Terre de l'homme

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Du féminin, du masculin et du principe d’égalité

 

 

déclaration des droits

 

 

Récemment, le fondateur de ce blog, Pierre Merlhiot, dans un article fort bien documenté et rédigé (cliquez sur le lien pour lire l'article : Le masculin l'emporte sur le féminin) , a mis le doigt sur un sujet particulièrement brûlant : la prédominance du masculin sur le féminin en matière grammaticale. Or, cette règle que nous avons apprise par cœur et qui est un des fondements de la grammaire et de l’orthographe, est remise en question par des militantes de la cause féminine voulant faire évoluer la langue vers plus de simplification orthographique et une plus grande égalité de genre.

La féminisation de professions exercées par les femmes appelle, peut-être, à une identité mieux assumée : l’auteur, le docteur, le préfet, le professeur peut recouvrir un homme, une femme, vu que le mot recouvre les deux genres et ne permet de trancher avec certitude.

Alors, pourquoi ne pas féminiser : dire auteure, écrivaine, docteure ou le ou la médecin… pratiques qui peuvent, au début, choquer certaines oreilles qui admettent, plus facilement, étudiant -étudiante, préfet-préfète, jardinier-jardinière, cavalier-cavalière… policière-avocate-présidente, institutrice… coutumes ancrées dans le vocabulaire et dans nos ouïes, certaines autres moins bien perçues entraînant une moue désapprobatrice, non validées par la pratique, par des spécialistes un peu moins  misogynes que ceux du XVIIe siècle ou par des instances habilitées telles que l’Académie française qui n’ont pas, encore, pris tout le temps nécessaire pour régler ces questions, une fois pour toutes : faire évoluer les règles de grammaire ou les aphorismes, les adapter à la vie d’aujourd’hui. Car, inutile de dire que les femmes n’ont pas attendu pour secouer le cocotier, profiter d’une réelle autonomie ou une plus grande indépendance, s’immiscer dans la plupart des métiers ou professions libérales ou autres, tenant leur place fermement et prenant le dessus quand l’opportunité se présente, sur leurs collègues masculins.

Comme souvent, les instances chargées de toiletter, d’actualiser voire moderniser et enrichir la langue, la débarrasser d’aphorismes inutiles, ne ressentent pas la pression ou ne détectent pas l’impatience de certains acteurs féminins aux aguets.

La langue ou la grammaire en seraient-elles pour autant dénaturées ? Certes, il ne s’agit pas de trancher dans la précipitation, il faut se donner le temps car la structure, la charpente qui cimente une langue comme la nôtre, support d’une culture mondialement reconnue et parlée à travers des textes fabuleux et des poèmes tout aussi fabuleux, supports de notre sensibilité, de nos émotions intimes et partagées, sans cesse renouvelées, ne se prête pas à des modifications fondamentales sans une réflexion prolongée : il faut calmer le jeu, montrer que l’on cherche les solutions les plus adaptées à notre époque et songer qu’une langue, c’est, aussi, le reflet d’un peuple, de sa culture enrichie au fil des siècles, fruit de combats menés contre d’autres idiomes, qui s’est imposée dans un univers linguistique impitoyable.

 

plaque

 

 

                  Plaque de marbre à la mairie de Paris avec écriture inclusive 

 

L’apparition de l’écriture inclusive mobilise les passions d’un côté comme de l’autre. Les uns déclarant qu’on brouille les messages, que l’on complexifie la langue voulant en interdire l’usage dans les documents administratifs et pour que les personnes morales chargées d’une mission de service public, n’en fassent pas usage dans des textes destinés à être publiés au Journal officiel.

Les promoteurs déclarent que l’écriture inclusive favoriserait une plus grande égalité entre hommes et femmes, revaloriserait le genre féminin notamment la place de la femme dans nos sociétés modernes, qui n’a plus rien à voir avec le statut qui leur était réservé dans la société machiste du XVIIe siècle. Toutefois, de préconiser d’écrire « un-e apprenti-e, les ingénieur-es, les électeurs. rices, ou créatif-ive, ne me paraît pas être un réel progrès de l’écriture ni une simplification de l’orthographe.

On peut, à la rigueur, utiliser un mot englobant les genres : les élèves, les volontaires ou celles et ceux etc…

L’Académie française s’est penchée, cependant, sur la féminisation des fonctions, métiers, grades et titres, en février 2019 et l’aurait admis. Mais, des mots comme chef-cheffe ou cheffesse ou cheftaine… auteur-auteure ou auteuse, feraient, encore, débat.

Une autre règle est remise en question : le masculin qui l’emporte sur le féminin au pluriel, serait abandonné au profit de l’accord de proximité : « les villages et les villes sont belles… les pays et régions étrangères »

Après toutes les conquêtes obtenues au cours du XXe siècle, par les mouvements féministes : le droit de vote en 1944, l’avancée fondamentale sur la contraception , l’avortement, au cours des années 60, sur le divorce, ce nouveau combat en faveur de la grammaire et de l’écriture destiné à mieux tenir compte de l’égalité des sexes dans les textes, écrits officiels ou privés, l’atténuation et la simplification de règles grammaticales et orthographiques anciennes et un peu poussiéreuses permettrait, je pense, de repositionner le principe d’égalité et la place de la femme dans la société actuelle où elle a conquis sa place, grâce à ses qualités intellectuelles, relationnelles, ses compétences, son dynamisme et son humanité.

Après tout, ce n’est que pure reconnaissance et justice sociale fondamentales dans un pays qui, le premier au monde, a publié à la face du monde :

« Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen »

(Décrétés par l’Assemblée Nationale dans les séances des 20 21 24 et 26 Août 1789)

Article premier : Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits, les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune.

Peut-on dans ce cas, admettre que le mot « hommes » englobe les genres ? Sans doute, mais il aurait été bon de le formuler plus clairement. Car, à l’époque, on est bien obligé de constater que la Révolution n’a pas transformé le rôle social de la femme ni même les structures sociales de l’Ancien Régime dominées par le pater familias : la jeune fille reste soumise à la tutelle de son père, elle ne peut jouir de sa dot sans autorisation, veuve elle tombe sous l’autorité légale du Conseil de famille, adultère peut connaître arrestation et emprisonnement, le divorce est interdit…. Un tel progrès social ne représentait que la poursuite des conquêtes largement entreprises et menées à bien par la Révolution qui en aurait tiré un bénéfice de plus dans la droite ligne du siècle des Lumières.

 

 

Olympe de Gouges
madame Roland

 

 

               Olympe de Gouges                                                                Madame Roland

 

Il y eut des figures féminines célèbres au cours de la Révolution : Olympe de Gouges, Théroigne de Méricourt, Pauline Léon, Charlotte Corday, Mme Roland, Catherine Théot … elles ont su s’imposer et montrer toute leur adhésion à l’esprit révolutionnaire, malgré et en dépit d’une société masculine machiste n’hésitant pas à les traiter de « tricoteuses » ou de « furies de la guillotine ». Tout simplement, il serait temps de rétablir la dignité de ces femmes, de ces « pasionarias », non dénuées d’idées nouvelles et avancées.

 

Jacques Lannaud

 

 



22/12/2021
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