"Much ado about nothing " Shakespeare
Much ado about nothing
Beaucoup de bruit pour rien
On serait tenté d'adopter le titre de la pièce de Shakespeare pour évoquer le psychodrame qui, régulièrement, depuis quelques mois, agite la classe politique si le contentieux ne portait pas sur le sujet le plus important de notre génération : la défense de l'environnement et par là même la survie des êtres vivants. L'écologie, tel est le mot. Ce mot fait l'unanimité, alors pourquoi ces querelles ?
On s'accorde sur le diagnostic, on s'oppose sur les remèdes.
En septembre 2020, le maire de Lyon fait savoir qu'il souhaite la suppression du Tour de France ( machiste et polluant).
Le 11 septembre 2001, le maire de Bordeaux décide de supprimer le grand sapin de Noël.
Le 4 mars 2021, la maire de Poitiers retire les subventions à deux aéroclubs.
A première vue, rien de répréhensible : ces trois décisions débouchent sur des économies et une pollution moindre. C'était sans compter, que pour un gain minime, on s'attaquait là à des symboles auxquels les Français sont très attachés. Fallait-il, dans ces villes conquises, inaugurer une politique écologique nouvelle par trois interdictions qui pouvaient paraître comme punitives ?
Cela dit, les cris d'orfraie poussés par l'opposition, par leur outrance, laissent à penser que cette émotion surfaite traduisait surtout le désir de tirer, de ces maladresses, un bénéfice électoral. Que penser de la proposition du ministre délégué au transport d'attribuer la légion d'honneur au président des aéroclubs ? La légion d'honneur serait-elle un hochet destiné à compenser les déconvenues de nos concitoyens. J'ai, par ailleurs, le plus grand respect pour ces aéroclubs qui forment de futurs pilotes. J'ai personnellement eu le plaisir, de prendre lors de mon service miliaire, des leçons avec un ancien mécano de Guynemer.
Les trois maires écologistes ont un peu donné le fouet pour se faire battre. Les deux premiers contentieux remontaient à quelques mois, c'est le dernier qui a fait déborder le vase. " C'était mon rêve d'enfant de prendre l'avion pour aller au bout du monde mais je pense que vous ne vous rendez pas compte des rêves dont on doit préserver les enfants. L'aérien, c'est triste. Il ne doit pas faire partie des rêves d'enfants d'aujourd'hui". Ainsi, parlait la maire de Poitiers. Se rendant compte de sa maladresse, elle tenta de se racheter : "Et il ne s'agit pas non plus de remettre en question les grands imaginaires qui ont structuré notre imaginaire. Trop tard, le mal était fait. On ne s'attaque pas aux rêves, surtout à ceux des enfants. Pour chimériques que soient certains rêves, ils sont les garants de notre équilibre.
le songe d'Icare de Sergueï Solomko
S'en tenir à une approche purement didactique de l'écologie, n'entraîne pas nécessairement l'adhésion, cela fait des années que le diagnostic de notre planète est fait, que les remèdes sont connus et, cependant, l'appel à la raison n'est pas suffisant.
Deux jeunes chercheurs l'ont fort bien compris, qui proposent de réfléchir à une autre approche de l'écologie : Baptiste Morizot avec son livre "Manières d'être vivants" (janvier 2020) et Aurélien Barrau avec "Le plus grand défi de l'histoire de l'humanité". Tous deux universitaires de haut niveau, sans s'être concertés, font appel à la poésie qui, elle, n'est pas contrainte par les carcans d'une pensée héritée et qu'avec elle "il y a toujours quelqu'un au bout du fil".
C'est Aurélien Barrau, astrophysicien au CNRS, docteur en philosophie et fervent militant de l'écologie, qui devant le désespoir et le désarroi de ses collègues climatologues et biologistes, impuissants à se faire entendre, leur suggère " reste le choix d'être poète ". Mais qu'on ne s'y trompe pas, cette poésie a tous les attributs de la science, l'imagination en plus "La poésie n'a rien à voir avec la beauté, moins encore avec le charme mièvre de quelques douces métaphores ou de tendres allégories. Elle n'est ni un divertissement, ni une distraction. La poésie c'est la précision, c'est à la fois la maîtrise souveraine de la grammaire, l'humble soumission à la syntaxe et le droit, presque le devoir de réinventer la langue....Elle cherche à connaître et à comprendre ....elle débute par une exploration patiente et savante du réel."
On n'attendait pas la poésie sur ce terrain-là et, cependant, si cette nouvelle approche peut conforter d'autres approches défaillantes, il ne faut pas la récuser. Rappelez-vous, de nombreux articles de Terre de Nauze et de notre blog, ont évoqué la prescience, le côté visionnaire de certains poètes :
"Et j'ai vu quelques fois ce que l'homme a cru voir " Arthur Rimbaud (Le bateau ivre)
"Je sais pourquoi là-bas un volcan s'est rouvert" Gérard de Nerval (Myrto)
Loin des querelles partisanes, notre blog et avant lui Terre de Nauze ont consacré de nombreux articles à la défense de notre environnement. Michel Ribette continue à défendre la cause de l'eau et des oiseaux. Pierre Fabre n'a de cesse de faire l'inventaire exhaustif de notre patrimoine naturel et bâti...
Il n'y a pas de petites causes : sauver un oiseau, préserver un ruisseau, un arbre (fut-il de Noël), c'est important. Mais si j'ai choisi à dessein le titre "Beaucoup de bruit pour rien", c'est que l'écologie n'a rien à gagner à s'engager dans des querelles qui, souvent, se terminent par des effets de manche.
Pierre Merlhiot
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Image Chez Daphnée.com
Demain et après-demain.
L'ordre séquentiel pourra être inversé.
De la capitale à la savane africaines, par Jacques Lannaud.
La richesse de la promenade des deux rives, elle nous autorise un regard sur les pas de nos ancêtres.
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