18 mars 2021, 150 ans de la Commune de Paris
Louise Michel
Chaque fois que je vais à Paris, je ne sais quel tropisme me ramène à la Butte aux cailles et plus précisément au 46 rue des Cinq diamants où se trouve le siège de l'Association des Amis de la Commune de Paris qui vient de prêter 24 tableaux thématiques aux Archives départementales de la Dordogne pour une exposition sur la Commune de Paris.
C'est qu'en ce lieu, aujourd'hui paisible, s'est déroulée une des batailles les plus féroces de la semaine sanglante (24-25 mai 1871).
Barricade lors du soulèvement du 18 mars 1871 : riposte des révolutionnaires parisiens à la décision du gouvernement d'Adolphe Thiers de leur retirer leurs armes et leurs canons.
Qui pense encore au conflit contre les Prussiens, à la guerre civile qui s'ensuivit ? Nous n'avons plus de renseignements de première main, notre connaissance est purement livresque. Tout au plus, en Dordogne, sept monuments et plaques de rue ( rue des Mobiles de Coulniers) nous rappellent les morts de ces deux guerres tombées dans l'oubli. Ajouter à cela, un poème de Rimbaud :"Le dormeur du val " et une nouvelle de Maupassant, "Les deux amis", ces quelques éléments ne sont pas de nature à exprimer la double tragédie que vécut notre pays et qui se terminèrent dans le sang, dans une violence inouïe, en l'espace de quelques semaines.
Napoléon III porte une très lourde responsabilité en déclarant inconsidérement la guerre à la Prusse, avec une armée non préparée, défaite en l'espace de six mois (juillet 1870 -janvier 1871).
Le patriotisme du petit peuple parisien ne supporta pas cette défaite et se heurta aux Versaillais qui ne souhaitaient pas poursuivre le combat. La lutte fratricide s'engagea sous l'oeil goguenard des Prussiens qui se contentèrent de compter les coups et d'assurer le blocus de Paris afin qu'aucun insurgé ne s'échappe.
28 mai 1871 : La dernière barricade
Dès lors, la violence n'eut plus de limites, la règle fut la loi du talion. Au massacre des otages versaillais, répondirent ceux de la prison de la Roquette et du mur des Fédérés. Femmes, enfants, vieillards subirent le même sort que les insurgés sur les barricades. Ces tueries se déroulèrent dans un Paris en flammes : les Tuileries, l'hôtel de ville, le palais d'Orsay furent incendiés.
16 mai 1871 : destruction de la colonne Vendôme, symbole impérial honni
La France a connu des moments de grande violence : la Saint-Barthélémy, la Terreur, mais aucun n'égale en sauvagerie, la semaine sanglante du 21 mai au 28 mai 1871 qui fit plus de 20 000 morts.
Pouvait-on faire l'économie d'un tel désastre ? Je l'ai déjà dit, Napoléon III, pourtant échaudé par son échec militaire au Mexique, n'aurait pas dû déclarer la guerre à la Prusse qui en a profité pour s'ériger en empire. Le traité de Francfort (10 mai 1871) a amputé notre territoire de l'Alsace, d'une partie de la Lorraine et des Vosges et nous a obligés à verser un tribut de 5 milliards de francs or.
A partir de ce moment-là, la III ème République ne songea qu'à sa revanche. Elle l'obtint en 1918. L'Allemagne trouvant les clauses du traité de Versailles, excessives (28 juin 1919) se réarma progressivement et entra en guerre en 1939. On connaît la suite.
Enfants du peuple
De toutes les révolutions : 1789-1830-1848, de nombreux historiens pensent que celle de la Commune fut la plus authentique. Je ne suis pas loin de partager cet avis.
S'il me fallait retenir un seul nom comme symbole de la Commune, ce serait celui de Louise Michel : enseignante, elle participe à la Commune de Paris en 1ère ligne, elle est déportée en 1872 en Nouvelle-Calédonie avec 10 000 autres insurgés. Elle en revient en 1880 et poursuit son action en faveur des prolétaires en dépit de plusieurs emprisonnements. Elle eut le soutien de Victor Hugo et de Georges Clémenceau. En 1905, c'est plus de 100 000 personnes qui, sur 14 kilomètres, pendant 4 heures, accompagneront à sa dernière demeure, cette figure mythique de la Commune, derrière un corbillard de 7ème classe (corbillard des pauvres).
Paris repris par les Versaillais Adolphe Thiers, chef de l'Etat
Les guerres n'épargnent personne. Je pense à la nouvelle de Guy de Maupassant "Les deux amis" (1883) : Pendant le blocus de Paris, deux amis insouciants du danger, vont à la pêche, s'aventurent sans le savoir au-delà des lignes prussiennes, sont arrêtés, pris pour des espions et fusillés sur le champ.
On aimerait avoir la certitude que les morts de la Commune ne sont pas aussi dérisoires.
Je sais maintenant pourquoi je reviendrai à la Butte aux cailles.
Pierre Merlhiot
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