Terre de l'homme

Terre de l'homme

L'imprimerie typographie (suite et fin)

EVOLUTION DE LA TYPOGRAPHIE (suite et fin)

voir 1ère partie L'imprimerie typographie (21 octobre)

par Daniel Simon, ancien imprimeur typographe, passionné par son métier

 

 

Depuis sa création et jusqu’au 18me siècle, cette presse à bras en bois a très peu évolué, à part quelques ajouts et le renforcement de la charpente, la mobilité du marbre et un dispositif pour faciliter la marge des feuilles.

 

L’arrivée de la sidérurgie va faire évoluer considérablement l’impression typographique.

En 1772, une première presse en fer est construite par le suisse Wilhelm Hass, sur le modèle de la presse en bois. En 1807, Lord Stanhope construit une presse en fer et fonte où la pression est surmultipliée et d’une grande précision. Cette presse à platine va servir très longtemps et jusqu’au 20me siècle où elle sert encore de presse à épreuves.

presse 1

 

Elle sera progressivement remplacée par d’autres plus modernes et rapides, comme la presse à pédale à platine et marbre mobile de l’américain Geo Gordon, la « Liberty » en 1857, ou la « Minerve » de Berthier en 1862.

 

presse liberty

 

 

Presse « Liberty »

 

Au début du 18me siècle, la presse quotidienne prend son essor et demande de plus en plus de rapidité. Koenig et Bauer construisent une nouvelle presse qui imprime plus de 1000 feuilles à l’heure au lieu des 80 pour les anciennes presses. C’est une sorte de révolution dans l’imprimerie. Au lieu d’avoir une platine pour exercer la pression, c’est un cylindre, ce qui permet d’avoir la pression sur une ligne le long de ce cylindre, d’où à force égale, une bien meilleure pression sur une plus grande surface. De plus, cette presse est entraînée par un moteur à vapeur, l’encrage est automatiquement fait par des rouleaux recouverts de cuir.

 

presse Koenig

(Première presse à cylindre Koenig et Bauer)

 

En 1819, un pharmacien, le français Gannal, invente la pâte à rouleaux qui remplace le cuir et sa couture. La pâte est composée de gélatine animale, de mélasse et de glycérine ; moulée, elle donne des rouleaux « amoureux » de l’encre et qui déposent un encrage régulier sur la forme. Cette pâte à rouleaux a été remplacée bien des années plus tard, par le caoutchouc et le polyuréthane.

 

Ce type de presse sera repris par de nombreux constructeurs, au cours du 19me siècle, comme Marinoni, Alauzet, Voirin, avec des améliorations techniques pour l’encrage, la marge. Cette presse est dite « en blanc » parce qu’elle n’imprime qu’un seul côté de la feuille.

presse marioni

 

(Presse en blanc Marinoni)

 

Des presses dites « à retiration » seront créées pour imprimer des deux côtés, d’autres imprimeront en deux couleurs. Un margeur automatique sera inventé pour remplacer la marge à la main et augmenter la vitesse de production. Des presses encore plus modernes comme les presses allemandes « Heidelberg » seront construites jusqu’à la fin des années 1980, et auront la faveur de nombreuses imprimeries artisanales.

 

 

LA COMPOSITION

 

Depuis Gutenberg, les caractères ont évolué et, au cours des années, de nombreux fondeurs ont créé et gravé toutes sortes de polices de caractères. Cela va du « Gothique » de Gutenberg aux derniers caractères fantaisies, en passant par les « romains », les « antiques » ou caractères droits, les « égyptiennes ».

 

Les caractères mobiles sont alignés à la main dans un composteur pour former des lignes, justifiées également à la main. C’est un travail minutieux et la production est d’environ 1000 caractères à l’heure pour les bons typographes. Quand on imagine le nombre de lettres dans un journal quotidien, ou dans un livre, il fallait un nombre conséquent de compositeurs pour assurer la production et la remise en place des caractères pour un nouvel usage. De nombreux essais ont été tentés pour augmenter cette production manuelle, mais sans succès. En 1885, un américain Ottmar Mergenthaler imagina une machine qui compose des textes beaucoup plus rapidement, environ 10 000 caractères à l’heure. Un clavier appelle les matrices, avec le caractère en creux, les aligne automatiquement et justifie la ligne avant de fondre une ligne bloc en alliage de plomb. Cette composition sert pour l’impression et peut être refondue pour de nouvelles compositions, d’où un gain de temps considérable.

 

presse linotipe

 

(Linotype de Mergenthaler)

 

Ces « Linotypes » ont servi pratiquement pour tous les journaux et de nombreux livres. Un autre type de machine a servi, sur un autre principe, la « Monotype » où un clavier produit une bande de papier perforé qui commande une fondeuse, qui fond les caractères un à un et les aligne.

 

LES ROTATIVES

 

Jusqu’en 1811, le papier est fabriqué en feuilles à la main. L’invention d’une machine de fabrication en continu du papier, de Louis Nicolas Robert, va permettre de produire des bobines de papier. Les constructeurs se lancent dans la fabrication de rotatives, comme l’américain Richard M. Hoe, l’allemand Jacob Worms, mais c’est Hippolyte Auguste Marinoni qui livre la première rotative française au journal « La Liberté » en 1872, puis au « Petit Journal » et même une rotative quatre couleurs pour le « Supplément Illustré » en 1889.

 

rotative

 

 

 

(Rotative Marinoni de 1883)

 

Pour les machines à cylindre, la pression est cylindrique mais la forme pour les textes et les illustrations est plate, ce qui ne permet pas une vitesse très élevée. Une empreinte est prise sur la forme, le flan, elle est cintrée dans un moule et un alliage de plomb est coulé pour obtenir une coquille de la moitié du cylindre et deux coquilles par tour de cylindre, permettent aux premières rotatives d’imprimer jusqu’à 18 000 exemplaires recto-verso à l’heure.

 

La composition au plomb, l’impression typographique ont perduré jusque dans les années 1970.

Dans les années 1950, la première photocomposeuse la « Lumitype » des français Louis Moyroud et René Higonnet, remplace le plomb par le film. L’offset, dérivé de la lithographie, remplace l’impression typographique. Après 1970, pratiquement tous les journaux et catalogues sont imprimés par des rotatives offset, beaucoup plus rapides, où la coquille de plomb est remplacée par une plaque métallique photosensible, moins onéreuse et plus facile à produire. Le film photo est remplacé à son tour par le numérique et les ordinateurs remplacent tous les moyens et éléments utilisés en typographie et impriment directement en jet d’encre et impression laser. Les plaques offset sont directement produites sur les cylindres clichés des rotatives, réduisant ainsi les temps de réglages de la machine.

 

La typographie n’existe plus que dans des musées, pour des visites pour les enfants. Quelques passionnés dans de rares imprimeries continuent encore à la faire vivre pour des amateurs éclairés. Si Gutenberg revenait, il serait bien surpris de voir le parcours de son invention et de ce qu’est devenue l’imprimerie. Le progrès continue …

 

Le blog de Daniel Simon

http://blog-impressions-timbrees.blogspot.com/

 



27/11/2020
11 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 199 autres membres