Un savoir-faire en voie d'exctinction, la manipulation du feuillard.
Pierre Jouhannel, meyralais, feuillardier du bassin de vie cypriote, témoin d'une vie créative empreinte d'un savoir-faire ancestral est un personnage qui illustre parfaitement le Pays de l'homme, bassin de vie où les ultimes reliefs de la Forêt Barade offrent encore des permanences de cette finesse sylvestre.
Villefranche-du-Périgord, 2007, la Félibrée. Pierre Jouhannel, le feuillardier meyralais. En quelques heures, il fut, lors de cette félibrée, l'extraordinaire passeur de son savoir-faire. Photo © Pierre Fabre
Situons la terminologie contemporaine de feuillard. De nos jours, ce substantif est utilisé pour plusieurs cas de figure. Il est emprunté dans les domaines de l'emballage, de la manutention ou de l'électronique.
Aussi intéressants que soient les feuillards dans ces usages, nous porterons notre regard de ce jour vers le feuillard résultant du travail ancestral de la manipulation du bois et dont l'artisan qui le met en valeur, est le feuillardier.
Le feuillardier, jadis, était un artisan qui s'insérait dans la chaîne de la tonnellerie car il réalisait des cerceaux pour les barriques et autres récipients vinicoles. De nos jours, le feuillardier n'est pratiquement plus un artisan mais il est devenu un artiste du travail du feuillard. Ce n'est pas tout à fait un hasard si l'artisan et l'artiste sont issus du même radical, l'art.
Le feuillard était à l'origine employé dans la très ancienne technique de cerclage des tonneaux. Pour réaliser cette opération, il était indispensable de disposer d'un matériau à la fois souple et résistant à la traction. Les cerclages, avant d'être métalliques, ont donc d'abord été fabriqués avec des branches, fendues en rubans ou en lanières. Il ne pouvait donc s'agir que de branches jeunes, non lignifiées, qui, par conséquent, portaient encore leurs feuilles, d'où le nom de feuillard
Des passeurs de savoir-faire. Le métier demeure toujours pratiqué en Charente, Limousin et dans le Nord de la Dordogne. Le feuillardier (ou cerclier) d'antan fabriquait, entre autres, des cercles en lattes de châtaigniers pour entourer les tonneaux. Le feuillardier exerçait un métier souvent polyvalent. Ces personnages aujourd'hui, hélas, en voie de disparition, pratiquaient le bûcheronnage et, aussi, parfois, la vannerie. Ils s'attelaient aux piquets, lattes et voliges de couverture, échalas, bardeaux.
Notons qu'aujourd'hui encore, pour les crus les plus prestigieux du Bordelais, les tonneliers cerclent encore leurs précieux fûts de feuillards. Par cet aspect, ils n'en ont que plus de noblesse.
Ces feuillardiers exerçaient principalement pendant les mois d'hiver. Cette activité difficile était peu valorisante. Il y a un peu plus d'un siècle, ces braves artisans se rassemblèrent dès 1905, en un syndicat, et plusieurs mouvements de grève furent organisés en 1908, 1912, 1934 et 1936. Ces mouvements sociaux eurent pour conséquence une légère revalorisation de leurs tarifs.
La cabane du feuillardier. Ces cabanes, aujourd'hui, marqueuses de notre passé, passent plutôt comme des éléments de décor. Elles rendent hommage au savoir-faire de leurs auteurs, de leurs prédecesseurs et ancêtres. Ces cabanes étaient multifonctionnelles. Elles servaient d'abri pour remiser les outils des paysans, voire pour eux-mêmes pour se protéger de la pluie. Elles pouvaient, aussi, servir comme aire d'abri pour un petit cheptel d'ovins.
Les cabanes de feuillardier étaient montées pour plusieurs années et leur couverture pouvait être renouvelée. On peut affirmer que, dans tous les cas, elles étaient –ou elles sont- plus esthétiques que certains abris modernes qui altèrent la beauté de notre ruralité sylvestre.
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