Windsor : comme le temps passe.
Photographie privée de la reine prise avec le duc d'Édimbourg au sommet des Coyles of Muick, en Écosse en 2003.
Dans les années 70, mon collège organisait, chaque année, un voyage à Londres. J'assurais, avec quelques collègues, la bonne marche du voyage qui se faisait encore en autocar. Le rêve pour les collégien(ne)s : Périgueux - Calais par la route, un ferry pour traverser la Manche, Douvres puis Londres où nous logions à l'hôtel ou chez l'habitant.
L'excursion au château de Windsor tout proche, s'imposait.
Une année, une imposante voiture noire sortit du château : à l'intérieur, la reine Elisabeth et son époux.
Nos élèves interloqués, se ressaisirent et prirent des photos. Je partageais avec eux leur curiosité pour le couple royal. Certains journaux spécialisés entretiennent cette appétence pour le monde de la noblesse. Leurs lecteurs rêvent d'un monde dont ils ne seront pas. Notre groupe n'en était pas là mais il y avait dans cette rencontre inopinée, matière à discussion en classe. Nous n'avions pas devant nous un couple d'opérette pour coeur de midinettes. Tous deux s'étaient comportés remarquablement pendant la dernière guerre. Leur pays avait contribué à notre libération.
La princesse Elizabeth contribue à l'effort de guerre comme officier dans la branche féminine de la British army (wikimedia commons)
Cinquante ans après cette rencontre fortuite où nous avions vu un couple heureux, souriant, nous faisant des signes de la main, ce 17 avril 2021, Windsor avait un tout autre visage : la petite ville était déserte, la fourmilière traditionnelle de touristes avait laissé la place à de petits groupes silencieux et graves.
Tout se passa dans l'enceinte du château où l'ordonnancement rigoureux des troupes et des invités et la rigueur du protocole n'altéraient pas l'émotion difficilement contenue des personnes présentes.
S'il y avait une image à retenir de cette cérémonie, ce serait celle de la reine, seule, digne, à laquelle la caméra avait épargné les artifices techniques dont la télévision a le secret.
le château de Windsor
Notre excursion à Windsor, il y a 50 ans, relève de l'anecdote, la cérémonie des obsèques de l'événementiel. Mais à y regarder de plus près, par-delà les apparences, il y avait là tous les éléments pour aborder avec nos élèves, une grande partie de l'histoire du Royaume Uni. Le château de Windsor fut construit par Guillaume le Conquérant pour contrôler la Tamise et les faubourgs de Londres après sa victoire à la bataille d' Hastings en 1066 où il avait défait le roi saxon. Le pouvoir passa aux mains des Normands qui imposèrent leur langue, du moins dans tout ce qui relève du régalien : l'Administration, l'Armée et la Justice. Encore aujourd'hui, les Anglais se souviennent de cette invasion et préfèrent, quand ils en ont le choix, le mot saxon "freedom" au mot normand "liberty".
Au cours de la cérémonie, nous avons vu l'archevêque de Canterbury, chef spirituel de l'église anglicane dont la reine est le chef temporel.
La cathédrale de Canterbury
Lors de ces voyages à Londres, nous faisions un arrêt à Canterbury pour visiter la cathédrale et je surprenais les élèves en leur montrant l'endroit où l'archevêque Thomas Becket avait été assassiné le 29 décembre 1170 sur l'ordre d'Henry II.
Chapelle Saint Martin à Limeuil
Pour se racheter, ce dernier puis son fils Richard Coeur de Lion firent construire des chapelles expiatoires. Deux se trouvent en Dordogne, l'une à Chancelade et l'autre à Limeuil (la chapelle Saint Martin).
Nous aurons peut-être un jour, l'occasion de parler de cette religion de rite anglican qui remonte à Henri VIII mais revenons à Windsor où se trouve en ce jour du 17 avril 2021, la reine Elisabeth seule, privée de son compagnon des bons et mauvais jours. L'espace d'une journée, nous avons oublié tous nos griefs : le Brexit, les scandales...pour ne retenir que l'image d'une femme, digne dans la douleur, consciente d'avoir à affronter la solitude, et qui n'est pas de nature à s'apitoyer sur son sort ou du moins à le laisser paraître.
Never explain - Never complain
ne pas expliquer - ne pas se plaindre
Pierre Merlhiot
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Demain : ce blog saluera des "mousquetaires" qui ne manipulent pas l'épée mais les sécateurs, la truelle, la pierre et le rotofil pour sauvegarder le patrimoine, dit obsolète, sioracois.
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