Terre de l'homme

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Saluons une bien timide renaissance de chemins ruraux

SAGELAT

 

Les chemins ruraux, ces liens ancestraux  souvent pillés ou squattés, disparaissent les uns après les autres de notre environnement. Peu de conseils municipaux s'activent fermement à leur sauvegarde intégrale. Il en est, cependant, qui, comptables de ces legs patrimoniaux, ne transigent pas avec leur devoir de conservation et de transmission intergénérationnelle de ces fonds communaux. Qu'il soit permis de féliciter Didier Roques, maire de Siorac, et l'énergie de son équipe municipale pour qui cette mission de continuité n'est pas flexible. Les élus sioracois non seulement refusent toute mutilation mais, en plus, grâce à la disponibilté et au volontarisme associatif de l'Association patrimoniale sioracoise, ils complètent leur mandat d'un difficile et actif rétablissement du réseau qui, temporellement, a pris le chemin de l'obsolescence.

Aujourd'hui nous jetterons un regard sur deux chemins ruraux sagelacois enfouis sous la végétation depuis des lustres. Au cours du siècle dernier les paysans qui les empruntaient, par facilité, se sont écartés de l'assiette et, depuis l'abandon des pâtures collinaires par les ovins, ces chemins n'étaient plus identifiables. Une réhabilitation partagée entre la municipalité, la communauté de communes et un propriétaire a permis de retrouver l'assise de deux de ces chemins. En imaginant la poursuite de cette réhabilitation, menée, dans un premier temps, pour de pragmatiques fins de jonction de parcelles remises en culture, on peut imaginer un rétablissement d'itinéraire pédestre dans les collines et pourquoi pas une création de circuit de loisir ludique et pédagogique.

 

  

Chemin rural devenu sentier pédestre

 

Le chemin rural, aujourd'hui lieu paisible de promenade, peut permettre à nos amis quadrupèdes de savourer d'agréables moments sans être impérativement tenus en laise.

Photo © Pierre Fabre

 

 

Le chemin rural cumule trois critères : il appartient aux communes, il est affecté à l'usage du public, et il n'est pas classé comme voie communale. Intégré au domaine privé de son entité, il bénéficie d'un régime juridique particulier.

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Ce chemin, chemin du vallon  de Lavergne, fraîchement réouvert, depuis des lustres s'était déporté vers la base du flanc collinaire. Il retrouve aujourd'hui son assiette probablement délaissée depuis un siècle, voire plus.

Photo © Pierre Fabre

 

Aux siècles précédents les braves paysans, souvent étaient d'humbles journaliers, tâcherons ou bordiers. Les plus favorisés étaient métayers ou fermiers rares étaient les propriétaires. Ces ruraux, souvent indigents, n'avaient souvent qu'un infime lopin de terre, voire aucun. Ils partaient avec leur cheptel de quelques brebis, d'une chèvre et parfois d'une vache. Leurs animaux avaient pour pâture les parcelles communales ou les chemins ruraux. Ces "conservateurs" champêtres assuraient ainsi parfaitement la tenue du réseau de chemins. Leur disparition a lourdement hypothéqué ce patrimoine qui, souvent, a été envahi par la végétation.

Notre siècle s'ouvre à une reconquête de ces chemins un peu pour leur fonctionnalité mais surtout pour les loisirs. Ces chemins se prêtent aux promenades pédestres, équestres et aussi aux adeptes du V.T.T.

 

On peut, aussi, considérer que les chemins ruraux, avec leurs rives boisées, participent à la stabilisation des sols et par leur sectionnement, généralement matérialisé de haies champêtres, à la rétention des sols. Par ailleurs ils entretiennent l'écosystème.

Pour l'Encyclopédie Wikipédia, de manière générale, un chemin rural est un chemin situé dans un paysage rural et cultivé, habituellement connecté à une route, à un maillage bocager et/ou à des chemins forestiers. Souvent bordé de talus, de haies et/ou fossés, il a longtemps été un élément structurant des paysages cultivés et de la vie rurale.

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Rampe du chemin pastoral

 

Ce chemin rural, très escarpé, était, au siècle dernier un chemin pastoral. Ce chemin constitue le seul lien public d'accès aux parcelles du plateau des Pérascloux. Sa réouverture permet de remarquer les tout petits murets qui le bordent.

Photo © Pierre Fabre

 

Les chemins ruraux ont été de véritables liens de sociabilité.

Les chemins ruraux ont leurs défenseurs et, hélas, leurs pourfendeurs. Parfois certains personnages jouent les deux rôles. En clair on aime bien pouvoir accéder à ses parcelles éparses ou se promener dans la nature mais certains détestent que les flâneurs passent devant leur demeure traversent, par un itinéraire public, leur domaine. La sociabilité d'antan est une valeur qui a fait les frais d'une modernité misanthrope. Le législateur, plus enclin à faire le bonheur des privilégiés que des plus humbles, a imaginé un outil du démantèlement de ce patrimoine c'est l'aliénation.  

Pour ce faire il faut et, malheureusement, il suffit que le demandeur de l'aliénation obtienne l'accord du conseil municipal qui après avoir écouté, pour la forme, les conclusions du commissaire enquêteur valident la procédure du démantèlement. Il arrive que dans des cas très exceptionnels celles-ci nuancent la requête du demandeurs. Il y a bien la publicité imposée dans deux titres qui paraissent dans le département, [cela peut être, par exemple, un hebdomadaire de l'arrondissement voisin, ou un quelconque journal non lu dans la commune] et la consultation de l'affichage à la mairie mais qui lit les documents rassemblés là, pêle-mêle, avec les arrêtés divers et les circulaires qui se chevauchent.

Les aliénations des chemins ruraux c'est pratiquement le "sport" privilégié de certains appareils municipaux. On dirait même qu'ils s'inscrivent dans un challenge. Certaines communes ne peuvent pratiquement plus rien abandonner car tout ce qui était aliénable a été concédé.

Si vous consultez les documents cadastraux et que vous trouviez de longues et étroites parcelles il y a de fortes probabilités qu'elles soient le fruit de l'aliénation.

Il faut bien faire attention. Dès lors que l'aliénation est validée, la cession effectuée est irréversible… sauf une très éventuelle et hypothétique expropriation.

En suivant un agreste cours d'eau on se rend compte que certains chemins latéraux ont été légués ainsi confisquant le loisir pacifique des promeneurs de jouir de l'accès au cours d'eau est définitivement perdu.

 

De grâce ne le tolérez pas.

Certains riverains, qui aspirent à l'appropriation de chemins ruraux, prétextant que plus personne ne les emprunte, n'hésitent pas à les clôturer avec des fils électriques ou pire des fils de fer barbelés. Certains pensant démontrer qu'ils sont respectueux du patrimoine collectif mettent des poignées amovibles. Cette pratique est inadmissible les chemins ruraux ne sont pas l'apanage prioritaire d'un ou de plusieurs riverains. Ils appartiennent au patrimoine communal.

 

Une banne paysagère.

Quand un chemin n'est plus emprunté pour une quelconque raison, mitage abandonné, ouverture d'un autre itinéraire plus pratique, ou toute autre raison, la tentation devient forte pour les riverains de fondre ce chemin dans leur périmètre privatif. Les élus ne tiennent pas à se mettre à dos les demandeurs. Ils louvoient et parfois ils oublient leur rôle de conservateurs du patrimoine.

Un chemin non utilisé peut, à tout moment, redevenir utile voire nécessaire ou indispensable et pas seulement pour les loisirs. Garder un chemin que la nature va coloniser c'est ouvrir une passerelle écologique à la faune et à la flore. Là les oiseaux nidifient, le gibier trouve un fragile havre protecteur et souvent là, dans bien des cas, l'érosion est contrée par ce rempart régulateur des eaux et des vents.  

 

Qui peut évoluer sur un chemin rural.

La réponse est claire : tout un chacun, résidant dans la commune ou non, au même titre qu'un passant peut pénétrer dans un square, emprunter un sentier patrimonial du bord de mer sauf si, bien entendu, l'exécutif municipal, notamment pour des raisons de sécurité, en a limité voire interdit l'accès, risque d'éboulement par exemple.

 

Le chemin rural demeure un vecteur pédagogique et un itinéraire sécuritaire.

On peut difficilement imaginer une évolution agréable sur le bord d'une chaussée largement fréquentée par les flux routiers.

Si vous voulez donner à votre quadrupède un bol d'air sans que celui-ci n'ait l'intention d'aller vérifier le diamètre des roues des motocyclettes ou la pression des pneumatiques des voitures et, si vous voulez lui concéder une petite échappée hors laisse dans un sylvestre chemin rural, vous partagerez un moment de promenade des plus agréables. Si vous avez des enfants qui souhaitent découvrir les fleurs printanières, examiner les jaillissements sourciers ou cueillir des pissenlits pour la mamy vous saurez gré aux rares conseils municipaux qui se sont faits conservateurs de ce patrimoine que tant d'édiles ont préféré,  pour satisfaire quelques intérêts particuliers, concéder.

 

 

Niche de la fontaine de Pasquet

 

Tout près de l'impasse de ce chemin on devine, sous la végétation, une fontaine collinaire qui, jadis, servait pour abreuver les brebis.

Photo © Pierre Fabre

 

Excavation de la fontaine de Pasquet

 

L'été fut plutôt sévère et l'automne n'a guère permis aux sources et fontaines de se reconstituer.

Photo © Pierre Fabre

 

Creux à sec de la fontaine de Pasquet

 

Une source intermittente qui aura besoin de fortes et persistantes pluies pour renaître.

Photo © Pierre Fabre

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D'aucuns, peut-être rapidement, soutiennent à la légère, qu'Antoine de Saint Exupéry serait le géniteur de l'aphorisme : "On n'hérite pas la terre de nos ancêtres, on l'emprunte à nos enfants" .

Exact ou réappropriation, je ne saurais le dire ! Pour d'autres ce serait une adaptation d'un proverbe indien : La Terre n'est pas un don de nos parents. Ce sont nos enfants qui nous la prêtent. cf: http://amerindien.over-blog.com/

 

Pour les chemins ruraux c'est exactement la même chose. Ce patrimoine est, ou devrait être, un legs transmissif.

 

 



21/11/2020
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