"Le monde entier est un théâtre et tous, hommes et femmes, sont des acteurs" (Comme il vous plaira - Shakespeare)
masques grecs
Pierre Fabre a manifesté quelque déception quant à l'accueil fait à l'article "Les comédiens à reconnaître". On comprend son attachement à tout ce qui se fait de bien dans sa commune mais il ne doit pas être déçu, vu le nombre important de visites qui témoignent de la qualité et de la pérennité de cette troupe théâtrale créée, il y a des décennies.
Les éloges que recueille André Teilhaud, je les partage. Elle a, avec le concours de la population, été pionnière dans bien des domaines : théâtre, classes de découverte...
J'ai eu quelques fois, l'occasion de la rencontrer quand j'allais à Talissat. J'ai tout de suite eu le sentiment d'avoir affaire à une personne de qualité, discrète, d'une distinction et d'une élégance qu'elle montrait à la scène comme à la ville et Dieu sait s'il faut de cette élégance naturelle pour jouer Tchekhov ou Anouilh.
Molière
J'ai eu, dans ma vie, de rares occasions de me familiariser avec le théâtre. La première fut pendant la dernière guerre où la directrice de l'école, pour envoyer des colis aux prisonniers, faisait quelques recettes en nous faisant jouer des saynètes inspirées des chansons du célèbre chansonnier Georgius. Je ne résiste pas au plaisir de vous citer un couplet de la chanson "Au lycée Papillon" (1936).
On n'est pas des imbéciles
On a même de l'instruction
Au lycée papa, au lycée papa
Au lycée Papillon.
Il faut bien un commencement à tout.
Quelques années après, à l'école normale de Périgueux, je devais jouer une pièce d'Anouilh "Les rendez-vous de Senlis". Je ne sais pourquoi le rôle de jeune premier me fut retiré et l'on me confia celui de souffleur. Rôle dans lequel j'avais dû montrer quelque talent car, l'année suivante, je me retrouvai dans le trou du souffleur pour la pièce de Jules Romains "Le docteur Knock ou le triomphe de la médecine".
Je terminai ma carrière théâtrale dans mon premier poste d'enseignant avec la pièce de Labiche "Les 37 sous de monsieur Montaudoin". Je soupçonne d'avoir obtenu ce rôle grâce à la déférence que l'on avait habituellement en milieu rural à l'égard du Régent.
On voit bien par là que je n'aurais pas eu ma place dans la troupe de Sagelat où Andrée Teilhaud et ses amis faisaient salle comble.
Maria Casarès Gérard Philipe
Soyons sérieux, professionnel ou amateur sont tenus par des règles exigeantes et qui, souvent, vont à l'encontre de l'opinion commune qui pense que le succès de l'acteur est à mettre exclusivement au crédit de sa sensibilité et de sa spontanéité.
Bien au contraire, le paradoxe est qu'un acteur ne doit pas chercher à s'identifier à son personnage. Plus il joue de sang froid, plus il maîtrise sa sensibilité, plus il incarne son personnage. L'extrême spontanéité et sensibilité fait des acteurs médiocres. Le contrôle, la maîtrise sont seuls capables d'exprimer une émotion que l'acteur ne ressent pas. Cette idée que l'acteur doit prendre de la distance avec son personnage, sous peine de n'être plus crédible, Diderot l'exprime dans un livre célèbre "Le paradoxe sur le comédien" (1773-1777).
On retrouvera ce jeu subtil entre la réalité et la fiction, l'être et le paraître, dans la pièce de Pirandello "Six personnages en quête d'auteurs" (1921). Mais le théâtre, ce n'est pas que disserter mais "aller voir" (étymologie latine : theatrum , voir, admirer, contempler).
Théâtre La Font du Loup
Aller à Sagelat, à Saint-Cyprien, à Carves, au festival de Sarlat..., nous avons l'embarras du choix. C'est sans doute avec la musique, le théâtre qui nous procure le plus de plaisir, où à notre insu, le talent des acteurs fait d'une fiction une réalité.
Epidaure
Deux souvenirs personnels.
Par un beau soir d'été, en Grèce, dans l'immense amphithéâtre d'Epidaure, la pièce d'Eschyle "les Perses"
Par un soir d'orage, dans la cour du château de Caussade, une pièce de Cyril Le Tourneur (1575-1626) : La tragédie du vengeur. Une dizaine de cadavres sur la scène, un orage qui éclate, un public qui s'enfuit et des acteurs qui s'avancent sur le devant de la scène pour nous remercier, ma famille et moi, d'être restés, stoïques sous la pluie jusqu'à la fin de la pièce.
Théâtre élisabethain du Globe à Londres (créé en 1599)
"All the world's a stage and all the men and women merely players".
J'apprends qu'Andrée Teilhaud ne s'est pas retirée à Sagelat. Je ne sais où elle se trouve. Si d'aventure, vous la rencontrez, dites-lui tout le bien que nous pensons d'elle.
PS :
Croyez-vous que le président de l'Ukraine maîtriserait avec autant de talent, l'exercice du pouvoir, s'il n'avait montré les mêmes dispositions dans ses rôles de comédien. Cet emploi de comédien qu'il a exercé avec succès, pendant des années, loin de le desservir, donne plus d'authenticité à ses fonctions de chef d'Etat. C'est Diderot qui a raison.
Pierre Merlhiot
A découvrir aussi
- Des comédiens à reconnaître.
- L'abbé Raymond Boissavy n'est plus.
- La naissance d’une nation : des faits et des symboles, une âme, une culture... (1ère partie)
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 213 autres membres