Ce laboureur de la Forêt barade, depuis longtemps, ne siffle plus.
S'il est une terminologie dans notre société qui, si elle n'existait pas, imposerait sine die sa création.
Étymologie de démanteler. Probablement formé à partir de emmanteler avec substitution de préfixe de em- en dé-, formé à partir de mantel (Xe siècle), ancienne forme de manteau. Apparaît d'abord au XVIe siècle pour signifier détruire des fortifications, puis vers le XIXe au sens figuré de abattre.
démanteler , verbe transitif
Les décideurs, bien sûr, sont les chantres du démantèlement mais ils ne sont pas les seuls. Nous sommes cependant tous directement ou indirectement, par laxisme, indifférence ou manque de logique des acteurs indirects du démantèlement. Les décideurs, en haut lieu, bien sûr sont d'une totale insensibilté parce qu'ils ne se sentent concernés qu'au Xème degré. On peut concevoir qu'un haut fonctionnaire n'ait, pour la sauvegarde de l'école publique de "Trie-Fouilly-les-Oies" ou pour la maternité de "Villeneuve-les-Oubliés", où les premiers cris deviennent de plus en plus rares et espacés, qu'une perception d'énarque sauf si sa fille ou belle-fille doit accoucher dans une localité perdue au milieu de Nulle Part.
Le démantèlement concerne avant tout et surtout les services publics. Ils disparaissent les uns après les autres dans le tissu rural. Le démantèlement est perceptible et visible par la renonciation de nombre de conseils municipaux à transmettre intégralement le legs des chemins ruraux en concédant ceux-ci aux riverains ou en fermant les yeux sur les appropriations irrégulières. Le démantèlement, c'est aussi l'abandon des fontaines publiques -et tant d'autres choses considérées comme obsolètes- que nos collectivités n'ont pas jugé utile de sauvegarder impérativement. Heureusement, fort heureusement, il y a des élus locaux qui s'opposent à tout démantèlement. Pour ne pas en encenser quelques-uns en en oubliant d'autres qui ont la même vivacité d'esprit... et d'action cet article n'en citera pas, ils se reconnaîtront,
Les lignes de chemin de fer secondaires et déficitaires sur l'autel du sacrifice.
Un exemple des plus impressionbnants de démantèlement c'est celui du résau ferroviaire et des dessertes routières par les transports publics dans nos campagnes. Ces réseaux n'ont pas pu, ni su, faire face à l'individualisme.
Aujourd'hui ce billet va faire une immersion dans les siècles antérieurs en abordant l'extraordinaire chantier de la toile d'araignée ferroviaire.
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Cette toile qui, pour la majorité de son montage, découle de l'oeuvre de Freycinet. Elle pêchait par diverses faiblesses. Celles-ci ont hypothéqué la présence ferroviaire au cours des siècles qui ont suivi. Freycinet, de la génération d'Haussman, se heurta, en son temps, plus qu'à la faisabilité à l'obstacle du pouvoir qui ne voulait surtout pas d'un système unique dont l'hégémonie aurait pu ébranler la puissance de l'État et faire peur aux grands bourgeois qui entendaient se partager cette manne providentielle. Deuxième faiblesse la multiplicité des gares parisiennes. Elle écarta la symbiose d'une connexion au système tandis que nos voisins germaniques construisaient des gares hauptbahnhofs [H.B.F], soit des gares centrales. Paris compta jusqu'à 7 gares têtes de ligne bien distinctes. En province on a vu des "scissions" ferroviaires dont la plus signifacative fut Bordeaux avec Bx-Bastide qui était la gare tête de pont de l'Ètat, Bx Saint Louis, la porte du Médoc et bien entendu la grandiose gare Saint Jean. |
Charles de Freycinet, naquit le 14 novembre 1828 à Foix. Il décéda le 14 mai 1923 à Paris. Ce fut d'une part un brillant homme d'État et, d'autre part, un ingénieur français dont un audacieux plan porte son nom.
La rupture de charge fut un handicap logistique fort dommageable. La toile d'araignée de Freycinet épousa, dans son esprit, l'Étoile Legrand. Elle tenait à favoriser un pivot naturel parisien et contraria grandement les grandes transversales.
Enfin, cerise sur le gâteau, si l'on s'autorise de le dire, le plan Freycinet fut un schéma politique. Il maillait l'hexagone en recherchant si possible, en premier lieu, les villes chefs-lieux de département, puis les chefs-lieux d'arrondissement et, in fine, il prévoyait d'atteindre la presque totalité des chefs lieux de cantons. Ce dernier point n'a cependant pas été finalisé. On n'a donc pas amené le chemin de fer à Monpazier, Domme ou à Bussière-Badil.
Au final, l'objectif de Freycinet sera presqu'atteint puisque seulement trois sous-préfectures n'ont jamais eu de gare : Sartène en Corse, Barcelonnette et Castellane dans les Alpes-de-Haute-Provence ; bien que la desserte de ces deux dernières villes soit prévue dans la loi.
Revenons à nos moutons et jetons un regard ferroviaire sur le Périgord avec, naturellement, une attention particulière sur le Pays de l'homme.
La ligne qui prit le nom d'Angoulème à Sarlat, en fait était une addition de segments. Le premier du Queyry-Pranzac à Thiviers, le deuxième une section de la ligne de Thiviers à Saint-Aulaire, localité corrézienne, le troisième le court segment de la ligne d'Hautefort à Terrasson, auquel il fallut ajouter un tronc commun de la ligne Coutras-Tulle de Terrasson à Condat - Le lardin, et enfin la jonction de cette de cette transversale à l'autre, plus au sud, Siorac - Cazoulès.
Cette ligne nous venait du Queyroy-Pranzac, à une quinzaine de kilomètres d'Angoulème, d'où partaient certains trains. Dans la Charente elle desservait Chazelle et Marthon avant d'entrer en Dordogne où elle desservait Varaignes, Javerlhac, Saint Martin le Pin, Nontron, St Pardoux-la-Rivière, Milhac-de-Nontron, St Jean-de-Côle, Thiviers, Corgnac-sur-l'Isle, Excideuil, Cherveix-Toutoirac, Hautefort, Coubjours, Villac, Terrasson puis Condat-le-Lardin.
La ligne parcourait l'est de la Forêt barade. Aubas, Montignac, Saint Amand-de-Coly, Saint Genies, Salignac, Proissans, et La Croisx-Rouge, avant d'atteindre Sarlat, en étaient ses jalons.
La ligne est concédée à titre définitif par l'État à la Compagnie du chemin de fer de Paris à Orléans (PO) par une convention signée entre le ministre des Travaux publics et la compagnie le . Cette convention est approuvée par une loi le suivant.
Le service voyageurs fut interrompu le , la ligne est fermée le et déferrée en 1955. Son effacement se réalisa par étapes au court des années 50.
À Sarlat elle s'effaçait pour une huitaine de kilomètres jusqu'à Carsac où, là, elle renaissait vers le Quercy en passant par Groléjac, Saint Cirq-Madelon et Peyrignac avant d'atteindre Gourdon.
MONTIGNAC
Par photographe de la belle époque — Carte postale de 1905, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=55031114
Dans sa courte vie cette gare a, bien des fois, reçu dans sa salles des pas perdus un des chantres du Périgord. Eugène Le Roy, là, prit le train dans cette gare vers la fin de sa vie.
Ligne de Condat - Le-Lardin à Sarlat. |
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Entre Condat et Sarlat | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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Historique | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Fermeture | Ligne fermée | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Caractéristiques techniques | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Numéro officiel | 627 000 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Écartement | standard (1,435 m) | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Nombre de voies | Voie unique | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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Précisons pour la compréhension des lecteurs que les distances en mètres, au regard de chaque gare, indiquent la longueur de la voie principale en gare. Celle-ci éclairait les opérateurs sur les facultés de croisement.
Le maillage fort dense fut-il une erreur due à des prévisions follement disproportionnées, à des ambitions démesurées ou, tout simplement, à un manque d'outil de connaissance du marché.
Avec le recul on pourrait dire c'est un peu de tout cela. De nos jours les experts qui connaissent, ou croient connaitre, parfaitement le marketing*, [la mercatique terminologie française n'a pas pris ou ferait précieux, voire "attardé", pour les locuteurs qui l'emploieraient], guident les décideurs dans leurs choix de prise de part de marché. À l'époque de Freycinet les décideurs étaient plus préoccupés par la réalisation des grands chantiers que par la cohérence de leurs projets et encore moins de l'amortissement financier de leurs réalisations.
L'histoire est là pour nous relater leurs ambitions, parfois leurs imprévoyance, leurs erreurs de projection, mais aussi l'extraordinaire vision qu'ils avaient, avec les outils d'appréciation de leur temps, pour désenclaver la ruralité profonde.
Les exemples d'égocentrisme ne manquent pas. Ils sont toujours là de nos jours pour nous révéler que le poids des ténors de la vie publique a joué, par exemple, pour que la plateforme T.G.V s'impose à Lille, en ajoutant plusieurs dizaines de kilomètres à l'axe Paris-Londres.
Un regret.
La ligne Angoulème - Sarlat qui, avec son appendice Sarlat-Gourdon, connectait deux axes majeurs sillonnait notre Périgord, saluait bien des villages et, il faut le dire, se soustrayait à la focalisation radiale. Était-elle "viable" ... manifestement, au regard de sa courte histoire, non !. Combien de personnes, le matin en se levant, à Terrasson pensaient aujourd'hui je vais aller à Sarlat ? L'activité de ce bassin de vie suscitait-elle l'espérance de longs et, rationnels et fructueux convois de fret, à l'époque on disait marchandise, certainement pas.
Les coûteux et impressionnants travaux d'infrastructures ont-ils fait l'objet d'études sérieuses de "rationalisme" de leur réalisation ? Avec le recul il parait permis d'en douter. Ce gigantesque chantier nous laisse quelques vestiges ça et là mais, bien entendu, les personnes qui ont porté cette réforme sociétale presque bi-séculaire pensaient qu'elle devait s'inscrire dans la durée.
Aujourd'hui si cette ligne avait pu échapper à l'autel du sacrifice combien de nos concitoyens l'emprunteraient alors que là où la rapidité, la sécurité et le confort sont au rendez-vous beaucoup veulent l'ignorer.
* Le marketing, ou la mercatique, est une culture organisationnelle, un état d’esprit, qui cherche à privilégier les attentes et les besoins des parties prenantes de cette organisation par rapport aux attentes et besoins des membres de celle-ci.
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