Terre de l'homme

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Des Hauts du Nord aux rives de la Seine ( Partie I )

 

Jacky L Délaissant provisoirement la lointaine Ethiopie de son enfance, Jacques Lannaud nous convie à effectuer un voyage dans le Nord de la France.

 

 

 

 

Sur le chemin, les vastes étendues de friches, pâturages, champs, bosquets, cours d’eau, canaux se succèdent, des horizons plats que le vent balaye sans merci une bonne partie de l’année, champs propices pour éoliennes, que de faibles ondulations collinaires ponctuent à intervalles obligeant le conducteur à ne pas rater les quelques virages afin de poursuivre tout droit vers cet horizon sans fin qui se perd dans une brume légère d’évaporation.

Voilà qu’apparaissent les traces indélébiles de cette civilisation industrielle des XIXème XXème  siècles, les marqueurs de l’histoire de ces milliers de gens, ces " gueules noires " qui travaillèrent sans relâche, jour et nuit, pour extraire ce charbon si profond sous terre, dans un air vicié par les poussières qu’ils respiraient à plein poumons. Travail, ô combien éprouvant, usant, facteur de cette horrible silicose qui raccourcissait inexorablement leur souffle et la durée de leur existence.

 

 

 

corons
terril

 

 

                                  Corons                                                      Terril     

 

Leur visage ponctué de poussière noire incrustée dans la peau, bon nombre d’entre eux se sont éteints dans ces petites maisons de brique juxtaposées, les corons, qui défilent le long de la route, dans les affres d’un souffle court, inefficace dont la thérapeutique médicale d’alors n’avait pas les moyens de relever les défis. A la vue de ces terrils au faîte conique, de couleur sombre, sur lesquels quelques arbustes courageux ou des herbes folles s’agitent, la magnifique chanson, obsédante de Pierre Bachelet, envahit mon esprit :

Au Nord, c’étaient les corons

La terre c’était le charbon, le ciel c’était l’horizon

Les hommes des mineurs de fond.

Et j’avais des terrils à défaut de montagnes,

D’en haut je voyais la campagne, Mon père était « gueule noire » comme l’étaient ses parents

Ma mère avait les cheveux blancs

Ils étaient de la fosse comme on est d’un pays

Y avait à la mairie le jour de kermesse une photo de Jean Jaurès

Chaque verre de vin était un diamant rose posé sur fond de silicose

Ils parlaient de 36 et de coups de grisou, des accidents du fond du trou

Ils aimaient leur métier comme on aime un pays, c’est avec eux que j’ai compris ;

Au Nord c’étaient les corons….

 

Mais, au fur et à mesure, nous quittons cet attachant pays de Flandres, nous nous enfonçons dans cette attrayante région qu’est le Bassin parisien fait de vastes plaines, collines et plateaux de faible altitude, un paysage sédimentaire. Nous venions de laisser derrière nous les collines de l’Artois le séparant de la plaine flamande, limité à l’ouest par le massif armoricain, il est séparé de notre Aquitaine par le seuil du Poitou et repose sur de la craie du Crétacé Supérieur. Et, cette craie très étendue posséde une forte porosité, de nombreuses fissures, c’est une craie karstique dans laquelle se situe un aquifère qui fournit 11à 12 milliards de m3 d’eau/an.

Maintenant se présente le pays de Caux délimité au Sud par la Seine, occupé au départ par la tribu des Calètes, conquis par Jules César en 56 av. J.C. et, ensuite occupé par les Francs où se développa le monachisme médieval au sein d’importantes abbayes et monastères.                                                 

En aval de Rouen, la Seine se prélasse, coule sans se presser, les marées se font, encore, sentir et le fleuve est d’une largeur impressionnante, s’étale dans des méandres gigantesques qui forment des boucles, lacif comme un immense serpent assoupi sous le chaud soleil de Juin. Fleuve majestueux ayant creusé son lit dans cette tendre craie à la suite de la fonte des glaces quaternaires dont les eaux furieuses et torrentielles ont créé la voie, se heurtant à la résistance de roches dures qu’elles ont contournées en inversant leur cours. Longues courbes sinueuses avant l’immense estuaire où se jette le fleuve. Là c’est quasiment une petite mer que l’on découvre depuis le haut tablier du magnifique pont de Normandie qui enjambe le fleuve. Sur la rive droite, au loin, se trouve le grand port du Havre, sur la rive gauche la délicieuse ville d’Honfleur où naquit le compositeur Eric Satie connu pour ses célèbres Gymnopédies…

Mais, le voyage se poursuit là où je voulais revoir sur cette rive droite, en aval de Rouen, cette boucle l’une des dernières. De là, débouchèrent le 24 Mai 841 ces fameuses embarcations, ces drakkars, toutes voiles déployées, remontant la Seine et dont les occupants, les vikings se livrèrent à un des premiers saccages de la basse Seine.

 

 

Jumiège 1
jumiège 2

 

 

                                            La grande abbaye normande de Jumièges

 

A cet endroit, s’élèvent, encore, à une hauteur vertigineuse, le splendide squelette architectural de pierre blanche de la grande abbaye normande de Jumièges, d’inspiration romane, fondée en 654 par la volonté de Clovis II et de son épouse Bathilde, confiée au moine Saint Phillibert. Vers 700, c’est un lieu prospère où de nombreux moines et compagnons ont défriché les terres qu’ils ont transformé en jardins, vergers, cultures céréalières, vignobles, pâturages où l’on fabrique de l’huile à partir de cétacés où l’hotellerie permet d’accueillir les voyageurs ou des gens en errance. D’un côté, le corps dépouillé de l’église abbatiale, entourée de deux tours octogonales qui culminent à 46m, une nef de 25m le tout communique avec l’église St Pierre par un passage vouté dit  « passage Charles VII » venu visiter cette ruine imposante.

Nous quittons Jumièges le cœur gonflé par la beauté du site pour Rouen en longeant le fleuve, peut-être, ancien chemin de hallage, les vikings le remontèrent eux sur leurs redoutables embarcations, le ventre plein à craquer de leur butin.

 

 

giverny

 

 

                                                              Giverny

 

Car, le véritable objectif de notre randonnée se situait en amont, au- delà de la cité rouennaise. Les champs , les bordures de route sont remplis de coquelicots et de fleurs printanières, le soleil matinal enveloppe la végétation d’une lumière diffuse et vaporeuse, voilà qu’apparraît le village du grand peintre qui a révolutionné la peinture, Giverny. Ce village de 479 âmes s’étire le lond des rives droites de la Seine et de l’Epte et, là, dans l’enclos paroissial de l’églse Ste Radegonde, nous découvrons la tombe de Claude Monet enfouie dans la végétation et les fleurs.

 

 

Jacques Lannaud

 

__________________

 

 

Demain. Mein Kampf [critique d'un ouvrage ô combien dévastateur et brûlant], par Pierre Merlhiot.

Jeudi. Retour sur Guy Ducoloné... avec son attachement affectif au Périgord.

 

À suivre.

Histoire de panneaux, P-B F  

Une critique citoyenne -mais pondérée- sur l'adressage,  en cours de mûrissement, P-B F 

 

 

À propos des personnages inconnus, si possible à associer à un lieu, ce blog est tout naturellement preneur de billets sur ces passeurs de mémoire avec une recherche plus particulière pour les profils féminins qui ont principalement œuvré pour l'intérêt général.

 

L'idéal étant de présenter des personnes qui se sont impliquées dans le bénévolat le plus désintéressé… mais cela peut être nuancé. Il n'est pas strictement nécessaire de pointer une recherche sur des personnages de la dimension de Joséphine Baker, elle serait trouvée au premier regard, mais des profils moins connus qui, dans la vie citoyenne, culturelle, sportive ou associative, font -ou ont fait- vivre une cause, le téléthon par exemple, un lieu de handicapés, la Résistance, une délicate mission environnementale, ou qui ont relancé des savoir-faire ancestraux, suscité la renaissance d'un hameau, remis en chantier des vieux métiers, etc, etc.

 

Adresser textes et photo(s) à :

 

catherinemerlhiot@gmail.com

 

 



30/06/2021
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