que fortuite.
Ce périple de 2 mois en Angleterre, à défaut d'être studieux m'a permis de comprendre pourquoi ces gens avaient tenu bon pendant le blitz avec son flegme et la haute idée qu'ils se faisaient de leur pays.
Cette Angleterre que j'ai connue, que je regrette et qui nous sauvés de la défaite s'apprête à nous quitter, cédant à son tropisme qui l'attire vers le grand large, méfiante envers le continent.
Ce n'est pas nouveau, écoutez ce que disait Shakespeare dans Richard II et dont je vous donne ma traduction:
Ce trône royal des souverains,
Cette île en forme de sceptre,
Cette terre de majesté,
Ce siège de mars,
Cet autre eden, demi-paradis,
Cette forteresse construite pour elle-même,
Contre la contagion et la main de la guerre,
Cette race d'hommes heureuse,
Ce petit monde,
Cette pierre précieuse,
Enchassée dans la mer d'argent qui lui sert de rempart,
Ou de motte castrale qui défend le château,
Contre la jalousie de terres moins heureuses,
Cet endroit béni des dieux,
Cette terre,
Ce royaume,
Cette Angleterre
Cette pièce fut écrite en 1595. Tout est dit.
PS : La Tamise, fleuve ou rivière?
Fleuve à tous égards. La marée remonte sur 90km au-delà de Tower Bridge,
pont basculant qui permet la remontée de gros navires
Pierre Merlhiot
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